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Des cerises en été

On n’imagine pas (et on a raison, car c’est limite BCBG), les conseils, tous masculins, qui m’ont été donnés après la publication des « cerises » de Juppé.

Tous masculins, mais pas tous de gauche. L’un ou l’autre député, à l’Assemblée, appartenant, sans fanatisme excessif, au groupe majoritaire, m’a conseillé en termes quelquefois plus directs de démontrer que ces cerises-là n’étaient pas de saison.

La délation n’étant pas mon fort, au contraire du féminisme, je tairai le nom de ces honorables députés où qu’ils soient situés sur les bancs de l’Assemblée.

Le titre de l’ouvrage signé par Alain Juppé reste cependant pour moi une énigme. Ces fruits brillants qui percent aux branches en juin sont synonymes d’été, de plaisir, de cette forme rebondie et sucrée que, de longue date, on associe à un contexte joyeux et festif. Les filles en font des pendants d’oreille, les garçons leur en offrent une poignée en cadeau.

Joyeuses, mais aussi sanglantes, couleur du sang, des attentes et des souffrances du peuple. Le temps des cerises, cet été que tout le monde partage à égalité, c’est aussi celui de la commune de Paris ; celui de cette effervescence du peuple qui n’en peut plus et se révolte, et qui meurt « aux robes pareilles, en gouttes de sang ».

Cela demeure pour moi une interrogation freudienne de voir ce « temps des cerises », cette négation du vrai temps des cerises et de son sens, en couverture d’un livre d’homme politique.

Sigmund, au secours ! Ils n’ont rien compris !

Alice au pays des maternelles

C’est sous ce joli titre que le journal Sud-Ouest a raconté l’ histoire de l’école maternelle de Coutras devenue, grâce à Marie Claire Arnaud, Maire de Coutras, et au choix de l’équipe enseignante « Ecole Alice Delaunay ».

Ma Maman a été une des premières inspectrices, puis inspectrice générale, de l’école maternelle. Elle y a consacré de nombreuses années de sa vie et une de ses (nombreuses) passions a été l’enseignement précoce des langues. Ainsi ai-je pu voir les enfants de l’école maternelle Schweitzer du Grand Parc converser en Allemand avec l’ambassadeur de la république fédérale Sigismund von Braun (frère de l’homme des fusées, Wernher von Braun).

Pionnière d’une école novatrice, elle m’a appris le rôle primordial de l’école maternelle dans l’apprentissage du langage (et même de plusieurs langues !) et des savoirs de base. J’en parle aujourd’hui d’abord pour exprimer, une fois encore, le caractère fondamental de cette école, la spécificité de ses enseignants et leur importance décisive si nous voulons que l’école assure sa mission d’égalité des chances.

Et le gouvernement tente aujourd’hui de remplacer ce fleuron de notre Ecole républicaine et gratuite par des « jardins d’éveil » dont le financement sera à la charge des parents et des communes pouvant en assumer les frais.

L’école maternelle est irremplaçable. Avec les parents, les enseignants, continuons de nous mobiliser.

La politique, c’est pas automatique

La politique, c’est comme les antibiotiques : affaire de sens clinique, de bons sens et de ce flair séculaire des vieux médecins qui mettaient la volonté de guérir des malades à égalité avec la volonté de détruire la maladie des médecins.

Mille analyses peuvent être faites du scrutin européen. Et je peux, avec la même bonne foi, faire l’une ou l’autre. L’Europe quasi entière a voté pour la droite qui est en train, peut-être pas de la détruire, mais de lui enlever son panache, sa séduction et son élan. C’est pour moi une interrogation de la crise qui dépasse le jeu de mots : comment le maroquinier peut-il convaincre le crocodile qu’il est seul à pouvoir sauver sa peau ?

La France, qui s’est mobilisée pour discuter, échanger, s’invectiver au moment du traité constitutionnel est restée aux abris quand il s’est agi de donner à cette Europe un visage désirable. Etrange. Etrange que nous ayons fragilisé ce qu’il y a de beau et de grand dans le projet européen (=l’union de nos pays) et qu’au moment de donner à cette Europe les moyens de rendre désirable, humaniste, solidaire, ce beau et grand visage, les mêmes qui ont voté « non » n’ont pas été voter contre cette majorité qui fait de notre Europe un club berlusconien de nantis sans idéal.

Mille analyses ; et je n’ai aucune intention d’échapper à l’analyse bordelaise. Mauvais résultats pour tous et mauvais résultats d’abord pour nous, le PS. C’est un lien de plus entre la politique et les antibiotiques : on les utilise les uns et l’autre de moins en moins. Dans un cas c’est excellent, dans l’autre, c’est plus qu’une inquiétude, c’est la première marche vers un pouvoir bananio-totalitaire.

L’ump, qui pavoise, doit le faire avec prudence : quand Alain Juppé se rend à la mairie dans sa Prius, écologie oblige, il ne croise malgré cela qu’un Bordelais sur 10 ayant voté pour le parti qu’il a fondé. Quand je vais, comme tout à l’heure de la place Pey Berland à la place de la République, un seul des 20 Bordelais que j’ai croisé a voté pour le Parti Socialiste.

Tout cela ne fait pas grand monde.

J’en prends ma part. Ce n’est pas le Parti Socialiste qui est mauvais, c’est chaque socialiste.

J’ai écouté au Conseil national que le mot était ringard. Il est pour moi une force et je prends d’autant plus volontiers ma part de son affaiblissement du moment.

Oui, je suis entrée à reculons dans cette campagne, blessée de chez blessée que le Député qui incarne l’Europe dans notre région, Gilles Savary, ait été écarté pour cause de jeux de motions et de personnes. Sans doute, aurais-je dû dépasser plus vite cette blessure. Je vous le disais : la politique, c’est pas automatique.

Une chose est essentielle et nous ne l’avons pas compris : ce sont ceux qui ont voté non au référendum constitutionnel qui se sont abstenus. Nous ne sommes pas allés vers eux pour leur dire que le vrai « non », c’était maintenant. C’était changer la majorité commercialo-libérale qui défigure notre Europe, ses idéaux de liberté, d’humanité et de justice.

Nous sommes passés complètement à côté.

Chaque citoyen aujourd’hui, chacun de ces jeunes sans emploi que seule l’Europe (une vraie Europe) peut sauver de la précarité et de la fatalité et qui, pourtant, n’a pas voté doit s’interroger.

La politique, c’est pas automatique, c’est fragile, c’est moitié raison, moitié saison, idée du jour, mode qui passe…

Mais, avant tout, c’est nous et c’est tout de suite.

La secte du temple solaire

Avons-nous pris la mesure de l’évènement de dimanche dernier ?

Sans doute oui, et la souffrance des militants les plus sincères l’a montré. Nous ne savons plus faire envie, nous ne savons plus donner de la force à ceux qui ont besoin en ce moment de l’un et de l’autre. Et même à nos militants. Mais ces militants eux-mêmes doivent savoir qu’ils sont le Parti socialiste et qu’ils doivent eux aussi faire envie, donner de la force, peut être et même surtout quand ils en sont dépourvus.

Vincent Peillon hier, au nom de l’espoir à gauche, a posé comme condition de participation l’organisation de primaires pour choisir notre candidat aux présidentielles. Je n’y suis pas opposée de principe, mais en l’état je ne crois pas que nous devions le poser comme conditionnel. Cela au moins mérite bien six mois avant de statuer. En Italie, Berlusconi n’est-il par revenu à la faveur de semblables primaires ?

Le discours de Martine Aubry, était de qualité, teinté d’une véritable émotion et d’une très réelle sincérité. Un moment d’amusement quand elle a annoncé qu’elle allait engager de grands « forums participatifs » avec les Français. Mais oui à la maison commune de la gauche, oui au relooking de nos idées… et oui au fait qu’on ne fait pas cela en 48 heures mais qu’il faut s’y mettre tout de suite.

Cependant ne fallait-il pas poser le principe d’une idée forte concernant notre Parti et son fonctionnement ?

Pour moi, il y en une. Je ne sais si elle est forte, mais elle est dure : c’est l’abandon du système des motions .

Travaillons de manière thématique : programme santé, programme éducation.. Cinq thêmes forts, cinq propositions phares et quelqu’un pour les incarner. Pas un sérail de beaux parleurs de tout.

Pour ma part, je l’ai dit à Reims : ce congrès était mon premier, mais aussi mon dernier sous cette forme. Je soutiendrai sans doute l’un ou l’autre le moment venu, mais je n’appartiendrai plus à aucune motion, hors Le Parti Socialiste

Les motions ne sont pas des balles dans le pied mais en pleine tempe. Demeurer le Parti des motions, des embuscades et des coups bas, c’est inéluctablement devenir la secte du temple solaire.

Et à vrai dire, ni à titre collectif, ni à titre personnel, j’y tiens pas tellement.

Le Conseil National du PS en direct

Ouverture de la séance, avec une demi-heure de retard, ce qui est relativement raisonnable.

Jean-Christophe Cambadélis, directeur de cette calamiteuse campagne, ouvre la séance. Avec une élégance particulière « perdre une élection quand on est directeur de campagne, ce n’est pas agréable, François Rebsamen sait cela ».
Et de un.

Explication de l’abstentionisme : l’Europe n’était pas au rendez-vous ; nous ne sommes pas tombés d’accord sur une candidature commune et nous n’avons pas été servis par le fait que certains de nos camarades se soient déclarés pour Barroso.

« Je crois que cette défaite, elle vient de loin. Notre réflexe de faire appel au vote utile s’est tari. On peut dire beaucoup sur la campagne (en effet !), mais le problème est plus fondamental. Le parti socialiste a perdu la bataille de l’attrait ».

« Ce n’est pas notre division qui explique la défaite, ce n’est pas les difficultés de l’identité, ce n’est pas la campagne, ce n’est pas la difficulté de planter le drapeau pour réunir la gauche autour de nous, ce sont tous ces éléments ensemble ».

Très brève intervention, très maigres applaudissements et entrée de Martine Aubry.

« Est on capable de retrouver ce que nous avons perdu ». « Ce que nous avons vécu dimanche, peut-être fallait-il cela pour que nous soyons à la hauteur ».

Nous sommes ensemble pour regarder les résultats de dimanche. Rien ne servirait d’en relativiser l’importance. Rien ne servirait de chercher des circonstances extérieures. Ce qui va continuer à se faire demain, c’est le détricotage de tant d’années de combats ouvriers… ».

– Crise de la construction européenne. 26 millions de Français ne se sont pas rendus aux urnes car ils ne croient pas que l’Europe peut changer leur vie.

La responsabilité de la droite est forte, cette droite qui dirige dans 19 pays européens a éloigné l’Europe des peuples. Eh bien les peuples se sont éloignés de l’Europe.

Comment se fait il que cette droite ne défende pas le programme libéral qu’elle a signé. Demain ce sera la santé publique.

– Crise de la social démocratie aussi. Partout la social démocratie a perdu cette élection. 160 députés, la SD a perdu 55 députés. Allemagne, Italie, Espagne, partout le PPE est en tête. Ceux qui étaient censés porter la social démocratie ont pris de la distance par rapport à ses valeurs.

pourquoi les Français n’ont pas voulu nous entendre : -nos pratiques internes, la perte de l’envie de travailler ensemble -nous n’avons pas su renouveler la façon de choisir nos candidats -nous n’avons pas parlé assez d’Europe

mais le vrai sujet est que nous ne sommes plus crédibles comme nous l’étions auparavant.

Nous devons aller ensemble à l’essentiel. Le prochain enjeu ce sont les régionales mais il ne faut pas céder à la tentation de se replier sur nos territoires.

Ce que je vous propose aujourd’hui c’est de reconduire avec vous la refondation de notre parti. Nous ne sortirons pas de cette situation par un replatrage : il faut des idées, un comportement, des discussions avec la gauche.

Refonder nos idées
-remettre en valeur les idées qui sont les nôtres
– la crise nous aide à nous retrouver sur une ligne politique. Personne ne souhaite cette société de la loi du plus fort, du débrouillez vous et tachez de vous accrocher. La vraie question est d’inventer les réponses à la crise d’aujourd’hui

nous sommes aujourd’hui dans l’obligation de nous ouvrir aux Français. Il y a urgence et obligation à entendre ce qui vient de toute part. il faut donner la parole aux Français. C’est un dialogue que nous devons lancer avec les Français dès le mois de septembre.

il faut réfléchir non pas à un n ième diagnostic, mais aux portes d’entrée dans l’avenir.

Je proposerai que nous soyons en capacité de lancer ce débat avec les Français. Voilà une démarche que nous devons porter avec l’ensemble des partis de gauche.

Nous devons refonder la gauche. L’écologie n’entrera en pratique que si la gauche est au pouvoir.

Il nous faut enfin construire une maison commune de la gauche. Nous irons discuter avec la volonté de dire « c’est un projet commun que nous préparons avec les Français ». C’est dans ce cadre-là qu’il faut envisager les primaires et le choix de notre candidat aux présidentielles.

L’ouverture de notre parti doit se faire sur la gauche mais il ne faut pas négliger la gauche européenne et le PSE. Il faut être dedans.

Non, il ne faut pas faire un accord technique pour sauver quelques places et soutenir Barroso. Pour nous, c’est non. La vérité en politique, c’est toujours une extrème nécessité.

Nous avons déserté l’internationale socialiste. Beaucoup de pays ont besoin de nous, parce que dans ces pays la France représente une force. Ségolène Royal a souhaité être notre réprésentante à l’Internationale socialiste et je vous propose de lui confier cette mission.

Troisième refondation, celle de notre parti. Et si chacun se levait ce matin en disant « qu’est ce que je peux apporter au parti et non pas qu’est ce que le parti peut m’apporter ».

Le parti socialiste n’est pas une collection de professions libérales, cherchant une place pour son copain ou pour soi même ».

Il faut changer radicalement de comportements. Un parti n’est pas une collection d’affidés. Il faut arrêter les petites phrases qui nous discréditent ».

Partons ce soir avec l’envie de retrouver l’essentiel. Je ne supporte plus le courrier des camarades qui dénoncent les autres.

Je souhaite mettre en place une gouvernance resserée où nous pouvons tout nous dire.

Inventer une nouvelle forme de militance. Il faut mettre en place une université permanente. Nous allons travailler à mettre en place les nouvelles technologies pour débattre entre nous.

Je vais en terminer en espérant pouvoir annoncer les éléments de cette nouvelle gouvernance. Je l’ai proposé à plusieurs d’entre vous, naturellement, directement, leur exprimant ce que je crois nécessaire au parti de leur part.

Nous allons revoir l’organisation de la Rochelle; dès le lendemain, être prêts à lancer ce grand débat avec les Français. Nous avons six mois pour changer de cap.

Nous devons définir un projet commun pour les régionales que chacun des présidents socialistes adaptera et complétera.

Nous devons dénoncer mais ce qu’attendent les Français, c’est un message positif.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel