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Un départ, sans doute le plus marquant du cours de ma vie. J’avais 25 ans, ce qui n’est pas tout à fait jeune, mais qui allait devenir tout à fait nouveau. Une autre vie.

Mon père, préfet de région, avait atteint l’âge limite d’éxercice. Nous habitions jusque-là (et depuis 1958)* l’hôtel préfectoral de Bordeaux. Admirable maison qui avait traversé des épreuves et des gloires dont je ferai un jour le récit.

Le jour dit, je pris le volant de ma 2CV, déjà un peu âgée et, pour la dernière fois la lourde porte s’ouvrit sur la commande d’un officier de police qui saluait chaque entrée et chaque départ, et après ce salut, se referma derrière moi. Je garde très précisément en mémoire le lourd clic qui marquait le moment où le portail rentrait dans ses ferrures..

Seule toujours, je traversai Bordeaux pour atteindre une grande maison, presque vide, en état médiocre, que mes parents avaient acheté à mon intention. Le chauffage ne fonctionnait pas, les meubles étaient rares, l’atmosphère était celle d’un immense vide, silencieux et glacé.

J’avais bien sûr la chance d’avoir un domicile à moi, mais qui était à tout l’opposé d’un domicile accueillant et protecteur. J’ai mis plus de 20 ans à le rendre un peu moins rigoureux et je ne l’ai quitté qu’en 2006. Près d’un demi-siècle plus tard…

Ce départ de l’hôtel préfectoral, fut une arrivée dans une autre vie. J’étais désormais indépendante mais plus encore seule. Découvrant que tout dépendait désormais de moi : choisir un architecte pour étayer le maison qui n’avait pas de fondation et commençait de se fissurer, l’équiper de toutes les choses ordinaires qui permettent d’y faire un minimum de cuisine, d’y dormir…. Tout, mais absolument tout pour en faire un domicile.

En 72, j’étais dans mes dernières années de médecine. J’avais passé l’internat des hôpitaux en 69 et j’avais donc un salaire. Mais avouons le, je n’avais jamais habité jusque là qu’avec mes parents et dans des maisons qui ne nous appartenaient pas et où rien n’avait été choisi par nous ni n’était à nous que le contenu de quelques valises. Trois hôtels préfectoraux et un appartement au dernier étage de l’aile Colbert du château de Versailles où habitaient le conservateur du château et quelques rares hauts fonctionnaires. furent mes domici

Prestigieux, certes, vrais lieux de culture riches en souvenirs, mais surtout qui installaient dans la tête l’idée qu’on ne faisait partout que passer. Forte leçon mais qui était finalement plus rassurante que d’investir une maison vide de longue date et où l’on n’a pas le moindre souvenir.

Ma 2 CV et mon premier berger allemand, Pénélope, avaient avec moi fait le court voyage d’un rue de Bordeaux à une autre. Ils restèrent jusqu’à leur mort mes compagnons de route au sens le plus fort. Pénélope avait fait sien le siège arrière de la voiture mais dès que j’en descendais, elle m’accompagnait, sans jamais de laisse et sans s’éloigner d’un pas. Je commençais à faire des cours à la faculté : elle descendait avec moi marches des amphithéâtres et se tenait à mes pieds toute la durée du cours. Les étudiants les premières fois l’accueillirent bruyamment puis s’y habituèrent de manière assez sympathique. Elle le leur rendit…

  • ce délai de 14 ans demeure aujourd’hui le record de durée d’exercice préfectoral dans un même poste

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