m

Rien qu’un mot (33)

Deuxième débat entre nos candidats. Plus alerte que le précédent, mais la sévérité de forme ne m’avait pas déplue. Beaucoup d’accords entre les trois et tant mieux. J’ai été génée au chapitre des violences de banlieue de l’absence quasi-totale de deux mots : la drogue, les femmes. La drogue et le commerce de la drogue, élément majeur de la gravité et de la difficulté de raisonner selon nos seuls fondamentaux. Le rôle des femmes. Ségolène a eu l’idée et l’envie d’en parler, quand on lui a fait préciser l’orthographe du mot « maire » après qu’elle a dit « le rôle des maires ». Le rôle des femmes et bien sûr des mères est décisif. Dernier rempart d’autorité, dernière référence pour ces jeunes quand tout s’écroule. Mais du côté de l’ordre aussi : dans les débats de novembre dernier, aucune femme. Un ministre de la ville… ou de l’intérieur qui serait une femme sans aucun des signes habituels du pouvoir, qui se rendrait dans les banlieues et représenterait autrement l’autorité de l’Etat, l’ordre, la justice et la compréhension, serait mieux entendue et à son tour mieux comprise.

Ces débats sont une leçon de démocratie. Pourquoi ne pas les imaginer aussi à l’échelon régional ou local. Les journalistes sont intervenus davantage que dans le débat précédent mais sans jamais couper les candidats ou en tout cas les empêcher de s’exprimer. Ce qui n’a nui en rien à leur talent. Je suis heureuse que ce soit le PS qui ait eu l’initiative de cette évolution de la pratique médiatique des campagnes électorales.

Prise de terre

Première flaque rouge dans le mur couvert de vigne vecchii. Je mène, concurrement à ce blog, un « cahier de jardin » où je note les bonheurs et les deuils que la nature, le cycle des jours et des saisons, apporte à ce petit univers. Privilège entre les privilèges d’avoir un jardin, tout petit il y quelques mois, plus grand aujourd’hui ; privilège aussi de savoir lire les signes que font trois brins d’herbe qui poussent à force d’énergie entre les pavés, ou encore l’appel au large d’un branche fleurie qui s’élève malgré tout entre deux murs. C’est une de mes forces à moi de regarder et de savoir lire chacun de ces signes, de m’en réjouir mais aussi d’en porter le deuil quand les jours s’amenuisent, quand les hostas disparaissent et se confondent à la terre sombre, quand mon marronier, personnage éminent de ce blog, souffre et exige que je parle de lui.

Reste que le cahier de jardin n’en mène pas large, jamais victorieux d’aucune concurrence, dont celle de ces billets quotidiens. Petite revanche pour lui quand il déborde sur eux, que la politique, Juppé et des tas d’autres se font tout petits sous les grandes ramures ou les feuilles fragiles de mon univers intime.

J’ai appelé ce billet « prise de terre », parce qu’en allumant l’ordi, c’est l’idée qui m’est venue: si tous les appareils informatiques ou ménagers survivent aux tensions, aux changements de courant, aux caprices de l’EDF et d’autres sociétés siglées, c’est à cause de ces prises de terre, très laides d’ailleurs, mais qui font le même office que mon jardin et les feuilles rouges de mes vignes vecchii : me relier en prise directe à la terre profonde et à l’univers immense.

Logement : un droit opposable ? (31)

Sur le thême « logement et précarité » avait lieu hier au Grand Parc, un débat à l’initiative de la bibliothécaire du lieu, Dominique Dat, rayonnante d’intelligence et de compréhension des multiples facettes de son rôle d’animateur culturel du quartier.

Plusieurs intervenants. Le premier, Olivier Langlois, en charge du logement à « ATD quart monde » a très opportunément introduit le débat par les chiffres issus du rapport sur le mal logement de la fondation Abbé Pierre. – 3 millions 207 000 personnes en mal logement

dont . 85 000 SDF

. 934 000 sans logement personnel (cabanes, caravanes..)

. 2 187 000 sans logement décent (vétuste..)

Ces trois millions correspondent à 5% de la population française

– 5 millions 870 000 personnes hébergées chez un tiers

Au total : plus de 9 millions de personnes ayant un problème, grave à très grave, de logement ; soit un français sur 7.

Après la présentation de ces chiffres, Olivier Langlois a focalisé sa présentation sur la nécessité de faire du logement un droit opposable (susceptible de recours juridique), comme c’est le cas pour la scolarité et la justice. Economie pour la société au regard des chiffres suivants

– habitation en HLM à Paris : 178 euros par personne et par mois

– hébergement de secours en chambre d’hôtel : 660 euros (l’Etat loue chaque nuit à Paris 6000 chambres d’hôtel)

– accueil en CHRS 1050 euros

– placement d’un enfant du fait de l’absence de domicile de ses parents : 4500 euros (tous ces chiffres, par personne et par mois)

Je donne ces chiffres malgré leur austérité pour servir de base à la réflexion sur la question posée, à savoir le droit juridique (et non seulement le droit moral évident) au logement.

Pour dire le vrai, je n’ai pas de réponse dogmatique sur la question. En première analyse, ce droit opposable, c’est à dire « justiciable », parait difficile à concevoir et à mettre en place. Je vois davantage, un droit « programmatique », une obligation de moyens faite à l’Etat et aux collectivités pour garantir l’accès au logement. Les ambitions du plan d’habitation sont (20% de logement social) sont désormais insuffisantes au regard des besoins. Reste aussi à mettre en place des pénalités d’une autre importance que celles qui touchent actuellement les communes qui ne satisfont pas à ce taux ; et à ce que les hommes politiques n’aient pas comme première intention de dévier la loi, ce qui a été le cas d’Hugues Martin, faisant voter au parlement un amendement permettant de comptabiliser dans ces 20% l’accession à la propriété des ex-locataires de logements sociaux.

On s’étonnera peut-être que…la Suisse garantisse le droit au logement. En se référant aux textes, cette garantie parait davantage une facilitation de l’accès au logement qu’un droit opposable (https://www.admin.ch). Voilà en tout cas une question qu’il faut poser, où il faut entendre et voir le possible. Si nous ne faisons rien, rien ne se fera. C’est une règle universelle : « nous ne vivrons que ce que nous changerons ». Une camarade et amie a cité ce soir cette phrase dans la petite réunion que nous avions à la Bastide. Elle me parait très juste.

Je reviendrai dans les billets suivants sur les thêmes du débat du Grand Parc, et sur cette question décisive du logement. Merci de vos contributions : bâtissons ensemble le programme législatif que nous porterons également ensemble dans la circonscription des deux rives (IIème circ.) en face d’Alain Juppé !

Le chameau de la place Gambetta (30)

Interview roboratif, sous la plume de Christian Seguin, dans Sud-Ouest de ce matin (édition locale du 20 octobre) L’interviewé, Olivier Besse, réalisateur et metteur en scène de son état, est un type formidable 1- parce qu’il pense la même chose que moi 2 – parce que je pense la même chose que lui. C’est pas si souvent qu’il ne faille en profiter.

La même chose que lui sur la conception générale du « relooking » de Bordeaux et son déficit en chaleur humaine et en vision esthétique. Je le disais récemment dans une réunion publique à la Bastide : on nous fabrique une ville d’énarque, doublée d’une ville de polytechnicien ; ce dernier étant particulièrement chargé du plan de circulation et de la formidable complication des trajets qui sont imposés aux automobilistes par un jeu subtil de sens interdits qui rompent les lignes droites au profit de lignes brisées et de labyrinthes que seul un polytechnicien peut concevoir. Geométrie très post euclidienne des formes, austérité des matériaux, avec quelques touches de gaieté comme ces grandes tombes noires qu’on a aligné place Pey Berland en guise de bancs sous des miradors de ciment supposés éclairer. Olivier Besse se prend à rêver qu’un jour les Bordelais se réveilleront avec l’idée de peindre la grisaille des pavés wilmotte. Dommage que nos « MJS » (les jeunes socialistes) qui ont réussi à égayer la campagne municipale n’y aient pas pensé les premiers. Quelques mètres de pavés revus aux couleurs des œuvres de Sonia Delaunay (je choisis au hasard) auraient montré, mieux qu’un long discours, la ville que nous voulons.

Que le génie ait épargné la rive droite est un faible mot. Faire dans ce site unique en Europe la cité des flots bleus, avec comme ligne architecturale, ce qu’on aurait pu concevoir dans les années 80 sur les rives de la midouze à Mont-de-Marsan (là aussi, je choisis au hasard). Le dialogue avec la façade du XVIIIème que les Bordelais appelaient de leurs vœux, en pensant par exemple au Guggenheim de Bilbao ou aux parois de miroir noir des buildings de Houston, tourne court et bien mal. Le XXIème siècle débutant à Bordeaux ne fera pas un gros chapitre dans les histoires de l’architecture urbaine.

Place de la victoire , une colonne napoléonienne attardée dont le rosé s’accorde bien mal au pierres des façades. Place Stalingrad, un lion supposé poster la modernité au seuil de la rive droite ; œuvre sans gaieté dont la couleur glacée a, reconnaissons-le, quelque chose à voir avec Stalingrad et les glaces qui ont emprisonné les chevaux du lac Ladoga. C’est à la suite de ces deux exemples qu’Olivier Besse suggère de poster un chameau place Gambetta, dans l’espoir qu’un jour une oasis, des jeux d’eau et des fontaines, des œuvres colorées ou mobiles viennent trouer cette ville minérale.

Olivier Besse constate, il n’est pas tout à fait isolé dans cette opinion , qu’il manque « un double humain au maire, quelqu’un de majeur sur le terrain du mal être ». Magnifique formule marquée de la patte de Christian Seguin. Je regrette souvent en conseil municipal que tous les textes proposés à nos délibérations soient également empreints de contentement de soi et d’une imperméabilité de béton au moindre questionnement, au moindre doute, sans parler de concevoir même qu’une solution différente puisse exister et mériter d’être écoutée. Ce « quelqu’un de majeur » sur le terrain de l’interrogation et de l’échange est radicalement absent des bancs de la majorité municipale.

Il manque en réalité plusieurs doubles au Maire. C’est sans doute à nous d’en jouer le rôle. Et c’est pour ça que rien n’est perdu.

PS (29)

Le parti socialiste sort grandi de ce premier débat de nos trois candidats. Quelle initiative scabreuse pourtant que d’ouvrir largement les portes d’un débat prioritairement interne, même s’il est en réalité celui du pays. Voilà des prises de parole où chacun a pu s’exprimer sans invective, sans interruption, sans effet de manche inutile. Comme je regrette que cette chance ne nous ait pas été donnée en temps utile pour les municipales de Bordeaux !

Je ne suis pas une donneuse de note. J’apprécie et je l’ai manifesté les positions de Ségolène sur des domaines qui me sont chers. Un des piliers de ma campagne législative (gaussé à droite) a été en novembre 2004 : « le travail, une valeur de gauche ». Nous devons nous battre sur les conditions de travail, et tout faire pour que cette valeur de gauche soit perçue, défendue, partagée comme telle. Nous reparlerons de ces enjeux nationaux.

J’ai mis en titre de ce court billet, les initiales du parti socialiste. Il m’a toujours amusé que ce soit aussi celles des deux mots latins que l’on met comme un repentir en bas des lettres. En réalité, c’est souvent le plus important que l’on dit dans ces post scriptum ! Le nom de notre parti est un des seuls qui a un sens. « Socialiste » est un mot qui a une signification interne, une sorte de noyau intérieur, même si la périphérie de l’atome doit être en permanence redéfinie avec l’évolution du monde. Les suites d’initiales qui se sont succédées pour désigner les partis de droite : MRP, UMP, UDR, RPF, UDF.. ont toujours sonné creux. On ne sait même plus en les alignant où mettre les lettres et peut-être me suis-je trompée et en ai-je oublié quelques uns. Ce soir, le parti socialiste sonnait plein.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel