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Pluie dans le jardin

Pluie dans le jardin après une demie-journée de bon travail jardinier. Pluie de presque été, paisible, lourde, qui arrive comme une bénédiction des coupes et plantations des heures précédentes. Un calme de ville heureuse, vidée de toute presse, quelques notes tombant d’une fenêtre, des gloussements de pigeons, et ce petit bruit des gouttes pianotant sur le sol, comme des doigts tout petits sur un clavier.

Le sortilège des acanthes et de leur cycle rapide, se renouvelle une fois de plus. C’est maintenant le temps des grandes hampes crevant les parasols de feuilles, droits, par petits groupes désordonnés, verticalisant en quelques jours le regard horizontal du ras de jardin. Dans toute la maison, les fenêtres sont ouvertes pour emmagasiner ces heures comme on fait provision d’instants et de calme. A terre, les toutes premières fleurs de marronniers, minuscules taches de blanc rosé, la tignasse irrégulière de  la pelouse, plus rustique que nature, mal poussée, mal coupée mais vivace, rustique, amicale aux pieds et à la course du chien.

Le ciel recommence à bleuir, les doigts de l’eau s’interrompent un à un, signifiant la fin de cette courte rupture entre le faire et le dire. Le temps maintenant d’écrire.

 

« LR », vous avez dit « LR » ?

C’est désormais chaque jour qu’Alain Juppé illustre pour les Bordelais sa conception de la démocratie. Et ce sont ses adjoints qui en font ne priorité ces dernières semaines les frais.

Un jour, il nomme, il désigne, il distribue des fiefs ; un autre, il tance, menace du cachot qui ne fera pas silence. Après la double désignation de la dauphine, à la Mairie et à la candidature dans la belle circonscription dont je suis l’élue, quelques voix se sont exprimées pour rappeler que d’autres candidats se verraient bien dans la bataille.

Selon notre cher quotidien régional, dès lundi dernier, avant le Conseil Municipal, les coupables de ces prises de parole non autorisées ont été réunis, tancés et sommés de se taire pour exprimer quoi que ce soit d’autre que sa dévotion au chef.

Pas besoin de changer d’initiales. On murmure que le parti  « LR » pourrait devenir « Les Royalistes ». Tout à fait entre nous, ce serait plus adéquat.

 

 

 

 

De la crédibilité de la parole politique

A Bordeaux, une élue de la liste municipale de droite, a déclaré au cours d’un débat sur le logement (sujet crucial à Bordeaux en raison de l’enchérissement considérable de l’immobilier) que « vouloir être propriétaire relevait de l’ancien monde ».

Dépassé, carrément ringard, le souhait d’avoir sa maison ou son appartement à soi ? Sans doute, s’il s’agit d’une volonté trop précoce : nombreux sont les jeunes ménages qui se sont endettés et n’ont pu acquérir qu’un bien situé à des kilomètres de leur lieu de travail ; ils s’interrogent aujourd’hui à la fois devant la lourdeur des traites et devant le frein que leur logement constitue à leur mobilité professionnelle, condition bien souvent de réussite et d’avancement.

Mais, y a-t-il plus légitime, à mi-parcours, de vouloir être chez soi, aménager à sa famille un cadre plaisant, chaleureux et conforme à ses goûts ? Et surtout celle qui proclame la ringardise de la propriété l’applique-t-elle à elle même ?

Que nenni ! Pour se colorer en Bordelaise à son arrivée dans notre ville et vivre dans un confort que nul ne lui reproche de parti pris, elle a aussitôt fait l’achat d’une maison dans un quartier central. Mais de grâce qu’elle ne proclame pas pour les autres l’inverse de ce qu’elle pratique pour elle-même !

Au cours du même débat, cette élue, décidément facétieuse, a proposé comme solution à l’immense problème bordelais du logement (16% seulement de logements accessibles aux revenus de 80% des Bordelais) a proposé « de construire des appartements plus petits », sans préciser ce qu’il en était du sien -ce qu’au demeurant on ne lui demande pas- mais surtout en allant en contradiction complète de la volonté de l’ensemble des édiles de la ville qui, au contraire, souhaitent faire revenir à Bordeaux des familles et non seulement des « ménages » composés de personnes isolées.

Moralité : mieux vaut ne rien dire, ne pas se poser en spécialiste universelle en vue de quelque « delphinat » que ce soit, que de dire sans savoir et surtout de prescrire ce qu’en aucun cas on n’applique à soi-même. La crédibilité de la politique est à ce prix.

Suite de ce billet en commentaire en date du 12 avril

Parc Lescure : Rénover mais sous condition de privatisation partielle

Nous étions très nombreux vendredi 13 février pour débattre avec riverains et sportifs du projet de la Mairie pour l’avenir du Stade Chaban Delmas et de la Plaine des Sports.
Les échanges ont été nourris, argumentés et de très nombreuses réserves ont été émises sur ce projet qui détruit des éléments patrimoniaux du stade Art Déco et fait la part belle aux investisseurs privés au détriment de la pratique sportive actuelle.
La Plaine des Sports est utilisée quotidiennement par plus de 800 personnes sur des amplitudes horaires allant de 7h à 23h en période estivale. Comment alors, concilier dans un espace réduit et dans un respect et un confort de tous, des pratiques sportives parfois bruyantes et des logements ? Cinq mille mètres carrés de surfaces commerciales sont cédées au privé. Elles n’ont rien à y faire sinon établir comme une règle que la consommation doit régenter toute autre activité.


Les équipements sportifs de proximité ne font pas partie des investissements privilégiés par la Mairie qui mise en priorité sur les équipements sportifs de prestige, sur les pratiques professionnelles, à l’image du Grand Stade.
L’objectif assumé du projet et de la commande est qu’il ne coûte pas d’argent public, d’où un projet qui ampute des espaces sportifs et patrimoniaux pour introduire commerces et logements.

Le sujet est sensible et face à la pression, la Mairie a décidé de poursuivre la concertation. Alertée par l’annonce de notre débat, elle a aussitôt diligenté une conférence de presse pour en atténuer la portée. L’élément positif est cette poursuite de la concertation qui autrement aurait dû s’interrompre avant la fin février.

Avec habitants et usagers du stade, nous demanderons que cette concertation reprenne à partir des données du cahier des charges, lui- même issu de la première séquence de rencontres avec les habitants, lesquelles n’ont reçu aucune écoute.

Propriété publique

On se souvient de l’émotion qui entoura il y a quelque dix ans la perspective de vente de l’hôtel de la Marine dans le 7ème arrondissement de Paris ; émotion totalement justifiée qui dépassa très vite le milieu culturel et les Parisiens eux-mêmes pour réunir tous ceux qui légitimement se percevaient comme propriétaires immatériels de ce  lieu exceptionnel. Site, histoire, regard unique sur Paris, pas question d’admettre que ce lieu abrite un hôtel ou des logements de luxe. Nicolas Sarkozy renonça, et en 2018, la majeure partie de ce bâtiment sera ouverte au public.

Combien d’exemples pourrais-je donner… De Ministères sauvés de la vente, de tant de lieux que des édiles soucieux de l’Histoire ont sauvé d’un sort médiocre. Avouons-le, ce n’est pas la généralité, mais l’objet de ce billet n’est pas de faire procès mais d’essayer de faire oeuvre utile.

A Bordeaux, le Maire a décidé de mettre aux enchères l’hôtel de Raguenau, construit dans la même décennie que l’hôtel de la Marine et au même niveau de qualité.  Il est un des rares bâtiments de la fin du XVII ème siècle dont notre ville puisse s’enorgueillir. Chaque Bordelais connaît le balcon arrondi qui couvre son entrée et la glycine séculaire qui s’y love et le couronne. Exceptionnel en tous points.

Depuis deux siècles, la Ville soit l’occupe pour des usages qui font sens dans notre histoire (l’octroi, les archives..) et elle en est depuis bien longtemps propriétaire. Je dis bien : la Ville, pas le Maire.

Aucun Maire d’ailleurs, malgré des temps qui ne furent pas tous aisés, n’a songé à le vendre. Adrien Marquet est à l’origine de multiples réalisations (dont le stade appelé aujourd’hui « Chaban »), Chaban lui-même n’en a pas fait moins (dont le pont suspendu qui, lui aussi, s’appelle désormais Chaban..), ni l’un ni l’autre n’ont eu l’idée de vendre le patrimoine municipal pour les financer.

Alain Juppé a vendu cinq immeubles pour financer la part de la Cité Municipale qui lui revenait, dont l’un, historique également, place Pey Berland et un autre, rue père-Louis-de-Jabrun qui eût utilement pu devenir la « maison des associations » qui manque cruellement à Bordeaux. Rassurons-nous, pour l’instant, le Palais Rohan n’a pas été mis dans la corbeille commerciale du Maire et je dirais même que, convenablement entretenu et mis en valeur, il ne paraît pas immédiatement menacé.

Ni entretien, ni réparations au contraire depuis 20 ans pour l’hôtel de Raguenau. Ce qui lui permet aujourd’hui d’évoquer le mauvais état de l’immeuble pour le vendre. Un peu comme ces maquignons qui ne nourrissent pas une bête dont ils veulent se débarrasser.

J’enrage parce que cela vient en contrariété de tout de ce que nous devons défendre concernant la propriété publique. Ni un Maire, ni le Président d’aucune collectivité territoriale, non plus -d’une façon différente-  qu’un Ministre ou un Ambassadeur, n’est propriétaire des lieux remarquables qui lui sont confiés.
Il a le devoir de les entretenir, pas de les vendre. Il en est le dépositaire, en aucun cas le propriétaire.

L’hôtel de Raguenau appartient aux Bordelais, à leur Histoire, au prestige de leur ville et à son attrait, ce dernier que le Maire s’attribue trop souvent. Espérons que la mobilisation des Bordelais, l’engagement des élus d’opposition, sauront convaincre. Si nous devions nous contenter du vote des élus municipaux majoritaires, vote automatique, sans une faille quel que soit le sujet, chacun de ces élus sera comptable de cette perte dans le prochain tome de l’histoire de Bordeaux « Bordeaux au XXIème siècle », où ne risque de figurer aucune des réalisations urbaines des trois mandats d’Alain Juppé, non plus que la médiocre et intensive promotion immobilière dont notre ville demain sera défigurée.

 

 

 

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