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Une jolie histoire de l’abbé Pierre

Une jolie, très jolie histoire, que je dépose au mémorial de l’abbé Pierre.

« L’abbé », comme on l’appelait souvent dans les milieux politiques, demande audience au ministre Georgina Dufoy. L’audience est accordée, l’abbé expose brièvement le cas d’un homme dont il veut qu’il rejoigne sa communauté des compagnons d’Emmaüs. Malheureusement, l’homme est sous le coup d’une reconduite à la frontière…

Georgina, très encourageante « Monsieur l’abbé, si cet homme est recommandé par vous, vous vous doutez bien que nous allons faire notre possible. Comptez sur moi. Je vous tiens aussitôt au courant ! »

L’abbé quitte le bureau en hochant la tête et Georgina confie le dossier à son directeur de cabinet (je tiens l’histoire de sa bouche)

Un semaine plus tard, le directeur de cabinet arrive assez penaud « Il s’agit d’un cas vraiment très fâcheux. Plusieurs vols à main armée, deux tentatives d’agression sur mineur, conduite en état d’ivresse.. » Et il énumère une liste de forfaits peu susceptibles d’aménité …

Georgina demande à l’abbé de revenir la voir

-« Monsieur l’abbé, votre confiance, j’en suis sûre, a été abusée.. Le cas de Monsieur X est au dessus de toutes possibilité de compréhension et même d’indulgence « 

L’Abbé regarde Georgina : – « Madame la Ministre, vous vous doutez bien que si moi, un pauvre abbé, j’ai pris la liberté de vous déranger personnellement, d’abuser de votre temps, c’est que je savais que c’était un cas un peu délicat…

L’affaire finit bien : la cas « un peu délicat » a intégré les compagnons d’Emmaüs, dans la proximité de l’abbé Pierre et n’a plus franchi quelque frontière que ce soit…

L’abbé Pierre

La page informatique du monde ouvre ma journée avec la mort de l’abbé Pierre. Sa soutane, son béret, cette silhouette austère qui paraissaientt d’un autre temps ont ouvert et profondément marqué le temps que nous vivons, celui de la prise de conscience médiatique de la misère. L’ abbé Pierre ne préchait pas du haut d’une chaire dans une cathédrale, mais dans le froid, suivi d’ un micro et d’une caméra.

Il a gardé cette austérité de moyens qui a été pendant plus de cinquante ans la condition de sa force. Même dans les émissions à grand spectacle où il apparaissait quelquefois, il était ce petit abbé sans luxe, à la voix cassée, que l’on imaginait repartir dans le froid comme en 1954. Nous sommes tristes. Le monde est ce matin un peu plus désenchanté.

Ecologie : la défense des paysages (13)

« Le paysage ne nous appartient pas, nous le recevons et nous le transmettons, c’est tout ». Cela a été l’objet de la première partie de mon intervention lors de la présentation de « la charte de l’écologie urbaine »*. Car c’est bien sûr vrai pour les villes, et vrai pour Bordeaux qui dispose d’un atout naturel incomparable : l’arc de son fleuve.

L’arc de son fleuve, sa double courbe, sa couleur mordorée et l’admirable écrin de pierre que le XVIIIème siècle a offert à sa rive gauche.

C’est bien davantage sur ce qui aura été apporté ou définitiment enlevé à la beauté de cet écrin que le temps jugera les mandatures d’Alain Juppé. Economiser les ramettes de papier, fermer la lumière en sortant des bureaux de la mairie, tout cela est bien et relève du simple bon sens. Respecter, magnifier le paysage, lui apporter la marque du XXIème siècle au plus créatif de son art et de ses moyens de construction, voilà qui est d’un autre ordre.

Je ne connais pas un Bordelais, mais ce blog est là aussi pour que la discussion s’engage, qui ne soit pas affligé de ce qui est déjà sorti de terre rive droite. Petit empilement de bâtiments sans envergure, loupés complets comme le millenium, où est l’ambition d’une ville, quelle marque laisserons nous d’un XXIème siècle pourtant O combien créatif en la matière ? Qui a vu le jeu de couleur des bâtiments de Houston, l’opéra de Sydney, l’intégration à son écrin vert de Vancouver, ne peut qu’être attristé de ce que nous réalisons à Bordeaux. Au moment même où nous demandons le classement de la ville au patrimoine de l’humanité.

Le décor de nuit n’est pas meilleur : voir briller au dessus de la Bastide l’énorme enseigne de la Banque Populaire, est comme un signe de ce qui domine à Bordeaux -comme ailleurs j’en ai peur- : la banque. De même, voir du haut du cours de Verdun, l’enseigne lumineuse verte de l’hôtel Ibis couronner l’Intendant Tourny nâvre tous ceux qui l’ont remarquée. Quoi de plus simple qu’un arrêté municipal astreignant la mise en place d’enseignes à des contraintes paysagères. Imaginez le Louvre dominé par une enseigne Mac’Do..

C’est pour ma part aussi pour cette volonté de respecter le paysage, que j’ai émis des réserves fortes au projet de pont Baccalan-Bastide. Nous n’avons pas même obtenu une exposition comportant une maquette de taille significative implantée sur le relief du territoire. Cela seul pourrait donner aux Bordelais une idée du rapport des volumes et de l’impact paysager de cet édifice considérable.

En 1998, lors d’une exposition semblable, les Bordelais ont découvert concrêtement ce que représentait le pont au droit des Quinconces que voulait imposer Alain Juppé. Et c’est à la suite de cette exposition qu’ils ont massivement rejeté le projet.

Sans doute la mairie de Bordeaux ne voulait pas renouveler l’expérience.

  • Conseil municipal du 15 janvier ; voir aussi « ma grand-mère, l’écologie et la bêtise durable ». (janvier, 11)

« Il faut tenir ! »

Le « Monde » et sa page électronique s’invitent décidément de manière régulière dans le blog. En ouvrant mon ordi à l’instant, les premiers mots de Ségolène Royal devant le bureau national du PS, transformé en conseil de campagne. La salle était pleine, discours, conseils et commentaires avaient commencé avant son arrivée . Trois mots : « il faut tenir ! ».

Tout est dit. Pas un mot des petits débats, des interrogations qui planaient ici ou là, un ordre simple, et pourrait-on s’amuser à dire, un ordre juste. En tout cas, un ordre, de ceux que l’on se fait à soi même volontiers par gros temps ou ciel de cafard.

Un micro avait été ouvert dans la salle, l’enregistrement a été transmis au journal « le Monde » qui en restitue l’essentiel. Elle a dit ce qu’il faut dire, fait ce qu’il faut faire : ne pas s’attarder, poser des actions, être soi.

Soyons nous-mêmes. Rien de moins et, si possible, un peu plus.

Ma grand-mère, l’écologie et la bêtise durable

Ma grand-mère était une formidable écologiste et ne le savait pas. En réalité je suis de parti pris : mes deux grands-pères l’étaient aussi, comme leurs parents respectifs. Tous savaient qu’il faut une réserve de pluie quand on est agriculteur, qu’on éteint la chandelle quand on sort d’une pièce et qu’on couvre l’âtre pour la nuit. Tout ce monde, campagnard pourtant, aurait souscrit à « La charte de l’écologie urbaine » qui nous a été présentée aujourd’hui en Conseil Municipal par le premier écologiste de l’UMP, Alain Juppé.

Le vocabulaire est important, et permet d’habiller de vêtements nouveaux ce qui s’appelait autrefois tout simplement le bon sens. Les trente pages de cette charte ne contiennent à vrai dire aucune innovation. Nous avions sur notre banc d’élu la charte de la ville de Rennes près de dix ans plus tôt, les propositions qui nous sont faites aujourd’hui y étaient incluses. A Rennes comme à la municipalité de Bordeaux on va réduire désormais le nombre de milliers de ramettes de papier qu’on utilise dans les services, on luttera contre les fuites d’eau (c’est mon ami Gaüzère qui a souligné cette démarche innovante), on conseillera de rouler à pied ou en vélo… Excellent, aurait dit ma Grand-mère l’écologiste ! Excellent, mais certainement pas élémentaire puisque tout cela est « durable ».

Ca, ma grand-mère n’y avait pas pensé : elle appelait économie ce qu’on appelle « développement », mais pas n’importe quel développement, celui qui est « durable ». Ma grand-mère ne parlait pas anglais, et d’ailleurs ceux qui ont traduit le mot « sustainable », pas beaucoup mieux. D’accord « soutenable », traduction littérale de « sustainable » (qu’on peut porter sans risque, qu’on peut assumer) n’est pas bien compréhensible en français. Mais « durable » est carrément un contresens. Il y a dans le document municipal que nous a soumis Alain Juppé une phrase dont je cherche désespérément toujours le sens « il faut faire la ville durable sur elle même ». Dessus, dessous, j’ai cherché, je n’ai pas trouvé ce qu’était une ville durable sur elle même et j’en appelle aux amis du blog. La bêtise durable, ça oui, je sais ce que c’est, et je garantis qu’elle est non seulement durable, mais éternelle.

Je ne suis pas restée en reste question « bon sens durable ». Plusieurs pages du document municipal sont consacrées à la gestion des bâtiments. En éco-langue « comment faire qu’une maison ou un bâtiment soit durable sur lui même ? ».

Bonne question… Pas un mot dans le doc, des ascenseurs de plusieurs tonnes pour élever d’un étage une pimprenelle d’un dizième de quintal. J’étais juste avant le conseil municipal dans un bâtiment public où personne ne savait où était l’escalier. Juré ! Et donc la pimprenelle, ça a été moi. Ma grand-mère n’aurait pas été contente.

Pas un mot non plus, du principal économiseur d’énergie que procure la construction la plus simple (type la maison de ma grand-mère) ou le bon sens le plus simple encore…

Vous brûlez ? Vous donnez votre langue au chat ?

Et bien cet économiseur d’énergie incroyablement efficace, c’est l’éco-volet! Je n’ose pas dire « le volet », car j’aurais carrément l’air d’une pomme, d’une qui a rien compris à l’écologie durable. En ce moment même, on dépose des volets dans les bâtiments du quartier du Grand Parc malgré les alertes que j’ai faites à plusieurs reprises après la grande canicule. Ce soir encore, je suis passée devant plusieurs bâtiments publics, largement chauffés qui ne disposent d’aucun moyen d’obturer de vastes parois vitrées pendant les nuits d’hiver ou de protéger de la chaleur l’été.

J’ai donc demandé que le document comprenne un chapitre des bonnes pratiques de la construction et de la gestion des bâtiments incluant l’existence de volets et l’incitation à les fermer chaque soir. C’est moins cher que la géothermie, moins encombrant que les panneaux solaires, moins bruyant que les éoliennes, plus sûr que le bio-carburant 3/4 choux-raves, 1/4 jus de carottes. Et pour peu qu’on les prenne en bon bois de chez nous, c’est garanti durable.

Chiche, qu’avec des trucs comme ça, si Jacques Chirac était informé, il me nommerait moi aussi sa grande écologue. Et ma grand-mère avec moi.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel