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La révision des lois de bioéthique arrive demain en débat à l’Assemblée nationale. Sujet majeur, dont nous n’allons aborder que quelques chapitres, ceux-là même qui sont sujet à révision.

Ce domaine est fondamentalement passionnant, ne serait-ce que parce qu’il agite des questions que les hommes se sont posées et se poseront de tous temps sans recevoir jamais de réponse définitive. Au bout de ces questions se pose toujours une autre question, en face de laquelle nous n’avons, chacun de nous, que notre liberté et ce que nous appelons nos valeurs, pour approcher de l’ébauche d’une réponse.

La première de ces questions est celle de la recherche scientifique. On la croit nouvelle, elle est immémoriale. La recherche et la science sont aussi consubstantielles à l’homme que le mouvement ou le conscience du temps. Rabelais, une fois pour toutes l’a, non pas tranchée, mais cadrée: « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ». On ne peut qu’être baba d’admiration en pensant au siècle ou a été écrite cette phrase lumineuse.

Les lois de bioéthique n’ont d’autre objet que de mettre de la conscience dans l’accélération exponentielle des acquisitions scientifiques. On découvre aujourd’hui en un an plus qu’en un siècle au temps de Rabelais. On donne à l’homme des moyens techniques en proportion mais cette phrase demeure définitive et intemporelle.

Ensuite, il s’agit de meubler cette « conscience » de ce que nous appelons nos valeurs. Elles sont aujourd’hui distribuées entre de nombreux spécialistes et nous avons appelés à l’Assemblée, dans le cénacle de nos auditions, des sociologues, des philosophes, des généticiens, des anthropologues et des tas d’autres « logues » qui couvrent presque tous les domaines des sciences dures, de la médecine et des sciences humaines.

Un premier exemple, parmi les plus débattus, celui de la « maternité pour autrui ». Ne serait-ce que le choix du mot est déjà choisir une prise de position dans le débat. J’ai choisi celui qui me parait le moins éloigné de la réalité, mais dans tous les cas on comprend qu’il s’agit de confronter les valeurs entre la conception que l’on a de la place de la femme, du droit à l’enfant, du droit de l’enfant, du droit tout court, du droit de la filiation, de la part entre filiation biologique et filiation génétique…

Je vais pourtant en prendre un autre pour illustrer ce que je crois être- et devoir être- le fil conducteur de toute réflexion dans la confrontation de ces valeurs.

C’est un mot si petit, si ringard, à côté de tous les mots à rallonge, de toutes les déclarations de principe, de toutes les grandes théories, qu’on a presque scrupule à le prononcer: la vie.

La vie, ce qui va dans le sens de la vie, ce qui aide à la vie, doit être le fil rouge de nos prises de position.

Nous avons eu de longs débats autour de l’autorisation ou non de la recherche sur cellules embryonnaires, cette recherche revenant à la recherche sur embryon, en connaissant qu’elle est responsable de la destruction de cet embryon.

Bien sûr, elle ne se fait pas sur un embryon destiné à devenir un petit garçon joufflu ou une petite fille toute rose avec dix petits doigts aux pieds et aux mains, mais sur des embryons surnuméraires n’ayant aucune possibilité de carrière dans ce sens réconfortant.

Le Pr Arnold Munnich, généticien de grand renom, devenu conseiller auprès du Président Sarkozy, a tranché devant nous le débat en posant le principe intangible du respect dû à l’embryon humain : la recherche, c’est non !

Sauf que … A quoi servent les recherches sur l’embryon ? En premier lieu, bien que non exclusivement, à comprendre pourquoi certains embryons ne sont pas viables et pourquoi ils avortent. Si nous parvenons à le comprendre, ou à aller plus loin dans cette compréhension, nous progresserons dans la recherche sur la stérilité, les malformations et les maladies génétiques en général.

Vers où penche la prise en considération de cette toute petite valeur qui tient en trois lettres et qui a l’air bien modeste vis à vis du grand principe de respect dû à l’embryon humain ?

Vers l’autorisation de la recherche sur les cellules embryonnaires ! Et c’est ainsi que, lors de la commission, j’ai modestement contribué à faire pencher la balance vers une décision unanime de notre commission.

Cela ne marche pas aussi clairement dans tous les cas : la vie est comme la vérité, elle a bien des visages et ce sont des visages changeants. Pourtant, se rappeler que rien d’autre, nulle part, depuis que le monde est monde, ne lui va à la cheville, fait faire quand même un sacré bout de chemin.

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