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« Aimez-vous les uns les autres, ou bien disparaissez » (en direct de La Rochelle)

Non ce n’est pas le nouveau testament mais Juliette Greco ! Et en tout cas, en direct de la Rochelle, le discours d’ouverture de Ségolène Royal pour notre Université d’été. On lui a beaucoup reproché cette phrase lors de la campagne. Elle est à l’instant ovationnée en la prononçant avec un large sourire.

« L’heure n’est plus aux diagnostics tièdes, nous avons besoin de radicalité ; pour mettre l’économie au service de l’homme, apporter des réponses précises à des problèmes tels que les retraites (…), définir autrement la richesse (…), réformer en profondeur de la redistribution ».

Et puis un petit coup de pied à la candidature de Delanoë deux jours avant notre Université : « Qu’on laisse les militants travailler, ils voteront le moment venu.

Ségolène termine avec Aimé Césaire son très court discours d’introduction : « Tout l’espoir n’est pas de trop pour regarder le XXIème siècle en face ».

A tout à l’heure pour ce pointillé de reportage en direct.

Le cadeau de Sarko à l’Université d’été du parti socialiste

Bien joué, le cadeau de Nicolas Sarkozy à notre Université d’été. Le tout petit pas que constitue le financement partiel du RSA par une taxation des revenus du capital tombe à point juste avant notre rendez-vous de la Rochelle.

Un tout petit pas en effet. La taxation reste modeste (1,1%) et ce qu’elle rapportera également (environ 1,5 milliards, la moitié de ce qui est nécessaire pour la généralisation du RSA à l’ensemble du territoire). Mais que nous ne devons noter positivement et qui floute un peu les critiques qui sous-tendront nos débats.

Edouard Balladur a regretté cette mesure, manifestant qu’il aurait préféré « en pareil cas, des économies dans les dépenses budgétaires ». Le style du communiqué est typiquement balladurien, et au demeurant passablement langue de bois.

Combien nous aurions préféré voir abroger les mesures de la loi TEPA en faveur des plus riches, qui coûtent à l’Etat dix milliards chaque année ! Depuis leur vote en juillet dernier, 95 % des successions ont été exonérées de droit. C’était, jusqu’à ce vote, 40% d’entre elles qui bénéficiaient de cette exonération. Des patrimoines très élevés sont désormais libres de droits, ce qui ne va guère dans le sens de la redistribution.

Les militants arrivent en rang serré à l’espace Encan. Il fait grand beau et grand bleu. J’espère que nous aurons non seulement de vrais bons débats (c’est pratiquement toujours le cas) mais que la presse s’en fera l’écho .

Juin 40

Il fait beau. Les réfugiés se pressent dans les rues. Vélos, charrettes, mais aussi rutilantes Salmson et leur volant à droite, tractions avant inquiétantes, Hotchkiss nobles et altières. Les femmes sont assises sur des valises, les hommes font la queue à la porte d’un grand immeuble.

Un homme distingué en sort, abordé par un rabbin à longue barbe, la mine creuse. Ils mettent un peu de temps à se reconnaître et tombent dans les bras l’un de l’autre.

– « Je suis le rabbin Krügel.. »

– « Quelle surprise, cher ami. Entrez donc, nous parlerons. »

Il ne parlent pas longtemps. Le Consul comprend rapidement la situation, la fuite des émigrés qui n’avaient d’autre espoir que passer la frontière, gagner la côte portugaise et embarquer pour d’autres cieux, s’il en était encore temps.

Le Consul avait pris sa décision. Sans ordre de personne, et surtout pas de son gouvernement, celui du dictateur Salazar, il se met rapidement au travail: ouvrir largement sa porte et signer des visas, encore des visas, des milliers de visas.. Jour et nuit, entre le 17 et le 24 juin.

On l’a compris, ce Consul n’est plus en fonction. A son retour au Portugal, Salazar l’a destitué et il est mort dans l’absolue misère, seul, oublié.

Aristides de Sousa Mendes.

Elever et éduquer : la gauche décomplexée

J’ai failli écrire : éduquer et élever le peuple. Le mot est devenu inutilisable. Jules (pas Luc !) Ferry l’utilisait volontiers. On aurait dit alors que nous étions « une gauche décomplexée ». Malheureusement, aujourd’hui seule la droite peut prétendre l’être.

Le peuple, c’est nous, vous, moi, qui en avons ralbol d’être traités en veaux, pas élevés du tout, ni sous la mère, ni devant les écrans, ni nulle part ailleurs.

A quelques jours de notre Université d’été du PS, ça ne fait jamais de mal de s’interroger sur les enjeux du socialisme-humanisme auquel nous (je et sans doute nombre des lecteurs de ce blog) prétendons appartenir.

Elever et éduquer. Ou l’inverse : éduquer et élever. Ces deux-là sont et doivent être indissociables. Eduquer tout court est trop rigide. J’ai toujours dans le coin de l’oreille, en écoutant le mot isolément, les camps de rééducation et autres joyeusetés dont un esprit libertaire en même temps que républicain ne veut pour rien au monde.

Nous ne devons pas avoir honte de vouloir enseigner, donner des modèles, ouvrir l’accès à la connaissance, plus encore ouvrir l’accès au désir de connaissance. Quand on dit aujourd’hui qu’on aime le travail et l’étude (relisez ce début de phrase, rien qu’avec cela, je prends cinquante ans dans la figure !), on a l’air ringard. Je persiste et je signe : je voudrais que nos écoliers, nos collégiens, nos étudiants aient l’obsession d’apprendre. En langage moderne, cela s’appelle aussi : miser sur « l’économie de la connaissance ».

« Lernen, lernen, lernen » (« apprendre, apprendre, apprendre »), c’est cette obsession que l’on disait caractéristique des juifs ashkénases. Alors, comme avec Kennedy nous sommes tous Berlinois, je voudrais que nous soyons tous juifs, et plus encore juifs berlinois !

Patrice Leleu, Président ou Directeur de TF1, je ne sais, s’est fait un nom dans l’histoire de la pensée universelle en disant « nous (les médias télévisés) sommes là pour vendre de l’espace de cerveau disponible pour Coca Cola ». Il a eu du courage au moins de l’exprimer. Ceux qui le pensent et qui le font sont chaque jour plus nombreux. Et le cachent.

Je voudrais que le CSA engage un José Bové de la mal-bouffe intellectuelle (modestement, je me propose pour le poste) et condamne les programmes trop indigents. Hélas, il y aura toujours alors, même (surtout) dans nos rangs pour crier à l’attentat contre la liberté d’expression.

Il y a pourtant une sorte d’état d’urgence. Les révolutionnaires de 89 et suivantes disaient: « La nation est en danger ». C’est vrai aujourd’hui, mais de toute autre manière. Tout abaisse, tout avilit, tout contente sans satisfaire.

Pas tout, bien sûr, mais trop.

J’appelais de mes voeux, il y a quelques billets de là (17 août), une déclaration de principes des socialistes limpide comme la déclaration des droits de l’homme ou le poème de Rudyard Kipling « Tu seras un homme, mon fils » (Rudyard Kipling n’était pas un socialiste fanatique, mais enfin, au moins savait-il écrire !). « Eduquer et élever », refuser, éloigner tout ce qui avilit et ne sert qu’une consommation imbécile ou des intérêts financiers fondamentalement délétères, devrait faire partie de cette déclaration.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel