m

La vieille dame (2)

Merci à tous de vos commentaires. Au billet précédent, sur twitter et facebook, dans les médias, par courrier… L’émotion suscitée par cet événement montre l’intérêt et l’inquiétude des Français vis-à-vis des problèmes de l’âge.

Je me suis rendue cet après-midi auprès de « la vieille dame », assez troublée, n’ayant pas à l’évidence une conscience claire du déroulement des derniers jours, peut-être de ceux d’avant, je ne peux juger de ce qui est trouble passager ou détérioration plus ancienne. Elle ne souffre pas, ne montre pas de signe d’inquiétude, paraissait heureuse de ma visite, de voir que l’on prenait de ses nouvelles.

Aujourd’hui, l’enquête administrative concernant la maison de retraite est ouverte et je souhaite qu’elle se développe dans le calme, qu’elle soit complète, puisque nous ne sommes plus dans l’urgence. Les questions financières opposant cet établissement à la famille seront réglées par la justice et je n’ai pas à intervenir en la matière.

J’informerai des décisions prises. Ce cas individuel est riche d’enseignements pour nous tous et nous saurons les verser au projet de notre loi sur le vieillissement et la révolution de l’âge.

La vieille dame de Chaville (1)

Un article, très opportun, dans l’Yonne républicain. Qu’un twitto me transmet, puis un autre. Et ensuite un autre article, puis un autre, puis un autre… Et un univers de complexité, d’erreurs, voire de fautes, mais plus encore de petites et grandes probables bassesses; de « différents financiers », mais aussi de réactions généreuses, ou moins généreuses, d’indignations, de soutiens mais aussi de critiques… Bref le vent du buzz au-dessus d’un de ces nids d’oiseaux divers entourant les grands âgés.

La vieille dame, expulsée à l’orée d’un week-end pour cause d’impayés à sa maison de retraite est devenue en quelques heures, sans doute une héroïne de roman restant à écrire, mais surtout l’oeil d’un petit cyclone médiatique dont elle n’a cure et peut être pas même consciente.

Pour la ministre que je suis, un coup de projecteur sur la pâte difficile que je travaille depuis six mois : l’immense complexité, humaine, administrative, réglementaire, éthique, de la politique de l’âge.

La vieille dame a 94 ans, deux fils dont l’un est médecin. Depuis deux ans, elle vit dans une maison de retraite à caractère privé lucratif, de bon standing apparent, dont le tarif hébergement quotidien (à la charge de la résidente et/ou de sa famille) est de 124 euros par jour. Selon le directeur, le montant de la retraite de la dame suffirait à y pourvoir.

Ces informations s’égrènent au cours de la journée, transmises par l’Agence Régionale de Santé que j’ai diligentée sur place, par le médecin des urgences qui a accueilli la vieille dame dans son service, point de chute après son départ de la maison de retraite et l’histoire se construit, évoluant d’une faute professionnelle -celle de la maison de retraite- à une défaillance de solidarité et de soutien familial.

J’ai promis d’informer de toutes les suites de cette affaire à la fois individuelle et sans aucun doute universelle par les enseignements dont elle est porteuse, en premier lieu pour nous qui avons en charge cette « politique de l’âge » que je crois si cruciale dans ce XXIème siècle débutant.

En voilà les premières lignes. La vieille dame est ce soir « à la demande de sa famille » admise dans la clinique privée où travaille l’un de ses fils. « Pour des examens ». Est-ce son souhait ? Est-ce légitime ? N’eût-il pas mieux valu qu’elle demeurât où elle résidait depuis deux ans ?

Essayons de savoir plus avant, de comprendre et d’agir pour que les droits de cette vieille dame, sa dignité et son bien être, ainsi que ceux de toutes celles et ceux qui lui ressemblent, présents et à venir, soient mieux protégés, respectés et compris.

Brève

J’ai cru longtemps que l’intelligence était un outil, une sorte de sixième talent selon la bible, aujourd’hui elle n’est plus qu’une souffrance.

La morosité tue

Comme le tabac, la morosité tue. Plus sûrement encore, sa grincheuse cousine la critique, bête et cynique pour laquelle nous n’avons pas de mot aussi bien sonnant que l’anglais « bashing ». Tous cela mine, empêche, affaiblit, détruit, bref précipite dans ce qui l’a (peut-être) causé.

Je connais tous les chiffres du « noir » : chômage, dette, déficit commercial, illettrisme, décrochage scolaire, suicide.. ce long cortège d’indicateurs dont plusieurs font de nous des leaders européens. Je sais ce qu’il y a de misère, mot ringard et pourtant très actuel, derrière chacun. Et pourtant, notre situation est de très loin moins mauvaise que ce qu’elle fut pendant ou après la guerre de 14 quand chaque famille était endeuillée de l’un au moins de ses combattants, au moment de la défaite de 40 et de l’occupation du pays, pendant la dépression économique qui mena au Front Populaire… La liste pourrait être plus longue. Cela nos parents ou nos grands-parents l’ont vécu et jamais il ne fut question de « déprime » et la réponse fut toujours au final de résister et de réagir.

Je sais la pauvreté des femmes seules avec leurs enfants, je sais aussi le labeur de celles qui « trimaient » à la campagne ou dans les usines. Je sais le sentiment d’exclusion des jeunes des banlieues, je sais aussi celui des fils d’ouvriers polonais ou italiens dans les mines et des petits paysans pauvres qui ne voyaient devant eux que la perspective d’être « placés » pour les uns ou de rejoindre leurs pères à la mine pour les autres.

On ne fera pas en quelques mois des Français autant de pionniers prêts à se battre pour leur pays. Les batailles n’ont plus les visages d’antan. Elles n’en sont pas moins réelles. Essayons-nous donc au moins d’essayer à nous y enrôler…

Elles me paraissent de deux ordres aujourd’hui : la bataille de l’emploi, dont notre gouvernement a fait avec raison sa priorité. Si nous n’inversons pas la courbe du chômage et celle de la désindustrialisation, notre pays continuera de s’enfoncer et atteindra un niveau d’impuissance publique et individuelle non récupérable. Non, personne ne se sauvera seul, les exilés fiscaux pas plus que les autres qui n’auront plus pour monnayer leur talent le prestige de la marque France.

La seconde, qui est moins souvent présentée comme telle, est la bataille de la solidarité. Elle est pourtant à la précédente ce qu’Aaron était à Moïse, non pas l’inverse mais l’indispensable double. Nous avons des années difficiles à passer. Des catastrophes, naturelles ou non, attendent peut-être à l’un ou l’autre tournant. L’évidence de notre destin collectif, la fondamentale égalité qui fait que nous n’avons chacun qu’une vie démontrent chaque jour l’urgence d’un nouveau mode de relations humaines. Sous l’ouragan à New York, il était plus utile d’être proche de son voisin que du Président des Etats-Unis. Les acteurs de la solidarité ne sont pas moins décisifs que ceux de l’économie. On les oublie trop souvent.

La morosité tue, la proximité, la conscience de l’autre, son aide et l’aide qu’on lui porte soignent. Je veux y croire, parce que justement j’y crois.

Tous mes voeux, très simples

Tous mes voeux, très simples, car moins que jamais, j’ai envie de me payer de mots. Les voeux ne sont pas des formules magiques. Ils sont à la fois l’expression de la volonté de faire ensemble, de l’hommage à ceux qui font tant déjà et du souci que l’on a de ceux qui n’ont pas assez.

Ces voeux vont d’abord aux acteurs de la solidarité (déclinée sous tous ses modes, la fraternité, l’égalité, l’amitié, la proximité). La solidarité n’est pas moins un combat que l’emploi, la compétitivité et l’économie. Tous les deux sont comme Moïse et Aaron. Ils se complètent, ils se font face, ils s’équilibrent, et tous les deux sont indispensables à la marche d’un monde qui sans eux serait bancale et plus douloureux encore qu’il n’est.

J’étais tout à l’heure au milieu de ces acteurs, ces millions de bénévoles, de professionnels qui n’ont rien à voir avec les patrons du CAC 40, sauf, pour quelques-uns de ces derniers, pour leurs compétences et leur ardeur à donner chaque minute de leur temps. Mes patrons du CAC à moi, ceux de la solidarité, n’ont ni désir ni raison de s’exiler : leur richesse n’est taxée par aucune fiscalité nulle part, son usage est par contre universel.

Voilà. A eux vont mes premiers voeux, ceux qui viennent les premiers au bord des lèvres. A tous, mon souhait que nous retrouvions l’être et le faire ensemble et que nous prenions conscience de notre destin collectif.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel