m

Travail du dimanche : c’est non !

Une des mesures, prèsentée comme cardinale, du projet de loi sur le Pouvoir d’achat est l’extension du travail du dimanche. Remarquons au passage que ce projet de loi est présenté demain 12 décembre en Conseil des ministres et ne sera débattu à l’Assemblée qu’à partir du 18 décembre. Raison avouée par le Gouvernement : il ne faut pas que la discussion traine en longueur. La session de l’Assemblée s’achevant le 21, les députés seront bien obligés d’en finir. On a ainsi repoussé en janvier le projet de loi sur la rétention de sécurité pour faire place au texte qui fâche.

Le Gouvernement a en effet hâte que se débarrasser de ce sujet épineux. Khadafi vaut presque mieux. La baisse du pouvoir d’achat est une épine monumentale dans le pied de celui qui en avait fait un slogan de campagne (« être le Président du pouvoir d’achat »).

Mesure présentée comme l’oeuf de Colomb : étendre et payer double le travail du dimanche. C’est tout d’abord faire bien peu de cas de la vie personnelle, sociale et familiale de ceux qui sont susceptibles d’y souscrire. Trois millions et demi de Français travaillent déjà le dimanche : hospitaliers, restaurateurs, policiers, standardistes… tant de mêtiers justifient déjà cette astreinte. Il s’agit ici de l’étendre principalement ,sans motif véritable de service, aux employés de la grande distribution. Leur travail est-il si passionnant, leur conditions d’exercice si favorables, que l’on doive en plus les priver d’accompagner leur gamin au foot, de déjeuner avec l’oncle Marcel ou la cousine Françoise, ou encore de suivre les séances de la société linéenne ?

C’est bien sûr la première raison de dire « non ». Toutes les civilisations, toutes les religions, connaissent un jour de repos. Un jour où l’on est autre et où l’on échappe aux contraintes habituelles pour « respirer », être soi, vivre tout simplement sa vie à sa guise et à son rythme.

Les enfants vont en pâtir plus gravement encore que les adultes, et c’est ce qui me nâvre : comment une promenade du dimanche entre les rayons d’Auchan pourrait-elle être constitutive de la personnalité ? Je suis, avec beaucoup de scientifiques, convaincue que ce que j’appelle « le silence dans la tête des enfants », la nécessité de faire appel à ses ressources intérieures, d’inventer des jeux, de se raconter des histoires, est indispensable à l’équilibre et à la construction du soi. C’est mal parti.

Les raisons économiques m’échappent. Le pouvoir d’achat des consommateurs va-t-il augmenter pour autant ? Non, il va seulement se déplacer vers des objets de consommation le plus souvent inutiles et de maigre qualité. Au détriment des produits culturels, d’un dîner au restaurant, d’un spectacle…

La nécessité de payer les vendeurs plus chers et avec une plus grande amplitude horaire risque de se répercuter sur le prix de vente. Là je suis moins sûre de moi, et en réalité ce n’est pas ce qui m’occupe le plus.

Cette mesure va tout simplement au contraire de ce dont notre société souffrante a besoin : rééquilibrer les valeurs, revenir à l’essentiel : l’activité physique, la culture et l’étude, les liens sociaux et familiaux.. L’abêtissement nous est maintenant vendu comme un moteur de croissance, alors qu’il fondamentalement, dans toutes les civilisations un signe de déclin et de décadence.

Devrons-nous bientôt nous informer hors de nos frontières ?

Un article à la une de la Sueddeutsche Zeitung (qui couvre très largement le sud et l’ouest de l’Allemagne, tout en ayant l’autorité d’un quotidien national) nous alerte sur l’omerta médiatique qui régit notre presse nationale. Je ne veux pas prendre parti, et bien que l’article soit un peu long, je donne la traduction in extenso. Malgré le caractère sans doute imparfait de la traduction, certaines phrases font mal à notre ego national et à notre propension à nous poser en défenseurs des libertés et des droits.

(suite…)

La campagne en direct

Pluie à verse, vent force 5, ce matin sur Bordeaux. Le Rousset (pardon, Alain, je trouve cette expression, de vieille tradition française, charmante et dans la circonstance assez vraie), le Rousset donc était à la chasse, levant la bécasse. Bonne nouvelle, il n’en a levé qu’une, qu’il n’a pas même tirée. Qu’on se le dise, au sens propre au moins, je suis plutôt du côté des bécasses.

Nous convenons de retarder un peu notre rendez-vous de campagne : au Colbert, la tempête arrachait les étals, et le Rousset lui-même sortait à grand peine des broussailles trempées d’eau, tout marri que sa bécasse l’ait été plutôt moins que son nom l’indique…

Arrivée au Colbert vers 11 h sous un coup de bourrasque d’une particulière intensité. Je dis souvent que la parité n’existera jamais en politique : Alain Rousset, à l’égal sur ce plan d’Alain Juppé, arrive le poil ras mais en bon ordre, Florence Lamarque, candidate aux élections législatives sur l’emblématique troisième canton, tout comme moi, déjà transformée en 0’Cedar mouillé par les gifles de pluie. Refuge à l’amical stand des huîtres et du vin blanc, tous accrochés au large parasol/parapluie qui couvre les tables pour éviter son envol. Un nostalgique vient me voir : « Alain Juppé accroche son vélo les dimanches de beau temps au pilier qui nous fait face ». Mais remarque-t-il : « Aujourd’hui, il s’est dit que ça valait pas la peine… »

Je ne suis pas sans espoir que ce fin observateur nous rejoigne…

Petit marché auprès des marchands qui avaient bravé les intempéries. Une info qui va combler les people-ologues de la scène locale : à cette saison, Alain Rousset n’achète et ne consomme que des poires comices. Spécialistes et fins gourmets le rejoindront dans ce choix.

A un stand, une vielle dame rejoint et aborde Rousset, le coeur aux lèvres : – Vraiment, vraiment, je suis trop contente que vous aimiez à ce point les animaux !

Allusion au papier dans Sud-Ouest la veille : Rousset et ses brebis, Rousset nourrisant ses poules avant de partir au travail et peu satisfait quand il ne trouve pas d’oeufs dans le poulailler. Qu’on se le dise au Conseil Régional : quand le Rousset arrive grognon, ce n’est ni la faute de Sarko sucrant des crédits aux régions, ni du staff américain de Ford ou d’un quelconque labo de biotechnologie, c’est la poule roussette (je promets, l’espèce existe) qui n’a pas rempli son office. Et en cette saison, roussettes ou pas, les poules sont paresseuses.

Surtout ne dites à personne que je suis à l’origine de cette chronique détendue, dont l’objet est justement de montrer qu’une campagne c’est aussi un moment de bonne humeur et d’envie d’être.

Où est le choc de croissance ?

Où est le « choc de confiance » promis par mme Lagarde, dans un discours mémorable d’inconscience, lors du vote de la loi TEPA en juillet dernier ? La défiscalisation des heures supplémentaires, les exonérations diverses d’impôt, le « bouclier fiscal ».. devaient créer ce choc de confiance qui entrainerait inéluctablement une envolée de la croissance. Quen est-il six mois après ?

L’indicateur de confiance des ménages établi par l’INSEE est tombé à son plus bas niveaux des quinze dernières années. La croissance est inférieure d’un demi point aux prévisions du gouvernement et elle ne sera pas meilleure l’année prochaine.

Le gouvernement tablait sur une croissance entre 2 et 2,7 et comptait sur le chiffre le plus haut pour financer les 15 millions de coût de la loi TEPA ; elle devrait s’établir autour de 1,8%, ce qui la situe un point au dessous de nos partenaires européens

Les autres indicateurs de conjoncture, par exemple la consommation des ménages en produits manufacturés, sont en forte chute. L’année prochaine, la croissance, que le Président de la République voulait « aller chercher avec les dents », devrait être de l’ordre de 2%. Où sont le « choc de confiance » et le « choc de croissance » promis par Mme Lagarde ? Le « cercle vertueux » qui devait tirer la France vers le haut, où est-il ?

L’explication est simple : ce qui détermine la croissance, c’est d’abord la progression du pouvoir d’achat du revenu disponible. Entre 1997 et 2002, cette progression a toujours été comprise ente 3,2 et 3,5% par an, en conséquence à la fois des créations d’emploi -400 000 par an- et de la hausse du revenu individuel. Après 2002, ces chiffres sont retombés avec des fluctuations entre 1 et 2%.

Les faits et les chiffres sont têtus. Ils sont austères mais importants à analyser. La vérité est que le gouvernement n’a pas de politique économique. La lecture des journaux étrangers montre chaque jour l’étonnement et l’incompréhension de nos partenaires européens dont les résultats démontrent au contraire qu’il n’y a pas de fatalité à la récession et à la montée de l’inquiétude. Toutes les interventions de notre groupe lors de la discussion de la décision modificative du budget ont analysé les chiffres, démonté cette absence de politique et fait des propositions.

Très peu d’écho dans les médias qui se gavent au contraire de l’interrogation de Josiane Balasko « où est l’opposition ? ». La distance entre l’écho donné au travail de fond, comme c’est le cas des débats parlementaires, et le sort fait aux « petites phrases » est immense. Une journaliste de France-bleue me faisait partager hier son interrogation et son inquiétude sur cette spirale médiatique qui va au plus facile, aux « valeurs sûres » déjà starisées, plutôt qu’aux faits et à l’analyse. Il faut à chacun de nous une sacrée dose de sens critique pour peser les informations dont nous sommes abreuvés.

On le voit, l’atmosphère de ce matin est un peu à l’inquiétude. Comme Christine Lagarde, et ce doit être notre seul point commun, je pense que notre pays a besoin d’un « choc de confiance ». Il a besoin de reprendre force, de croire en ses politiques, de croire en lui-même. Cela ne peut se faire sans une politique d’égalité et d’équité (les deux mots ne sont pas synonymes, mais les deux sont nécessaires) , et par l’exemple. L’exemple personnel donné par Nicolas Sarkozy (le culte du dieu argent), la politique de creusement des inégalités et le dogme fiscal « les pauvres ne sont pas riches mais ils sont nombreux », sont tout l’inverse.

Une fois encore, je crois à la nécessité d’un nouveau modèle de société : remise en cause de la consommation aberrante, taxant les pauvres plus que les aidant à vivre, valorisation et partage des biens culturels, lutte contre la fracture sanitaire qui est la pire des inégalités … Nous sommes à l’opposé, et c’est pour moi une interrogation sans fonds.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel