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Tabac : l’urgence de la possibilité de l’action de groupe

Ententes illicites sur les prix, tromperies sur la teneur en goudrons et en nicotine des cigarettes, absence de tout avertissement sur le risque d’addiction…  Quand le couperet de l’action de groupe s’abattra-t-il sur les méfaits des cigarettiers ?

J’ai soutenu cette possibilité d’action de groupe pour les victimes du tabac à plusieurs reprises à l’Assemblée, quelquefois écoutée d’une oreille attentive mais, au final, toujours avec la même réponse : en droit français, c’est trop difficile, cela créerait des difficultés et bla et bla..
Difficile c’est vrai, j’ai consulté des juristes-experts* , ils ont vu là des obstacles à écarter, mais justement la loi est faite pour cela. C’est bien la volonté qui manque.

Aux Etats-Unis et au Canada, les « class actions » ont amené à des amendes de plusieurs milliards pour l’industrie du tabac. C’est à partir de ces chiffres que les cigarettiers commencent à regarder, au-dessous les profits l’emportent de beaucoup. Même outre-Atlantique, les procédures sont longues, souvent des années, mais le résultat est là : les pays anglo-saxons sont très en avance sur nous dans la lutte contre le tabagisme.

Le dernier scandale qui vient d’être porté au jour en France par une plainte du @CNCT , celui de la tromperie sur la teneur réelle en goudrons et nicotine, a été révélé en réalité par les cigarettiers eux-mêmes : une marque en a accusé une autre de mensonge sur les capacités de ses filtres. Sauf que.. Le mensonge était général et que les tests, effectués par des « machines-fumeuses »,  se sont révélés truqués puisqu’ils ne rendaient compte que de la capacité des filtres à réduire la teneur absorbée au travers de dispositifs n’exerçant  aucune pression sur la cigarette, comme le font les lèvres et les doigts. Résultat : vous croyez fumer un paquet, vous en fumez dix..  La tromperie relève de la même logique que celle du « dieselgate ».

Espérons que les conséquences seront au minimum les mêmes : de considérables amendes et, plus encore, une dévalorisation de l’industrie du tabac capable d’amener à des politiques coordonnées entre les pays et, en particulier, à la reconnaissance pour les victimes du tabac d’en appeler au secours de la justice.

 

*en particulier Pierre Kopp, juriste et expert international, qui est l’avocat du @cnct (Comité National contre le Tabac) dans la plaine en cours

 

Sans cravate, sans culotte ou… sans pantalon ?

Jean Luc Mélenchon a fait le buzz plusieurs jours durant en déclarant que désormais les « sans cravate » seraient à l’Assemblée les dignes successeurs des « sans culotte ».

Moins révolutionnaire peut-être, mais plus spirituelle, Michèle Alliot Marie avait en son temps installé une petite révolution à l’Assemblée, dont les effets perdurent aujourd’hui dans un consensus général et pacifique.

L’interdiction du pantalon pour les femmes au sein de l’hémicycle n’a été levée que très récemment, alors même d’ailleurs que l’usage de ce vêtement était largement installé. La pionnière fut la Ministre biarrote à l’occasion de son premier portefeuille ministériel. Elle était alors une belle jeune femme très regardée et elle usait volontiers de ce privilège. Elle s’aventure ainsi un jour vers la tribune où elle allait s’exprimer dans un élégant tailleur pantalon…

Elle approchait des premières marches, qu’un huissier s’approche d’elle :

-« Madame la Ministre, puis-je vous rappeler que le pantalon est interdit dans cette enceinte … »

Michèle Alliot-Marie se retourne aussitôt vers ses collègues et lance, à très haute voix pour que chacun l’entende :

– « Qu’à cela ne tienne, Monsieur l’huissier, voulez-vous que je l’enlève ?  »

Rires étouffés mais généraux : le pantalon féminin avait fait son entrée dans la chambre haute … Il y demeure et pour ma part, je préfère cette façon de faire la révolution, à celle, péremptoire, du tribun Mélenchon..

 

Farewell, Laurent

Moment d’émotion à l’Assemblée ce 10 février pour la dernière intervention de Laurent Fabius dans cette belle et noble maison «cœur battant de la démocratie », comme il l’a si justement exprimé. Il se souvenait sans doute à cet instant de son discours de politique générale, en sa qualité de tout jeune premier Ministre – il avait 37 ans-.

Homme de grande stature politique, presque le seul à être écouté en silence sur les bancs de gauche comme de droite  quand il prend la parole, et dont aucun mot, aucune phrase n’ont jamais pu paraître une maladresse ou une approximation, « Laurent » incarne depuis près de quatre ans la Diplomatie, comme Juppé incarnait l’impôt. Après l’élection de Hollande à la plus haute fonction de l’Etat (à laquelle il aurait pu prétendre) , il s’est coulé naturellement dans l’habit de Grand Ministre de la France dans le monde sans faire d’ombre à son Président, ni paraître à aucun moment en retrait. Subtile alchimie, impensable quelques dix ou quinze ans plus tôt et preuve que, finalement, l’intelligence est bien utile.

En Conseil des Ministres, où selon la règle le Ministre des affaires étrangères s’exprime le Premier après le Président, l’humour très fin de l’un et l’autre ajoutait jusque dans les circonstances les plus difficiles une touche de complicité qui a fini de me convaincre que l’intelligence, est non seulement un bon outil comme dit plus haut, mais qu’elle est d’une séduction infinie.

Comme Laurent lui même , en l’écoutant pour la dernière fois probablement, parler dans l’hémicycle, je me suis souvenue de ce discours de politique générale qui m’avait obligé à garer ma 2 chevaux sur le bas côté du boulevard Leclerc , chemin obligé entre l’hôpital Xavier Arnozan et l’hôpital Pellegrin de Bordeaux. La clarté de la parole, la fierté sans emphase de l’orateur, m’avaient frappée. Je ne savais pas alors très bien ce qu’était le discours de politique générale d’un nouveau Premier Ministre. Je l’ai appris d’un coup, en même temps que m’était démontrée la force de la parole et sa spécificité (comme le style d’un écrivain, rien n’est plus personnel que la parole d’un politique). L’admiration un peu distante -comme il est lui même-  que j’ai à son égard ne s’est aucunement démentie depuis lors.

Les épreuves n’ont pas été ménagées à Laurent Fabius. Trente et un ans se sont écoulés entre ce discours de politique générale et celui, également remarquable, prononcé au titre de Président de la COP21. Laurent n’a pas « changé », comme le prétendent tant d’hommes politiques qui en sont incapables. Il a évolué, comme un vin de grand cépage, un de ces indéfinissables crus qui se fondent par leur savoureuse complexité à l’histoire de leur terre, et dans ce cas, de leur pays.

Il est aujourd’hui en garde de notre constitution. Cher Laurent, protégez-la en même temps que vous lui permettrez d’évoluer. Le gardien n’est pas celui qui enferme mais celui qui accompagne le pas.

 

Olivier : la lourde tâche de montrer que la politique ne rend pas fou

Olivier Veran, suppléant de Geneviève Fioraso, rapporteur de la loi santé, retourne à l’hôpital après le retour annoncé à l’Assemblée de Geneviève Fioraso qui quitte ses fonctions ministérielles pour cause de santé. Le raccourci de ce seul mot « santé » ne manque pas d’intérêt.

Tous les deux, Geneviève et Olivier sont mes amis,  à des niveaux différents, je connais Geneviève depuis 2007 (elle fut élue avec moi dans la même promotion de députés), Olivier seulement depuis une visite en Isère alors que j’étais Ministre et lui tout jeune député, praticien des hôpitaux en disponibilité du fait de la nomination ministérielle de « sa » députée.

Nous n’avons tous les trois que des raisons de nous comprendre sans mot dire. La santé -ou son masque sombre, la maladie- nous réunit.

Quand à la fin d’une question d’actualité, il y a quelques jours, Olivier Veran a interrogé la Ministre @MarisolTouraine sur la loi « santé », rebaptisée in extremis « loi de modernisation du système de santé » et annoncé son départ (une première: aucun suppléant de Ministre ne l’avait fait jusqu’alors), j’ai été la première à me lever dans l’hémicycle pour susciter une « standing ovation » en direction de mon jeune confrère et de son travail.

Le voici aujourd’hui en charge d’une lourde tâche, lourde mais majeure : démontrer qu’on peut retourner à la vie réelle après trois ans d’imprégnation par la vie parlementaire et ministérielle, la renommée plus ou moins grande qui vient avec elle et aussi l’impression de « pouvoir quelque chose » au niveau national ; ce « quelque chose » fût-il bien moindre que le Pouvoir médical qui, chaque jour, décide du vécu et quelquefois de la survie de personnes individuelles qu’il marque définitivement ainsi que leur famille.

On l’a compris : le Pouvoir médical me paraît d’un autre ordre que le pouvoir politique, du moins à l’échelon où un parlementaire, voire un ministre, l’exerce. Cet ordre, au sens pascalien, penche infiniment en faveur du médecin. Il s’en éloigne au contraire, s’il s’agit de notoriété médiatique, d’écume des jours, et quelquefois de durabilité. La loi Evin est toujours présente dans nos vies, comme la loi Veil, elles ne sont pas si nombreuses à le faire. Inutile de dire que j’aurais voulu que la « loi de transition démographique » fût de celles-là. Je n’en ai eu ni le temps (l’acte II de cette loi n’aura pas lieu), ni la liberté de la faire accepter et connaître en tant que telle : un bouleversement sociétal et social.

Olivier va (probablement) retourner à l’hôpital, comme je l’aurais fait, si ma courte victoire de 2007 en face d’Alain Juppé avait basculé en sens contraire. Dès le lendemain, j’aurais retrouvé la redoutable suite d’obligations intangibles de la vie hospitalière : l’heure des visites et des contre-visites, l’examen des scanners avant l’annonce de leurs résultats aux patients, les horaires de consultations, que même grippé, fiévreux, en deuil ou pas loin de l’être, on doit assumer parce qu’une vingtaine de personnes inquiètes venant de plusieurs dizaines ou centaines de kilomètres vont s’y présenter. Tout cela dans cette sorte de faux anonymat du médecin hospitalier : rares sont ceux que les médias connaissent, très nombreux sont ceux que les malades et leurs familles n’oublient jamais.

Olivier, si tu retournes à l’hôpital, tu vas retrouver cet extraordinaire abîme : on te parlera avec respect à l’hôpital quand on te vilipende facilement dans ta fonction de député, tu regretteras cette ouverture sur le monde et sa diversité, cette possibilité de se forger un avis sur tout que donne la politique, mais tu renoueras des liens souvent tacites mais éternels avec des patients de tous milieux, degrés de culture et de fortune, qui t’accorderont leur confiance au premier regard, au premier sourire (et les tiens, cordiaux et ouverts,  y incitent) avec lesquels tu les accueilleras dans ton grand hôpital.

Tu reviendras en politique, j’en suis sûre.  Et avec cette force particulière de connaître les multiples et changeants visages de la réalité. « Il n’y a qu’une vérité, disait Kafka, mais elle a un visage changeant ». « Changeant » est une mauvaise traduction, mais tous l’utilisent. Kafka disait « lebendig », »vivant ». Le visage de la vie.

 

 

 

La loi vieillissement à l’Assemblée

La loi d’adaptation de la société du vieillissement que j’ai eu l’honneur d’élaborer a été présentée à l’Assemblée les 9-10 et 11 septembre dans un climat relativement consensuel. J’en ai appelé en introduction (discussion générale le 9) à un vote unanime, que les Français d’ailleurs attendent sur ce sujet situé au coeur de l’humain.

Un regret : le débat est presque totalement passé à côté de l’enjeu de la transition démographique. 40 ans de retard qui risquent de se prolonger.

Voir les infos sur ce temps de débat en page « Assemblée Nationale » et sur twitter sur @ageautonomie

 

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel