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Cette question, façon philosophe post-moderne, vient d’introduire le congrès de psycho-oncologie, ce matin à Arcachon. Enorme congrès de près d’un millier de participants, réunissant oncologues (cancérologues), psychiatres et psychologues travaillant en milieu cancérologique et personnalités du monde des sciences humaines. Atmosphère profondément réfléchie, en accord avec la gravité du sujet et sa dimension multiple.

J’avais eu la veille un long entretien avec l’épouse d’un malade. Appelons-la Florence. Je venais de lui donner de mauvaises nouvelles et elle me faisait partager son vécu des retours de chimio de son mari, des attentes de scanner, de la crainte de signes nouveaux… Ce chemin, plus difficile que tout autre, de ces héros de notre temps que sont les malades graves. Elle m’a dit « je ne sais pas si je fais bien, je n’étais pas préparée ». Réflexion simple et profonde qui situe toute la thématique du congrès. Non seulement « qui est le proche ? » mais aussi « comment l’aider dans son rôle d’aidant ? ».

Qui est le proche ? On emploie de plus en plus souvent le terme de « personne de confiance ». Celle à qui on pourra parler, celle surtout à qui le malade souhaite que l’on parle, celle qui l’accompagne dans cette épreuve entre les épreuves qu’est la maladie grave. Les familles, c’est un poncif bien connu, ont évolué en quelques décennies plus qu’en plusieurs siècles (9% de divorces en 1965, 40% en 2005 ; ce n’est qu’un chiffre parmi beaucoup). Quatorze pour cent des français vivent seuls dont 5 millions de femmes de plus de 55 ans. Or cette tranche d’âge est celle de la plupart des cancers.

Ce proche quelquefois absent, est aussi bien souvent en difficulté, ne serait ce que matérielle, rendant son rôle d’aidant bien difficile. Et puis, il y a toutes les formes de vulnérabilité, ces « proches » qui le sont un moment et qui se détournent de la maladie, ces proches qui ne l’étaient pas et qu’une rencontre, une conversation, un moment de confiance, un geste, font découvrir ou reconnaitre comme proches.

L’importance de la question est évidente, et deux jours de congrès ne seront sans doute pas assez pour essayer d’en cerner la complexité et surtout d’améliorer cette aide aux aidants qui est aussi un des objets de la médecine, même s’il n’est identifié sous cette forme que depuis peu. Nous sommes ou serons tous les proches d’un être cher ou vulnérable. Un million de Français vivent, à l’instant où j’écris, en compagnie d’un cancer.

J’utilise le mot « compagnie » à dessein. Cette compagnie envahissante, souvent obsédante -une malade dit « ce colocataire permanent »- qui change la face du monde, le sens du calendrier, qui fait quelquefois que la moindre date, la moindre échéance, prennent une dimension de violence (« où serai-je, où en serai-je aux prochaines élections, à Pâques, aux vacances ? »)

Je reviens au congrès. J’y étais ce matin avec une double casquette et je me réjouis de toutes les occasions qui me permettent de faire le lien entre ma profession d’élue et ma profession médicale, entre la vie que l’on qualifie de « publique », et ce privé entre les privés qui est le soin individuel que l’on porte à un patient. Le Conseil Général, hors de ses « compétences » (c’est à dire de ses obligations légales) a choisi de s’investir dans le domaine de la santé. Je n’y suis pas tout à fait étrangère et c’est une de mes fiertés.

J’ai donc ouvert ce congrès au nom de Philippe Madrelle que je représentais. La phrase est un peu bête en tant que telle mais quelquefois la présence des pouvoirs publics a une signification réelle. Nous soutenons financièrement cette manifestation mais plus encore nous rendons ainsi hommage à ceux qui oeuvrent dans ce domaine. Et c’est ce que j’ai exprimé, devant un amphithéatre bondé à la Présidente de la Société française de psycho-oncologie, Mme le dr Pelicier et au dr Jean Marie Dilhuidy, collègue de l’institut Bergonié, qui a eu l’initiative de la tenue en Gironde et la charge de cette grande réunion de savoir et de sollicitude.

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