m

Responsabilité

Si l’abstention est une première interrogation nous concernant tous, la défaite d’hier en est une autre, interpellant la gauche et singulièrement le parti socialiste et ses alliés.

A Bordeaux, cette défaite était prévisible. Multi-annoncée, je dirais presque promise, elle n’en est pas moins particulièrement sévère. Notre programme y est pour peu. Tourné sur l’avenir et animé d’une forte volonté de réduction des inégalités dans une ville qui compte 20% de pauvres tels que définis par le montant de leurs revenus, il peut être conservé et j’engage d’ailleurs les Bordelais qui liront ce billet à le faire car nous aurons dans les 6 années à venir à en défendre la justesse par nos propositions comme par nos oppositions.

Notre responsabilité en effet est aujourd’hui plus grande que jamais dans une ville où le vote de gauche a constamment progressé depuis 2007 et où il est majoritaire dans toutes les élections à l’exception de l’élection municipale. Nous serons 7, 7 seulement, pour porter la voix  de cette gauche au sein d’un Conseil Municipal de 61 conseillers (dont 2 représentants du FN) en face d’un Maire clairement mis sur orbite pour la candidature à l’Elysée par l’importance de son succès. Unis, nous le sommes déjà, mais nous devrons être forts dans ce multiple enjeu.

Dans la communauté urbaine ensuite. Là, il demeure la chance d’un deuxième tour et notre première responsabilité est d’appeler les électeurs qui nous sont proches à se mobiliser et à voter massivement pour la gauche pour lui donner un vrai pouvoir dans une assemblée où perdurera la cogestion. Ambares, Floirac, Parempuyre, Pessac, Merignac, Saint Medard en Jalles sont concernés et tiennent une bonne part du nécessaire rééquilibrage à gauche qui nous garantira de défendre ce qui a prévalu sous les présidences de gauche en terme de logement social, d’environnement, de relations avec les délégataires publics et aussi avec ce nouveau défi de la transition démographique en tête duquel je voudrais hisser notre territoire.

En France, je redoute comme tant d’entre nous la place montante du Front National. D’ores et déjà, le Parti Socialiste retire ses listes là où il est arrivé 3ème pour conforter le candidat républicain le mieux placé. Ce n’est pas chose facile pour une liste qui est à quelques points de son concurrent ump mais nous y souscrivons sans hésitation. Le « tripartisme » dont se rengorge Marine le Pen est détestable, parce qu’il est synonyme de repli sur soi dans un monde qui ira de l’avant sans nous. Je regrette que l’ump n’en ait cure et oublie 2002 et l’élection de Chirac avec 82% des voix.

Pendant la campagne bordelaise, notre proximité avec les écologistes et les radicaux de gauche a été totale. L’enjeu qui est le mien de la transition démographique s’inscrit de manière parfaite dans le développement durable. Le besoin de proximité dans les villes, les enjeux de santé environnementale et sociétale, la volonté de faire de Bordeaux une ville à énergie positive -comme le fait notre jumelle Münich-, ont été portés avec le même enthousiasme par les uns et les autres. Si la gauche se rassemble, y compris dans son aile gauche, faisant taire ce qui la divise au regard de ce qui la rassemble, nous pouvons sinon effacer, du moins largement atténuer la blessure du 23 mars.

De retour à mon Ministère dès le lendemain du scrutin, comme je l’ai fait pendant toute la campagne, je reprends les affaires en cours. Des moments positifs comme hier un colloque sur les enjeux de la longévité pour la recherche et les sciences humaines font reprendre de la hauteur. Un autre à venir dans la semaine avec le lancement avec Michel Sapin de notre plan métiers pour les métiers de l’âge et de l’autonomie. Le travail est un grand thérapeute.

 

 

 

 

 

 

La loi autonomie, ses trois volets et son agenda, sont sur les rails

Moins de 18 mois après notre arrivée « aux affaires », la loi « autonomie » et ses 3 volets vient d’être mise aujourd’hui 14 octobre officiellement sur les rails par le 1er Ministre lors d’une conférence de presse à l’hôtel Matignon.

Une loi d’orientation et de programmation qui, outre les dispositions législatives « dures » exposera tout l’ensemble de notre politique de l’âge.

Le champ complet de l’avancée en âge sera couvert par les trois volets de la loi : anticipation (et prévention), le moteur de la loi; adaptation de la société à la longévité qui est le plus beau cadeau que nous a fait le XXe siècle ; accompagnement de la perte d’autonomie. Ce « triple A » marquera une avancée sociale et sociétale majeure pour notre pays qui est un des premiers du monde en terme de longévité.

Le domicile est au coeur de la loi : adaptation des logements, accès aux aides techniques (ce qui constituera un levier positif pour la silver économie), amélioration des dispositifs d’aides à domicile. Les mesures concernant l’accueil des grands âgés en établissement seront posées mais prendront effet dans la 2ème moitié du quinquennat du fait des contraintes financières, comme l’avait d’ailleurs indiqué le Président de la République dès janvier 2012.

Le défi démographique est au moins aussi décisif pour cette première moitié de XXIe siècle que le défi énergétique. Malgré la situation difficile de notre pays (moins d’argent et plus d’âgés !) notre Gouvernement a choisi de le relever.

Mobilisation et solidarité exemplaires : et si on en parlait AUSSI ?

Le matériau de construction d’une maison de retraite, a fortiori d’une maison médicalisée (EHPAD), est avant tout ce drôle truc, au nom un peu ringard : la solidarité humaine. C’est bête, ça ne figure comme tel sur aucun étalage, dans aucune statistique, mais si cela vient à manquer, la maison de retraite se fissure, les mines y sont ternes, les résidents déprimés.

Vendredi dernier, en début de nuit, un incendie s’est déclaré à La Terrasse, en Isère, dans la chambre d’un résident qui ne sortait pas de son lit et ne fumait pas. La maison de retraite est nickel sur le plan de la sécurité. L’explication n’a pas été tout de suite trouvée, elle l’est aujourd’hui : un appareil électrique d’appoint a « grillé ».

Dans un temps remarquablement bref l’incendie a été circonscrit et au bout de 2 heures, le désenfumage était terminé. Pour autant, deux autres résidents sont morts du fait des fumées toxiques, et un quatrième, actuellement en réanimation, risque de décéder dans les heures à venir.

Au total, 3 morts (90, 96 et 100 ans). Les 80 autres résidents, tous choqués par cet événement violent, une équipe très secouée mais aussi très entourée par l’ensemble de la petite ville.

Et aussi, et c’est très remarquable, un drame qui a soulevé une mobilisation remarquable et rapide des services publics et des secours, un engagement non moins remarquable de toute l’équipe de la maison de retraite qui est spontanément revenue en hâte sur place, et une solidarité de l’ensemble des habitants qui considèrent tous cette maison comme centrale dans la vie locale.

Un exemple, un seul : un jeune homme s’est précipité pour sortir les résidents un à un et les transporter -le plus souvent dans les bras- vers la salle communale.  Il allait et venait sans discontinuer, jusqu’aux chambres les plus proches du départ d’incendie encore très enfumées. Il s’occupait de tous mais a dit après : je cherchais mon grand-père, j’aurais voulu le sauver. Ce grand-père a malheureusement compté parmi les trois décès.

Les jeunes ont été nombreux comme lui, allant et venant jusqu’à ce que tous les résidents soient hors des murs. Inutile de préciser que dans cette maison où 80% des résidents sont en grande dépendance, très peu étaient capables de se mobiliser eux-mêmes, fût ce très faiblement.

Toute la nuit, les résidents évacués ont été accompagnés dans la maison communale ou régnait un calme pour les apaiser. Dès le lendemain matin, des places d’accueil se sont ouvertes, à l’hôpital où une unité entière a été ouverte et une équipe soignante mise en place. De même dans les EHPAD du voisinage qui se sont spontanément proposées.

Je passe sur tant d’autres petits actes qui m’ont montré, lors de ma visite, que tout avait été pensé, aménagé, réalisé pour que résidents et familles soient le moins possible choqués et gardent des séquelles de cet événement. Tout cela avec une grande connaissance des besoins et des problèmes de ces grands âgés.

Je veux saluer cette maison de retraite. Je pense chaque jour davantage que les maisons de retraite sont un baromètre remarquable de la santé sociale d’un territoire. Celle-ci me parait exemplaire dans ce qui m’a été dit par les élus, les familles, le voisinage plus que par ce que j’ai constaté. Elle est située au coeur de la ville, elle est ouverte sur la vie locale, sans barrières, et ressemble à une résidence comme toute autre résidence contemporaine. Les familles y sont très présentes, participant à l’animation jusqu’à remplacer l’animatrice pendant ses congés, la culture -je dis bien, la culture- y a sa place. Son directeur est considéré comme « référentiel » par le Conseil Général. S’il y avait une médaille des maisons de retraite, je la lui attribuerais pour son attitude pendant -et j’en suis sûre après- ce drame.

Je vais me faire taxer de « bisounours ». Mais j’ai la ferme intention de dire et de dire encore quand quelque chose fonctionne, réconforte, aide à croire et à espérer. Hier à La Terrasse, c’est exactement cela que nous avons trouvé.

 

 

 

Les âgés dans la France politique de 2025 (VI)

D’ici dix, et plus encore 20 ans, l’expression « la force de l’âge » devrait grandement changer de sens. Ce sera une force politique et électorale. La démographie fera démocratie.

C’est déjà le cas me dira-t-on. Vingt quatre pour cent de plus de 60 ans au moment des dernières élections présidentielles, votant en grand nombre dans cette élection comme dans toutes les autres, et qui ont permis à François Hollande d’être élu en votant moins majoritairement à droite que 5 ans plus tôt (1)

Ces 24% seront 30% dès 2025. Cette augmentation de nombre ne s’accompagnera que très peu d’une augmentation du taux de dépendance. Autrement dit, ces âgés ne seront pas de ceux dont on remplit la poche d’une enveloppe déjà garnie. Ils voteront en sachant pour qui ou pour quoi. Si l’ont tient compte du taux prévisible d’abstention, on ne peut exclure qu’aux élections à faible participation, les âgés soient majoritaires (2).

Ce ne seront pas non plus les mêmes que ceux qui ont élu Nicolas Sarkozy en 2007. Ceux-ci avaient grandi dans l’ombre du général de Gaulle et de l’idée d’une France forte et du besoin de chef. Les âgés de demain auront grandi dans la préparation ou la marque de mai 68 et même s’ils n’ont pas personnellement dépavé le boul’mich, ils ont évolué dans une culture d’émancipation. Les femmes particulièrement dont on sait qu’elles vivent plus longtemps.

-Le vote « dedroitedechezdedroite » des retraités n’est pas une assurance tous risques pour les partis qui se réclament de ce côté de l’échiquier politique. Le contraire cependant non plus pour ceux qui se réclament de la gauche : cela dépendra grandement de leur capacité d’anticiper ce nouveau défi.

A cette heure, aucun tribun (remarquons que le mot n’a pas de féminin..) n’a su/pu/voulu mobiliser les âgés en tant que tels. Les associations de retraités sont légion : reconnaissons, malgré toute l’amitié que je leur porte, qu’elles sont peu ouvertes à concevoir dans sa globalité une politique de l’âge. Je rêve d’un « Haut Conseil de l’Age » composé non seulement d’âgés mais de candidats à le devenir -ce qui ouvre le champ assez largement- et ouvert à auditionner sociologues, philosophes, économistes, gérontologues, financiers, artistes..c’est à dire tout ceux qui sont impliqués dans cet immense défi démographique et qui y réfléchissent. Car c’est bien une histoire complète, à facettes multiples, que nous avons aujourd’hui à raconter et à bâtir.

Je reviens à mon tribun : nul n’a pour l’heure éveillé la « conscience de classe » des âgés. Si l’on prend en compte leur faible taux d’abstention et le fait qu’ils représenteront demain 30% de la société, ils ne seront dans beaucoup d’élections pas loin d’être majoritaires à eux tout seuls. Négliger les âgés aujourd’hui, ce serait négliger le tiers-Etat en 1789.

Si une « guerre des générations » venait à se déclarer, qui la gagnerait ? Dans les urnes : les âgés. Du moins personne ne pourrait accéder au pouvoir politique en allant au contraire de leurs exigences. (Ce qui est un peu différent de la certitude d’imposer lesdites exigences.)

Ce serait un drame sous cette forme : rejeté vers une conscience communautariste par une attitude de rejet des générations plus jeunes, les âgés s’enfermeraient dans une conscience de classe réactionnaire, défensive et néo-poujadiste.

A l’inverse, si les générations qui leur succèdent ont une attitude d’inclusion, de participation, de valorisation, je prends le pari que les âgés, fort d’une expérience politique non négligeable (celle de la 2ème partie du siècle dernier et du début de celui-là), sont susceptibles de concevoir le nouveau monde et d’y apporter vision, innovation, réflexion. Les premiers dans cette situation quasi-majoritaire, ils seront obligés d’inventer.

On considère aujourd’hui en Europe que la jeunesse est l’urgence. Et c’est vrai. Mais si la jeunesse est l’urgence, l’âge est l’exigence. A ne jamais vraiment traiter le sujet, on s’enfermera plus sûrement encore dans l’obscurantisme qu’à négliger le réchauffement climatique.

Le défi démographique est aujourd’hui un défi démocratique. Et c’est une grande, forte, totalement nouvelle perspective.

1. En 2007  au 1er tout N Sarkozy a été choisi par 41% des retraités contre 23% pr S Royal. En 2012 37% pr NS et 32% pr F Hollande

2. L’abstention est beaucoup plus faible chez les âgés. Aux municipales 2008, 2 âgés de plus de 60 ans pour 1 jeune de moins de 30 ans se sont déplacés pour voter. Au 2ème tour des régionales 2010, 7 seniors se sont déplacés pour 3 jeunes

 

Silver économie, l’économie au service l’âge (V)

La silver économie est une économie au service de l’âge et de l’autonomie des âgés. Et c’est de très loin, ma première et principale raison de la promouvoir, de la soutenir, de l’installer dans le paysage de la France de demain.

Il y en a une autre, je le concède : c’est le désir que partagent tous les Ministres d’apporter leur pierre à la bataille pour l’emploi et le dynamisme économique de notre pays. Faire de ce secteur un des fleurons de la recherche, de l’innovation et de l’entreprise, c’est tout simplement vouloir mettre sa place en accord avec celle qui est la nôtre, très favorable, en matière de longévité.

Comme tous les Français, j’ai envie de vieillir longtemps, bien que le plus tard possible, de rester autonome, libre et dans un domicile que j’aurai choisi comme le mien.

Je personnalise le sujet pour exprimer que je ne le vis pas comme théorique, du haut ou du fond d’un bureau, mais parce que je veux qu’il soit une aide, un outil concret, un facteur d’optimisme pour tous ceux (100% des Français) qui sont invités à avancer en âge et désireux de répondre positivement à cette invitation.

Outre le secteur de l’emploi à domicile -sous toutes ses formes- que je n’aborderai pas ici, la silver économie, c’est quoi ?

C’est d’abord toutes les aides concrètes permettant de faire de son domicile un allié de son vieillissement au lieu d’être un champ de pièges, de risques, d’encombrement inutile, d’enfermement et d’isolement.

Dans cet inventaire, tous les dispositifs d’alarme et d’assistance. Je m’étonne toujours du nombre formidable d’âgés ou candidats à le devenir qui installent sur leur domicile une télé-alarme  alors qu’eux-mêmes se jugeraient stigmatisés, placardisés au bataillon des vieux, s’ils disposaient d’une télé-assistance. Ce sont quelquefois d’ailleurs les enfants qui font installer la première mais n’osent pas proposer la seconde, sans se rendre compte que la seconde peut être utile dans toutes les circonstances, fût-elle la venue intempestive d’un visiteur mal intentionné ?

Et bien sûr, tout ce qui est domotique et installation de dispositifs, souvent simples et peu coûteux, pour éviter de faire du skate-board sur le savon dans la baignoire, de se réveiller la nuit pour entamer une longue chute, les pieds dans les fils du téléphone, les pieds de la table de nuit et recevoir finalement l’amphore romaine qui attend l’occasion depuis des décennies, sur la tête ?

Qu’on ne croie pas que j’exagère : j’ai visité maintenant de très nombreux intérieurs de vieilles dames et de vieux messieurs infiniment sympathiques mais qui ne savent pas qu’ils vivent dans un champ de mines. A cette situation, un premier mot : ergothérapeute et un deuxième : silverEco, intervention de base.

Au-delà, tant de choses, du plus simple au plus complexe. Du chemin lumineux au robot et à l’exo-squelette, de la canne connectée à la greffe de cornée, tant de technologies sont là pour nous faire reprendre confiance et envisager autrement que comme un naufrage… les trente ans de vie que nous pouvons raisonnablement prévoir.

Tout cela est hautement générateur d’emploi : il y a celui qui vend et qui explique, celui qui installe, celui qui assure le suivi, celui qui répare si besoin, en plus bien sûr de celui qui invente, qui conçoit, qui fabrique…

Je ne veux pas en faire une tonne. Expliquer comment on lance une filière, comment on la construit, comment on la consolide… Mais tout cela est déjà en train et si je peux être pour seulement un atome dans le fait que notre pays soit bientôt un leader mondial dans ce domaine comme il l’est pour la longévité, je ne serai pas totalement mécontente.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel