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Intervention en Conseil municipal du 17 décembre 2018

Monsieur le Maire, comme vous je pense que nous ne pouvons faire l’économie de réfléchir et de nous exprimer sur les événements survenus ces derniers dix jours

Tout d’abord les manifestations violentes de ces deux derniers samedis. Je n’évoquerai que notre ville où elles ont été particulièrement destructrices, semant saccages, blessures  et barricades au cœur meme de Bordeaux et réunissant ce dernier samedi plus de manifestants qu’à Paris. Ceci fait  de notre ville la première citée pour la mobilisation et les actes de violence après Paris.

Pourquoi Bordeaux, beaucoup plus que Lyon qui est restée paisible, Nantes … C’est une interrogation véritable et vous même vous etes posé la question.

Certes Bordeaux est une ville excluante, par le prix du foncier et des loyers d’abord, par le coût de la mobilité, qu’il s’agisse du stationnement et des parkings. J’étais vendredi dernier dans le service de soins palliatifs de l’hôpital Saint Andre. Une famille visitant un malade mesurait le temps de sa visite en heures de parkings et de ce fait l’a abrégé. Il s’agissait d’une famille rurale, sans doute modeste : cela fait mal à qui l’entend, mal certainement davantage à qui est obligé à ce calcul. Certes, celui ci ne peut éprouver qu’un sourd ressentiment envers la capitale de sa région.

Un deuxième exemple est le coût du logement pour les étudiants venus de l’ensemble de la région. Nous savons que cela est un frein pour tous ceux issus des zones rurales ou des petites villes qui ne peuvent compter sur une aide substantielle de leur famille. A Bordeaux au coût s’ajoute la rareté, et ceci pousse les étudiants soit à renoncer soit à se rabattre sur des villes moyennes pour poursuivre leurs études. Ce caractère dissuasif fait naitre chez eux un ressentissement envers la capitale de leur région

Ce n’est sans doute pas seulement les coûts qui entrent en jeu. Nous avons tous en mémoire le titre d’un film de Charlie Chaplin « les lumières de la ville ». Nous ne pretons pas suffisamment attention au luxe qui s’étale dans les manifestations de la cité du vin ou de nombreux événements. La distance entre cette richesse concentrée et les rues et places d’une petite ville, où de modestes magasins ferment les uns après les autres et où les seules panneaux publicitaires sont des panneaux « à vendre » est si considérable qu’elle en devient douloureuse. A force de passer pour une ville attractive, Bordeaux finit par paraître comme un eldorado pour touristes, à mille lieues du réel quotidien d’une majorité d’aquitains

Mes paroles ne sont pas des paroles d’opposante. Dans les difficultés, l’unité doit toujours l’emporter. Nous cherchons seulement à comprendre.

Je  tiens aussi à évoquer le 2 ème drame qu’a subi notre région : la trahison de Ford à l’égard des salariés comme des pouvoirs publics. Vous évoquez poliment, trop poliment la possibilité d’une nouvelle démarche avec des industriels que nous pouvons tous, unanimement qualifier de voyous. Vous avez ce matin avec les présidents de grandes collectivités de notre région exprimant que la dérobade de Ford était une insulte pour nos territoires.  Mais c’est aussi une insulte aux pouvoirs publics eux-mêmes qui ont investi 25 millions dans l’appui à cette entreprise et j’aurais aimé entendre que ceux ci ne resterons pas sans réaction.

Ford se retire de la France, la France doit se retire de Ford.N’est ce pas un devoir après la fermeture du dernier site industriel de Ford dans les conditions misérables que nous venons de connaitre, d’en tirer les conséquences en annulant toutes les commandes publiques à cette entreprise et aussi, dans les limites légales, de demander remboursement au maximum des 25 millions investis.

Je crois moi aussi qu’il faut savoir être en colère. Cette colère n’a de sens que quand elle est animée par l’intérêt collectif. Il s’agit ici de retrouver la maitrise de notre destin national.

 

NB : Le Maire de Bordeaux dénature régulièrement mes propos et les noie dans la dérision ou le mépris. Ceci m’oblige à écrire mes interventions et à les lire pour ne pas en déborder, ce que je déteste, la parole libre m’étant tellement plus naturelle. Il a affirmé cette fois que cette intervention « abaissait le débat »  citant des paroles que je n’avais pas prononcées. Cette attitude m’est devenue insupportable. Elle est indigne d’un homme d’Etat et je ne peux plus demeurer sans l’exprimer.

 

Non cumul des mandats dans le temps : que devient la promesse de Macron ?

Même si l’interdiction du cumul dans le temps au delà de 3 mandats successifs identiques a piteusement disparu -en même temps que Bayrou- de la loi « confiance et modernisation de la vie publique », il est curieux que cet interdit ne soit pas un instant évoqué dans le grand papier de @sudouest consacré ce jour à une possible nouvelle candidature d’Alain Juppé à Bordeaux en 2020.

Premier mandat en 95 : en 2020, aura donc accompli 24 ans de mandat. Non, je ne fais pas d’erreur de calcul : il a été un an éloigné de Bordeaux pour inéligibilité, ce qui a valu aux Bordelais une élection municipale supplémentaire (2006) à l’occasion de laquelle Juppé a d’ailleurs promis qu’il serait l’homme du mandat unique.

L’opinion publique est très majoritairement favorable à ce non cumul dans le temps, machine à fabriquer des potentats locaux inamovibles. Cela Alain Juppé lui même ne peut l’ignorer. Qu’il ne « s’exprime pas avant 2019 » est de bonne guerre : si c’est oui, tous les aspirants vont faire grise mine, si c’est non, Juppé lui même comptera moins et dans ses rangs les « conspirants » feront rage.

Mais de quelle élection s’agit-il ? de l’élection municipale ? de l’élection à la tête de la métropole, laquelle gagne chaque jour en importance ? La messe n’est pas dite de ce point de vue non plus. Comme Emmanuel Macron a fait disparaitre le non cumul dans le temps, il peut faire apparaitre l’élection au suffrage universel des Conseillers métropolitains ..

« On va s’en débarrasser cette fois ! »

C’est devant un parterre d’affidés qui tenaient bivouac sur un trottoir de la place Gambetta à Bordeaux qu’Alain Juppé a pris la parole pour dire tout le bien qu’il pensait de la candidate Les Républicains qui m’est opposée pour l’élection législative. Toute la majorité municipale était là, ce qu’il faut de personnel municipal, de membres du parti et de courtisans ordinaires.

Jusque-là, rien que de normal ou du moins d’habituel. Quelques phrases pour la candidate, davantage pour la députée en titre (ma pomme en l’occurrence)  qui a, outre le grand tort d’être d’une autre tendance politique que lui, mais aussi de l’avoir délogé de son mandat en 2007, puis d’être réélue en 2012, Alain Juppé s’étant retiré sans panache trois semaines avant le scrutin, les sondages lui étant défavorables. Ce retrait a été d’ailleurs curieusement gommé de toutes ses biographies comme des centaines d’articles qui lui ont été consacré en préparation des primaires de la droite…

On aurait pu attendre quelques éléments politiques pour motiver son choix et soutenir son discours. Un seul en fait est pour lui déterminant me concernant. Si le journal « sudouest » ne le mentionnait pas, on n’aurait sans doute pas cru la phrase dans la bouche d’un ancien Premier Ministre, qui se positionne en homme d’Etat

-« On va bien finir par s’en débarrasser cette fois ! » *

Alain Juppé souffre d’une maladie incurable : le vinaigre lui coule dans les veines. Le mépris lui vient aux lèvres comme un tic de langage, un bégaiement incontrôlable de la pensée. Nous en souffrons régulièrement au Conseil Municipal, où par exemple il parle systématiquement à sa voisine et dauphine quand nous prenons la parole pour bien montrer le peu de cas qu’il fait de son opposition. En 2007, entre les deux tours de la législative, Ségolène Royal était venue avec moi sur le terrain, entrainant derrière une foule qui croissait à chaque pas. Alain Juppé avait déclaré à la presse qui en avait fait un titre  « la candidate socialiste a fait venir le SAMU« . Trois jours après, il était battu.

Pour autant, je demeurerai dans mon attitude de respect, eu égard à ses fonctions. A l’issue de la Primaire qui l’avait vu largement distancé par François Fillon, j’avais demandé à notre groupe de n’y faire aucune allusion et de s’abstenir d’une opposition trop vigoureuse. Tous, sauf un, nous nous y étions conformés. De même et quoi qu’il en dise je ne l’attaque jamais « ad hominem », non plus que sur des questions privées ou passées. Cela aussi me parait relever de l’éthique en politique.

 

  • journal sud-ouest, le 5 avril 2017 (l’un de nous était aussi présent et l’a entendu)

Les nouveaux apostats

Lors du dernier Conseil de Métropole, alors que je saluais l’engagement de Benoît Hamon pour le sport comme outil de santé publique, Alain Juppé m’a narquoisement répondu: « Eh bien, les nouveaux convertis sont une fois encore les plus zélés.. ».

La formule est bien connue, mais qu’en est-il des nouveaux apostats ? Ceux qui, plus ou moins patauds, reprennent le train pour Bordeaux (c’est une image) et après avoir déserté Juppé, pour certains dès le lendemain, viennent à Canossa ?

Qu’en est-il de Juppé lui-même, qui, le jour d’après l’article du « canard enchainé », a proclamé, alors que personne ne lui demandait rien, qu’ « il ne serait pas le plan B ». Il est amusant à ce propos de poursuivre l’anecdote évoquée à l’instant. Avec beaucoup de retenue, je lui répondais qu’en matière de nouveaux convertis, chacun devait s’interroger sur soi-même avant de brocarder les autres. Sa réponse fusa aussitôt: « Moi, Madame, je n’ai pas eu à réfléchir, je me suis rallié dans la minute ». Il s’agissait bien sûr du ralliement à Fillon, aussitôt après l’annonce des résultats des primaires.

Aujourd’hui, c’est surtout des nouveaux apostats qu’il s’agit, ceux qui se saisissent de la déclaration de Fillon après sa convocation pour probable mise en examen pour s’éloigner. Notons que ces départs ne sont pas survenus tout de suite : tous ont attendu les réactions de la presse. Eût-elle été plus réceptive au ton gaullien de Fillon, eux-mêmes auraient été moins rapides et, par exemple, auraient pu attendre le rendez-vous des juges, car il ne s’agissait que d’une convocation qui aurait pu ne pas déboucher sur la mise en examen.

Ces nouveaux apostats, après avoir lu les commentaires peu amènes des médias, se sont alors autorisés au départ, amenant hier 3 mars, le journal « Libération » à mettre en ligne un compteur qui renseigne à la fois sur la célérité de chacun et sur leur nombre total en une seule journée (plus de 100).

Situation particulière à Bordeaux, car si Alain Juppé se portait candidat et venait à être élu, serait-ce sa « dauphine » qui serait effectivement couronnée Maire ? Première à avoir rejoint Fillon,  dernière du groupe des juppéistes à le quitter, sa situation serait alors peu confortable aux yeux des Bordelais. L’apostasie est un métier difficile quand il devient un art de répétition.

Garder la tête froide n’empêche pas à l’occasion de sourire. Je crois même que sourire en est la condition.

La politique a ses gaietés

Le sympathique « tire bouchon » qui éveille dans l’inquiétude chaque samedi matin petits et grands élus du Sud Ouest narre ce 3 décembre un court échange de la veille entre Alain Juppé et moi.

Alors que les éléments se déchaînaient contre la bonne tenue du Conseil de Métropole, m’empêchant de poursuivre mon intervention sur le délicat sujet des transferts d’équipements ville/métropole, je rappelais dans un grand bruit d’écrans qui montaient et se baissaient de manière frénétique, l’histoire que racontait l’ancien Président Giscard d’Estaing, alors jeune collaborateur d’Edgar Faure. Celui-ci lui avait donné mission de compromettre le déroulé des meetings de ses adversaires en sabordant micros ou lumières de manière à déstabiliser l’orateur, indiquant qu’ « un problème technique suffisait à empêcher de poursuivre le fil d’un discours ».  Au passage, n’est-il pas délicieux d’imaginer le Président du « discours du bon choix » trifougnant  prises de courant et commutateurs ? Précisons que « trifougner » est un mot auvergnat que Giscard doit prononcer de façon savoureuse.

Alain Juppé connaissait sans doute l’histoire et a répondu avec humour « pour vous empêcher de parler, Madame, il faudrait au moins DEUX problèmes techniques… »

Je l’en remerciais aussitôt, car c’est au fond un hommage… La salle rit à l’échange qui n’avait en effet rien de désagréable de part et d’autre.

Notre quotidien régional ayant amputé la séquence de son meilleur, il m’a paru nécessaire de la conter dans son entier et en particulier dans son meilleur qui est de rétablir l’homme « au nom d’emprunt » comme le qualifiait de Gaulle dans son rôle précoce de petit mécano. La politique a décidément ses gaietés. Ni trop nombreuses, ni trop durables et d’autant plus remarquables.

 

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel