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La santé, marqueur d’inégalité sociale

Une confirmation, une de plus, d’un thême qui nous occupe beaucoup sur ce blog. La santé, ce que j’appelle bien souvent « l’état de la machine », est de plus en plus un marqueur d’inégalité sociale. On pouvait espérer autre chose après des décennies tout à la fois de luttes sociales et de progrès médicaux.

Une étude conjointe de l’Inserm et des instituts de santé et de veille sanitaire démontre sur un « échantillon représentatif » de 1042 collégiens et lycéens du Val de Marne que les jeunes ne sont pas égaux face à l’obésité et que l’écart s’accentue régulièrement entre pauvres et riches : la prévalence du surpoids augmente chez les uns, diminue chez les autres. C’est d’abord cette aggravation des faits que l’on doit retenir. Dans une société avancée, ce recul sur des sujets si décisifs doit nous mobiliser.

En chiffres, car j’aime bien que ce blog donne des éléments précis auxquel on puisse se référer.

Le département du Val de Marne est engagé depuis 2001 dans un programme de prévention de l’obésité . Grâce à cela, la prévalence du surpoids est restée stable chez les jeunes : 17% des adolescents en excès de poids, 3,1 % d’obèses. Remarquons que globalement dans notre pays, les chiffres montent, le programme de prévention n’est donc pas inutile.

Pas inutile, mais très différemment : le surpoids a considérablement augmenté chez les enfants d’ouvriers, passant de 16,4% à 31,1% , alors qu’il a diminué chez ceux dont les parents occupent une profession intermédiaire (de 19,1% à 10,9%) ; en clair : trois fois plus d’enfants trop gros chez les enfants de milieux modestes !

L’origine géographique du père aggrave les différences : le surpoids passe de 18 à 30,1% si le père est originaire du Maghreb, ou d’un pays non européen ou africain (13,1 à 23,3%)

Le type de quartier joue un rôle et le surpoids concerne 1/4 des jeunes des cités (dont 6,3% d’obèses) contre 11% de ceux qui habitent dans des quartiers pavillonnaires.

Un chiffre encore, lié au surpoids : 69% des jeunes disposent d’un écran dans leur chambre (télé, ordinateur ou console de jeux). Ce chiffre atteint 75% pour les enfants d’ouvriers.

Il est urgentissime que nous prenions ces données à bras le corps, dans toutes leurs implications. Causes et conséquences. Pour ces dernières, mesurons combien un enfant obèse perd en capacité d’épanouissement scolaire, social et sportif ; perd en estime de soi et en ardeur à être ; et se sentira avec l’augmentation des chiffres que l’on vient d’examiner, ce plus en plus en état de ségrégation.

Plus c’est gros.. (5)

Pour quelques décisions positives, pour quelques évolutions favorables (le tabac, la peine de mort..), combien de fausses routes, de mauvais choix qui sont comme des pas en avant vers cette « aberration durable » où s’installe notre société ?

Un exemple, un exemple de plus, de ceux qui me gâtent l’humeur pour un bon moment : l’ouverture de la publicité télévisée à la grande distribution.

Hier au forum participatif de la Bastide, nous avons regretté que les référentiels de prix soient maintenant dictés par la grande distribution. Qui y trouve bien évidemment son compte, car pour un produit étiqueté « le moins cher », une « gondole » entière de produits inutiles, médiocres ou coûteux sont proposés autour de lui. Les participants du forum ont souligné la nécessité de prix conventionnés (par l’Etat) pour les produits de première nécessité, y compris ceux de nécessité sociale (pouvoir prendre un crême dans un café, dans n’importe quel quartier..).

La décision d’ouvrir la publicité télévisée aux grandes enseignes alimentaires a, exclusivement, des effets délétères

– cette publicité est très coûteuse, et c’est bien sûr le consommateur qui la payera (pour le seul mois de janvier intermarché a investi 4,3 millions d’euros, Auchan 3,6 et Leclerc 3,4)

– la forte audience de la tévision, et l’impact de cette publicité, vont renforcer la position dominante de la grande distribution. Que l’on ne prétende pas ensuite soutenir le petit commerce, les commerçants bio, les petits producteurs ..

– les distributeurs s’adressent d’abord aux chaines commerciales à forte audience, et cela renforce naturellement la position de TF1 qui a d’ores et déjà engrangé 52,6% des parts de marché. Quant on connait l’engagement culturel et éducatif de TF1, c’est incontestablement le bon choix de renforcer sa position.

– l’effet « produit phare » est accentué : Carrefour vante ses couches, Système U ses steaks, qui seront bien évidemment entourés de mille autres produits inutiles dont le consommateur repartira chargé

– la presse quotidienne, qui n’a pas réellement besoin de cela, est lourdement pénalisée et dès janvier a connu une réduction des investissements publicitaires de la grande distribution (part importante de ses ressouces) (réduction de 50% pour la presse nationale et de 28% pour la presse régionale).

J’ai parlé d’effets exclusivement délétères. C’est faux. Ce formidable cadeau fait par le gouvernement aux chaînes de télévision quand s’ouvre une période de campagne électorale de 18 mois n’est pas délétère pour tout le monde.

C’est tellement gros, tellement méprisant de l’intérêt public au profit de l’intérêt particulier, qu’on voudrait avoir une possibilité d’action immédiate. Et nous en avons une en réalité : c’est notre bulletin de vote.

Le travail : à Taniwha et quelques autres, dont moi

J’ai été à plusieurs reprises interpellée sur le travail « Quoi, vous en parlez tout le temps, n’y a-t-il pas autre chose dans la vie ? »

Je résume comme il me vient à l’esprit : le sens est « pourquoi mettre le travail au cœur de nos sociétés, n’est-il pas temps de passer à autre chose ? »

« Vaste sujet.. » aurait dit le général de Gaulle. Sujet fondamental pour moi, qui m’est chevillé au corps et à l’esprit sans que j’aie toujours pris le temps d’en mettre en forme les raisons. Donc, pourquoi j’aime plutôt le travail (encore que je sois tout aussi paresseuse que la moyenne, mais passons…) et pourquoi je crois qu’il est une pierre angulaire d’une société qui marche. Et ajoutons : d’un système éducatif en mal de sens.

Les raisons qui me viennent se situent à des niveaux très différents. Débarrassons-nous, si l’on peut dire, de celles que l’on peut qualifier de philosophiques. Elles sont en réalité très simples et tout un chacun en a fait l’expérience, peut-être les femmes encore plus que les hommes, je ne sais pas. Une amie un jour m’a frappée en me disant : « Je suis de celles qui, quand elles sont angoissées la nuit, vont nettoyer à fond sous l’évier ». Dit plus savamment, je crois que la condition de l’homme est fondamentalement source de ce mélange anxiété-dépression qui nous accompagne journée après journée comme un gros chien encombrant.

Il y a sûrement d’autres moyens de tenir le gros chien dans son rôle d’animal de compagnie, de ne pas le laisser prendre toute la place, mais le moyen le plus humain, c’est de faire quelque chose. On choisira le mot qu’on veut : agir, réaliser, se bouger… C’est vrai à l’échelon d’un moment d’inquiétude, c’est vrai à l’échelon d’une vie. Oui, globalement, je crois qu’il vaut mieux nettoyer sous l’évier que prendre du hasch ou tout simplement rester à broyer du noir dans son coin.

La deuxième raison est en lien direct avec la société et on ne l’explique jamais, en particulier aux enfants. Je me permets une parenthèse, qui est très importante pour moi : dans une lettre de ma mère à une dame qui lui demandait des conseils d’éducation pour son jeune enfant, j’ai trouvé au premier rang de quelques avis simples : « Ne lui présentez jamais le travail comme quelque chose de négatif. Même en rentrant d’une lourde journée, ne dites jamais que vous avez assez… ».

Ceci seulement pour introduire ma deuxième raison : le travail est notre contribution réciproque à la société. Et pour cela, il est fondamentalement positif. Etre soigné, recevoir du courrier, avoir de l’électricité, tout cela dépend du travail de l’un ou de l’autre . Et moi, qu’ est-ce que j’apporte ? Et pourquoi ne pas essayer de le faire le moins mal possible ?

Tout cela est élémentaire, mais je crois que nous avons fondamentalement perdu le sens de notre interdépendance, de l’équilibre nécessaire entre donner et prendre, entre contribuer et bénéficier.

Je me souviens d’une phrase anodine du film « La femme du boulanger » : « Puisque tu me donnes de ta boulange, je te donnerai de ma chasse.» Mon couvreur répare mon toit, je suis bien contente de soigner sa fille …

La troisième raison, c’est que le travail, c’est la construction de l’être. Je dois avoir dit déjà plusieurs fois dans ce blog que le thème de ma campagne législative en 2004 était « le travail, une valeur de gauche ». C’est le travail et encore le travail qui fait que nous avons quelque chose dans la tête (rien n’y rentre tout seul), que nous savons exercer des activités, réaliser des gestes qui nous rendent contents et qui font partie de nous (Taniwha, un de mes contradicteurs anti-travail, est un sportif parce qu’il a travaillé, c’est tout, pas parce qu’il a regardé le sport à la télé !) ; c’est le travail et encore le travail qui a permis où que ce soit dans le monde aux petits, aux modestes de « s’en sortir » ; c’est le travail qui a permis l’émancipation des femmes, et combien elles ont bossé (et combien elles bossent) pour cela !

Apprendre, quel bonheur ! Qui a le courage de le dire ? Qui dit aux gamins qui rament sur leurs devoirs : « Quelle chance tu as de savoir à ton âge faire des équations du deuxième degré, d’accéder à ce drôle de monde des mathématiques qui a permis d’aller se promener sur la lune ! »

Ai-je besoin d’exprimer la quatrième raison : le travail, c’est le lien social. Une des phrases que je rabâche c’est : « Le logement c’est notre place sur cette terre, le travail, c’est notre place dans la société » .

J’entends déjà toutes les contestations à ces beaux discours, et en particulier la plus importante : « A quoi ça sert d’apprendre aux enfants à travailler et même de leur en donner le goût puisque le travail ne les met plus à l’abri du chômage ? »

C’est vrai ; une réponse un peu dure tout d’abord : le travail ne met pas à l’abri du chômage mais le non travail le garantit. Avoir le goût de travailler et de se bouger est une arme incroyable pour la vie. Je dirais même que c’est la première.

Une deuxième contestation tombe aussitôt, plus dure encore : comment un enfant peut apprendre à travailler et à aimer travailler quand ses deux parents sont au chômage et à la dérive ?

Je sais tout ça, mais je m’accroche. Bien sûr, il me semble que j’arriverais à montrer à ce petit loulou qu’il est très bon dans une matière, qu’il a des facilités, que j’essaierais de lui donner l’estime de soi et le désir. Pour ça, il faut des enseignants dont on met le travail en valeur. Toujours pareil.

La société a besoin de changer de valeurs et de pratiques. Une de ces valeurs est le travail, et non l’argent. François Hollande a dit, je crois : « Je n’aime pas les riches ». Pour ma part, je n’aime pas les riches qui ne vivent pas de leur travail et au niveau de leur travail. Le pouvoir de l’argent, cette espèce de respect et de révérence imbécile qu’il entraîne partout (là encore, parce que c’est l’exemple le plus facile : les émissions sur le plus riche, l’hôtel le plus cher, la bouteille de vin la plus coûteuse), tout cela est générateur d’un incroyable malaise.

Comment en effet faire aimer le travail à un petit employé si une paire de chaussures de Berlutti représente deux mois de son salaire ou si son PDG gagne 500 fois plus que lui. Rien n’a dévalorisé autant le travail que ce hiatus. Je crois que Nicolas Sarkozy devrait réfléchir à cette idée simple avant de dire sans se poser d’interrogation : « Il faut qu’on puisse travailler plus pour gagner plus ». Mais il faut d’abord que le revenu du travail ne soit pas complètement dévalorisé. Et que, tout simplement, les gens soient estimés pour ce qu’ils font, pas seulement pour ce qu’ils gagnent ou ce qu’ils possèdent.

Plein d’autres contestations. « Comment une caissière qui travaille deux heures le matin et deux heures le soir, avec deux heures de transport pour aller chez elle, peut-elle croire, je dis bien croire, au travail ? » C’est une évidence et nous devons nous interroger (je parle de la gauche) : nous ne nous sommes pas assez battus sur les conditions de travail, au moins aussi importantes que le temps de travail. Je crois que nous ne savons pas encore parler simplement et positivement du travail.

J’ai essayé.

« La seconde mort de la peine de mort » (3)

Sous ce titre qui, au premier abord a l’air plutôt sinistre et que j’emprunte au journal « Le Monde », des nouvelles que l’on peut considérer comme assez favorables. Ce n’est pas, par les temps qui courent, denrée si abondante que l’on doive s’en priver !

Premier élément, à la fois secondaire et significatif, Jacques Chirac veut que l’on porte au crédit de ses maigres mandats l’inscription de l’abolition dans le marbre constitutionnel. Au passage, saluons la belle carrière de l’expression « graver dans le marbre » que l’on entend sur toutes les ondes depuis le débat constitutionnel européen. Les graveurs de marbre, résignés à ne plus graver depuis longtemps que le nom des défunts et leurs dates doivent se réjouir …

C’était une digression, ne m’en veuillez pas. Je suis très, et sans doute trop, sensible aux évolutions de la langue, à tout ce qu’elle livre d’inconscient à la fois pour les personnes et pour les sociétés ; je ne résiste pas toujours à les noter.

Je reviens à mon sujet : Jacques Chirac ne désirerait pas graver cette inscription dans le texte de la constitution si l’opinion publique n’avait pas évolué. Et c’est ça la bonne nouvelle : l’évolution des mentalités. Soyons prudents : il suffirait d’un crime atroce pour que l’opinion se retourne. Mais actuellement, et au contraire de la période où Badinter a plaidé et où Mitterrand a décidé, la prise de conscience du caractère indigne de la peine de mort l’a emporté sur les réflexes émotionnels ou (faussement) sécuritaires.

Signalons en douce, pour le plaisir (c’est pas vraiment le mot) qu’en 1981, Jacques Chirac était favorable à un référendum sur le sujet de la peine de mort . Le référendum aurait à l’époque été largement contraire à l’abolition (plus de 60 % étaient contre). Ce qui ne manque pas d’interroger sur les rapports adultères entre la Démocratie et la République, toutes les deux avec une belle majuscule, mais pas toujours d’accord entre elles !

Deuxième bonne nouvelle : la peine de mort recule dans le monde. Avec une grosse épine dans le pied de ceux qui rêvent d’une « abolition mondiale » et qui pensent, comme Robert Badinter que « la peine de mort est vouée à disparaître de ce monde ». Cette grosse épine, ce sont les Etats-Unis où la peine de mort reste pratiquée par la majorité des Etats, et soutenue par la majorité des citoyens. Mais, même là, l’abolitionnisme gagne du terrain.

Un point m’a interpellé (là, comme pour le tabac, rien n’est tout à fait monolithique, sans critique, sans faille et sans interrogation) : la position de Singapour. La peine de mort y subsiste pour les trafiquants de drogue. Ce pays veut éradiquer la drogue. Ce que je veux exprimer, c’est que devant un problème aussi décisif pour l’avenir de nos sociétés (j’allais dire « capital »), devant l’énormité des enjeux financiers qui sont derrière le commerce de la drogue, je ne sais quelle réponse apporter.

C’est un problème incroyablement angoissant, devant lequel nous restons sans force et sans proposition réelle. Quand j’entends Sarkozy « rouler des mécaniques », j’ai envie de l’interpeller, pas sur les petits loubards voleurs de vélo moteurs, mais sur le commerce de la drogue. Qui en parle véritablement ?

Débat participatif à la Bastide le 5 février

Comme une grande, je vous convie au débat participatif organisé les bastidiens (PS la Bastide et comités désirs d’avenir)

Vie chère, pouvoir d’achat, petites retraites, dialogue social »

Lundi 5 Février 2007 – 18h30

Maison Cantonale – Rue des Nuits – Bordeaux Bastide (Tramway ligne A – Station Jardin Botanique)

En présence de

– Gilles SAVARY, Député Européen, Porte parole de Ségolène ROYAL. – Michèle DELAUNAY – Conseillère Municipale de Bordeaux.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel