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Le Figaro – L’État fait cadeau de 70 millions d’euros aux cigarettiers 20/02/15

INFOGRAPHIE – Le nouveau calcul des taxes bénéficie aux industriels. Certains en ont profité pour essayer de faire baisser le prix du paquet.

Le vote a eu lieu dans l’indifférence quasi générale. «Un vendredi», soupire un parlementaire. Le 5 décembre dernier, les députés ont voté (7 votants!) un amendement modifiant le calcul de la fiscalité des produits du tabac. Grâce à lui, et pour la première fois depuis cinq ans, les paquets de cigarettes n’ont pas augmenté de 30 centimes en janvier de cette année. Mieux, ce nouveau système de taxation va, selon nos informations, entraîner une baisse des rentrées fiscales d’au moins 70 millions d’euros en 2015. Un manque à gagner pour l’État, qui a été calculé dans un document de travail de l’Institut Gustave Roussy-Inserm, réalisé par la chercheuse Catherine Hill du service d’épidémiologie des cancers de l’institut.

Désormais, les cigarettes qui coûtent 6,50 euros les 20 vont être taxées à 64,7 %, au lieu de 65,4 %, et les cigarettes à 7 euros les 20 seront taxées à 63,6 %, au lieu de 64,3 %. Avec l’ancien système de calcul, la hausse des prix pratiqués par les cigarettiers en 2014 aurait dû se traduire mécaniquement au 1er janvier 2015 par une hausse des taxes de 14,4 centimes sur le paquet. Avec le nouvel amendement, la hausse des prix observée en 2014 n’a aucun impact sur les taxes en 2015. Grâce à ce nouveau mode de calcul, qui ne prend plus en compte le prix de vente de l’année précédente, l’industrie du tabac a tenté d’en profiter pour mettre sur le marché des cigarettes à 6,20 € les 20 à partir du 2 mars 2015.

«Avec le mécanisme antérieur, la Sécurité sociale perçoit une partie de la hausse du prix du tabac. Désormais, avec l’amendement, toute hausse profitera essentiellement aux cigarettiers», regretteValérie Rabault, députée PS du Tarn-et-Garonne. Si les fabricants décident d’augmenter les prix de vente, avec le système précédent, la Sécurité sociale perçoit une partie de cette hausse. Une hausse de 20 % fait passer le prix du paquet de cigarettes le plus cher de 7,2 à 8,64 euros. Avec le système précédent, cette hausse de 1,44 euro reviendrait pour 1,15 euro à la Sécurité sociale et pour 0,29 euro aux cigarettiers. Avec le système mis en place grâce à l’amendement, cette hausse de 1,44 d’euro revient pour 0,95 euro à la Sécurité sociale et pour 0,48 euro aux cigarettiers. Donc, le cigarettier récupère 19,5 centimes d’euros de plus par paquet par rapport au système antérieur.

L’amendement a été très contesté avant son adoption en décembre dernier : il a été rejeté en séance, lors du débat budgétaire sur le projet de loi de finances 2015, puis en commission des finances sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014.

L’amendement litigieux a été soutenu par le secrétaire d’État au budget, Christian Eckert. Le 12 décembre dernier, il avait déclaré au Sénat: «Le mécanisme actuellement en vigueur conduirait à augmenter automatiquement le prix du paquet de cigarettes de 20 à 30 centimes. Le gouvernement veut plus de lisibilité. Il vous invite donc à fixer une fiscalité qui ne s’exprime plus en fonction des prix de l’année précédente. Le prix sera fixé en euros, pour mille cigarettes, au lieu du calcul actuel, auquel même un agrégé de mathématiques ne comprend pas grand-chose. Nous vous proposons de fixer strictement le même niveau de fiscalité en 2015 qu’en 2014.» Un cadeau d’abord destiné auxburalistes, mais qui bénéficie aussi au final aux cigarettiers.

Depuis vingt ans, les chercheurs, mais également l’Organisation mondiale de la santé et laBanque mondiale sont unanimes: la hausse du prix du tabac fait baisser sa consommation et agit positivement sur la santé publique. Le président de la République lui-même l’avait pourtant rappelé en février 2014 à l’occasion de son discours du 3e plan cancer: les hausses de prix du tabac restaient le premier levier de lutte contre le tabagisme. Pour preuve, en Corse, où les paquets coûtent en moyenne 25 % moins cher que sur le continent (5,25 euros pour les Marlboro contre 7 euros à Paris), l’agence régionale de santé de Corse observe que les décès par cancer du poumon sont 26 % plus importants (chiffres 2011-2012).

La Revue du Praticien – Janvier 2015 – Edito : « Tabagisme : merci Mme Delaunay ! »

Edito de M. Jean DELEUZE, Rédacteur en Chef de la Revue du Praticien, Janvier 2015

Tabagisme : merci Mme Delaunay !

L’encre de notre éditorial de novembre, dans lequel nous nous félicitions du plan contre le tabagisme de la ministre de la Santé, était à peine sèche que déjà le mois suivant un premier recul intervenait : l’abandon de l’augmentation du prix des cigarettes au 1er janvier 2015.1 Pour comprendre comment a été adopté un amendement si contraire à l’intérêt général, il faut lire le compte-rendu des échanges surréalistes qui ont eu lieu à cette occasion à l’Assemblée.

Dans ce débat, qui peut se lire comme une mauvaise pièce de théâtre, 4 acteurs principaux interviennent : le ministre du Budget, Christian Eckert, la rapporteuse de la commission des Finances, Valérie Rabault, et les députés Razzy Hammadi et Michèle Delaunay, tous socialistes. Le ministre, qui veut geler la fiscalité du tabac, ne cache pas qu’il s’agit « d’une mesure attendue par les buralistes ». Son argumentation est simple : la contrebande frontalière augmente avec les prix – ce qui a entraîné la perte en 2014 de 170 millions d’euros de taxes et de 200 millions en 2015 – si l’augmentation a lieu… La rapporteuse, Valérie Rabault, ne se laisse pas impressionner : la commission des Finances est hostile à l’amendement car, en l’absence d’augmentation, il en résultera surtout « un manque à gagner pour l’État de 316 millions d’euros ». Elle harcèle le ministre qui botte en touche et justifie laborieusement sa position par la nécessité de construire un système fiscal appliqué au tabac plus transparent que l’actuel. Illustrant le proverbe « Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage », il démolit le système actuel par une explication digne du père Ubu, ponctuée de « …voilà ce que j’ai à peu près compris [du système actuel]. C’est extrêmement compliqué ». À ce dialogue de sourds, se superposent les échanges Hammadi/Delaunay.

Le premier, soutien du ministre et qui avait déposé avant, avec 40 autres députés de tous horizons, un amendement visiblement inspiré par le cigarettier Philip Morris pour bloquer la fiscalité du tabac, se défend tout d’abord avec un raisonnement hallucinant : il est normal qu’il se fasse l’écho des buralistes sur ce sujet puisque, pour traiter de sujets liés à la consommation ou à l’environnement, il est en contact avec les associations de défense correspondantes ! (Que le sujet du tabac n’intéresse pas que les buralistes ne l’effleure pas) : « Aussi quand j’entends parler, à l’extérieur de l’hémicycle, de parlementaires sous influence alors que nous ne faisons que défendre nos convictions – je trouve cela proprement inacceptable ! » Le député ira jusqu’à douter de l’effet de l’augmentation des prix sur la consommation et hasardera que cela revient moins cher de prendre un vol low cost aller-retour pour acheter du tabac à l’étranger que de le faire en traversant la rue en France…En face de lui, courageuse Michèle Delaunay qui n’a pas oublié son métier de cancérologue : « Je suis le jouet d’un groupe de pression : celui des malades que j’ai soignés pendant 45 ans! » Inlassablement, elle va revenir dans la discussion pour pointer la mauvaise foi et les contradictions de ses interlocuteurs et faire ses propres propositions, toutes rejetées. Elle a été l’honneur des politiques dans ce débat. Quant à l’opposition, si on a bien compris, elle dormait,mais alors très profondément…

Sud Ouest – 23.01.15 – L’esprit du 11 janvier

Michèle Delaunay présentait hier ses vœux aux Bordelais. Un discours très Charlie….

 

L’esprit du 11 janvierMichèle Delaunay, hier soir, pour ses vœux 2015.© PHOTO 

 

PHOTO QUENTIN SALINIER
Pour ses vœux 2015 prononcés hier soir à la Maison du combattant, devant environ 200 personnes, dont certains de ses collègues socialistes au Conseil municipal, Michèle Delaunay a tenu à distribuer la parole à l’assistance.

« Parce que, dit-elle, les événements de ce début d’année ont montré à quel point les Français avaient envie d’être ensemble et de se parler. » Référence bien sûr à la journée historique du 11 janvier, où, par millions, hommes et femmes ont tranquillement défilé pour défendre la liberté et les valeurs de la République.

« Il ne faut pas avoir peur d’apparaître ringard pour défendre ces valeurs », a poursuivi la députée socialiste de Gironde, qui a néanmoins regretté la trop faible participation de ceux qu’on appelle les habitants des cités. L’élue bordelaise n’a pas non plus caché qu’entendre dire du bien de François Hollande l’avait réjouie. Il est vrai, reconnaît-elle, que cela fait longtemps que ce n’est pas arrivé et elle s’amuse d’entendre ses collègues de l’opposition à l’Assemblée nationale commencer leurs interventions par « Ma question n’est pas polémique, mais… »

Si elle ne se fait pas trop d’illusions sur la pérennité de cette union nationale déclenchée malgré eux par les terroristes, Michèle Delaunay gardera en mémoire cette image de milliers de Bordelais autour de la colonne des Girondins.

Mais son travail de députée a repris. Elle compte d’abord se battre en faveur de la laïcité qui, dit-elle, « n’est pas la négation des religions », et sur un combat qui lui est cher : la lutte anti-tabac. Celui-ci tue 73 000 Français et 700 000 Européens par an.

08/01/15 – Aquisuds – La transition démographique

Députée PS de la Gironde et ancienne ministre du gouvernement Ayrault, Michèle Delaunay revient sur le sens de la transition démographique.

Interview réalisée par Aquisuds

Aquisuds : Comment définir la transition démographique ?

Delaunay : En parallèle à la transition énergétique et à la transition écologique, il y a aussi la transition démographique, qui s’impose sous l’effet de plusieurs constats : 30% de la population a plus de 60 ans ; l’espérance moyenne de vie, à partir de la retraite, est de 30 ans. Le nombre des grands âgés (85 ans et plus) est en constante augmentation mais il s’accompagne aussi d’un accroissement de personnes atteintes d’Alzheimer, de démence ou en état de dépendance. Tout cela implique une véritable gestion politique et sociétale de ces phénomènes, c’est-à-dire la mise en place d’une transition démographique. Il faut anticiper cette transition, afin de rendre le vieillissement moins douloureux, moins dangereux et moins coûteux.

Quelles sont les mesures envisagées pour faire face à la transition démographique ?

Citons quelques unes : Il faut envisager de retarder le départ en retraite, en tenant compte de la pénibilité des métiers. On doit aussi lutter contre l’isolement des personnes âgées, en favorisant des actions de solidarité entre les générations. Pour ce qui est du logement, il faut qu’il soit un élément de l’autonomie de la personne âgée, par sa situation géographique, son adaptation et son aménagement. Cette autonomie se construit aussi avec l’utilisation de véhicules électriques autres que la voiture.

                                 « Jeunes Âgés » et « Grands Âgés »

Quand on parle de personnes âgées, de quel âge parle-t-on ?

Il faut distinguer les « Jeunes âgés », de 60 à 80 ans, des « Grands âgés », dont l’âge va de 80 à 110 ans. Aujourd’hui il y a environ 25 000 centenaires en France. C’est une forme d’exploit biologique qui se généralise de plus en plus. Dans les maisons de retraite, on trouve principalement les Grands âgés. Une grande partie vit chez eux, en meilleure forme qu’autrefois. Il y a donc deux générations de retraités. Les Jeunes âgés qui sont les plus nombreux constituent les partenaires importants dans la politique de cohésion sociale. Les Grands âgés, qui sont les plus fragilisés par la perte d’autonomie. Ils méritent davantage l’effort de solidarité nationale.

                                             Le prix du grand âge

Les personnes âgées coûtent-elles cher à la société ?

Il y a une augmentation des personnes âgées et de leur durée de vie, donc les maladies chroniques coûtent plus cher, sans oublier que des maladies qui tuaient rapidement autrefois sont devenues aujourd’hui des maladies chroniques. Avec l’allongement de la durée de vie, la mort survient beaucoup plus tard aujourd’hui, après un long temps de bonne forme relative et une période de 2 à 10 ans de perte d’autonomie. Cette période est très coûteuse pour la société. Pour nos sociétés actuelles, cette non-mort des personnes âgées dépendantes devient plus gênante que leur mort. Le nombre et le coût des soins palliatifs ont augmenté. Il faut donc une politique de prévention beaucoup plus énergique.

Si les personnes âgées coûtent cher, est-ce qu’elles ne suscitent pas aussi une certaine dynamique économique ?

En effet, il y a plusieurs secteurs d’activité économique autour des personnes âgées. Citons le domaine de la domotique, du numérique et des objets connectés. Il faut rappeler également le tourisme culturel et celui du bien-être. L’impact du vieillissement s’exerce aussi sur les achats, notamment de produits simples et solides qu’on n’a pas à changer. Parallèlement à ces secteurs, un nouveau domaine se développe : celui des services à la personne, qui recrute de plus en plus, et est donc créateur d’emplois. Je me suis battue, entre autres aux cotés de Marie-Arlette Carloty, pour le lancement du  Plan EDEC, c’est-à-dire : Engagement pour le Développement de l’Emploi et des Compétences autonomie, avec la signature de Michel Sapin, prévue pour le 27 mars 1914. Il sera présenté le 9 avril au Conseil des Ministres. Ce Plan contient trois volets principaux : il favorise le développement des métiers de l’autonomie, il contribue à la création d’emplois dans ce domaine, il vise à la professionnalisation des travailleurs de ce secteur, afin d’éviter la précarité des gens qui y travaillent.

                Un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle

L’écrivain et philosophe africain Amadou Hampaté Ba disait qu’en Afrique « un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ». N’y a-t-il pas ici aussi un précieux capital d’expérience et de connaissances chez les personnes âgées en France ?

Nous avons pris conscience de cela, et de la nécessité de capitaliser ces connaissances. C’est pour cela que nous favorisons des ateliers-mémoire mais également un travail pour recueillir les souvenirs de personnes âgées, notamment, pour reconstituer la mémoire d’un quartier, comme cela a été fait pour le quartier du Grand Parc à Bordeaux.

En ce qui concerne les personnes âgées, le cadre de vie est-il le même et a-t-il le même résultat dans les populations locales et dans les populations migrantes ?

Chez les migrants, on constate moins de problèmes d’Alzheimer, du fait que les personnes âgées restent plus longtemps dans leur famille et qu’ils bénéficient davantage de la solidarité familiale. Dans le cas des Marocains par exemple, le poids du clan familial est très présent et assure un rôle protecteur de la personne âgée.

                          Le bon et le mauvais communautarisme

Ce constat ne devrait-il pas nous amener à voir autrement le communautarisme qui est perçu comme un épouvantail de la part des élites politiques de droite et de gauche ?

Le communautarisme a plusieurs sens. Il faut distinguer un communautarisme qui est une sorte de repli sur soi d’un groupe, pour la défense d’avantages. En ce sens on peut parler de  communautarisme breton, africain, ou musulman, et autres. Ce type de communautarisme mène à l’intégrisme politique ou religieux. Il faut le distinguer d’une communauté familiale qui maintient des liens de solidarité entre ses membres. Pour ce qui est des communautarismes régionaux, il convient de rappeler que les Régions sont aussi des entités économiques intégrées dans un ensemble national.

Les 3 A de La loi d’adaptation au vieillissement : Anticiper, Adapter, Accompagner

Vous avez élaboré une loi d’adaptation au vieillissement, qui a été votée à l’Assemblée Nationale. Pouvez-vous nous en parler ?

Nous partons d’un constat : les plus de 60 ans sont au nombre de 15 millions aujourd’hui ; ils seront 19 millions en 2025. Il faut donc s’adapter à ce vieillissement de la population et développer une culture de l’autonomie. Il s’agit d’un projet de loi adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, par une large majorité (302 voix contre 181) le 17 septembre 2014. C’est une loi importante qui contient une centaine de mesures. Elle repose sur trois piliers qui en constituent le triple A : Anticipation, Adaptation, Accompagnement. Il faut anticiper la perte d’autonomie des personnes âgées, adapter les politiques publiques au vieillissement de la population et accompagner leur prise en charge. La lutte contre l’isolement prend forme dans le projet MONALISA, c’est-à-dire : la Mobilisation Nationale contre L’Isolement Social des âgés. Le projet de loi tient compte de l’adaptation du logement des gens âgés et du transport les concernant. Il clarifie le fonctionnement des Etablissements d’Hébergement des Personnes Âgées  Dépendantes, ou EPHAD. Le projet de loi inclut une revalorisation de 15 à 60 % de l’Allocation personnalisée aux Personnes Âgées (APA) ainsi que l’accès aux technologies de l’autonomie. L’une des mesures phare de ce projet consiste à faciliter l’acquisition de la nationalité française pour les immigrés âgés de 65 ans  au moins, résidant en France depuis 25 ans et qui ont un enfant français. Rappelons que l’UMP a voté contre cette mesure. Par ailleurs cette loi propose aussi de professionnaliser les aidants qui s’occupent des personnes âgées. La loi que je résume ici sera appliquée dans l’Outre-Mer et fera l’objet d’un rapport d’évaluation entre septembre 2016 et septembre 2017.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel