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Le mal est fait, qu’importe la vérité

Nous nous battons aujourd’hui pour la liberté d’expression : je n’en déroge aucunement et ce combat, centré aujourd’hui sur la presse écrite, est légitime. Pour autant, la responsabilité de son usage n’en doit pas moins être questionnée. Pour chacun de nous, l’usage d’un droit relève de la liberté individuelle. Pour les médias s’y ajoute la déontologie professionnelle.

Ce matin, notre quotidien régional relaye un affichage anonyme à caractère diffamatoire. Habilement, il est vrai : il ne relaye pas les faits évoqués, mais l’affichage. La diffamation par ailleurs ne concerne qu’un canidé de bonne taille, qui pour avoir acquis récemment la reconnaissance de faire partie des « êtres vivants doués de sensibilité » n’est pas devenu pour autant un sujet de droit.

L’affichage concerne en réalité la maîtresse du chien, en l’occurrence moi-même. Je le joins à ce billet. Le rapport (au sens où l’entendent les enfants « c’est pas bien de rapporter » ) est pour autant incomplet. S’il ne manque pas à rappeler une morsure qui n’a jamais existé, il ne mentionne pas que l’affichage a concerné une grande partie de deux rues, y compris la mairie de quartier. Le collage est resté en place suffisamment longtemps malgré la présence à l’intérieur de salariés ou de représentants de la Mairie.

Les faits : mon chien sort trois fois dans la journée dans mon jardin, toujours accompagné d’une présence humaine, en respectant les heures légales et quand je pars tôt à l’Assemblée, comme ce matin, ou que je reviens la nuit largement tombée, il est sorti en laisse pour qu’il n’y ait aucun risque du moindre aboiement.

Je reconnais que lors de ces trois sorties quotidiennes mon animal s’exprime quelquefois dans sa langue, tous mes efforts pour lui apprendre des langues étrangères ayant été vains. Il les comprend, mieux que beaucoup d’humains, mais s’est jusqu’alors refusé à les pratiquer lui même.

Il a une détestation particulière des travaux et va à l’encontre de mes voisins qui en sont au contraire friands le week-end et je lui explique que malgré sa belle race bergère allemande -qui a de ce point de vue une longue expérience- ce n’est pas à lui de faire respecter la loi.

Donc mon chien s’exprime occasionnellement, ne pouvant gêner nul voisin digne de ce nom qui suppose dans mon esprit convivialité et entraide.

Mais quelles sont les conséquences de ces faits bien banals et pour qui ? Elles ne touchent évidemment que la modeste élue que je suis qui a le tort d’habiter dans un quartier qui ne connaît aucune mixité sociale et où « sociali-i-i-sme » rime avec chars soviétiques. Toute de cette obédience bénéficie de semblable aménité, particulièrement à l’approche des scrutins électoraux.

La publication de sud ouest me garantit bien des plaisirs et en premier lieu de supporter des gras messieurs, cramoisis de plaisir, s’adressant à moi pour me donner des conseils de dressage et de bonne éducation.

Précédemment une « morsure » dont aucun journaliste n’a pris la peine de vérifier la réalité m’a valu cinquante articles de presse. J’étais alors Ministre, la diffusion sera peut être cette fois plus restreinte. Craignant les blondes mielleuses s’avançant vers mon chien, sac brandi comme une menace, j’ai renoncé à le sortir (en laisse évidemment) dans la rue sur le court trajet de mon domicile à mon bureau parlementaire. S’il ne parle pas les langues étrangères, mon chien Dixie connaît parfaitement les intentions de ceux qui m’approchent et s’il se frotte avec libéralité à ceux dont les motifs relèvent de la fraternité républicaine ou de la franche amitié, il devine avant que ce ne soit prononcé les réflexions telles que « quand on a un chien méchant, on lui met une muselière ». J’ai renoncé à expliquer que trop d’humains méchants n’en ont pas, ce qui changerait pourtant la face du monde.

Le titre du billet du Sud Ouest n’est pas indifférent. Comme mon chien, je sais décrypter les messages subliminaux que contiennent les mots « le chien aboie, le quartier trinque » rappelle juste un peu trop clairement « les parents boivent, les enfants trinquent ». Mais tout cela relève de la liberté d ‘expression.

Libre est Sud Ouest de se faire l’écho des poubelles. Le mal est fait, qu’importe la vérité ?

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel