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Il faut toute la malignité des financiers et de leur séide le plus empressé pour avoir réussi à détourner de son éternité « la règle d’or ».

Dans toutes les civilisations, à travers les siècles comme au travers des continents, sous des formes différentes mais toujours convergentes, la « règle d’or » constitue le B.A.BA de la morale. B.A.BA n’est pas un mot en l’air : ce qu’un enfant comprend dès ses toutes premières années, ce que sa mère invente sans même réfléchir pour lui faire percevoir que désormais il est un petit homme au milieu d’autres.

« Ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas que l’on te fasse » est sa formulation de base. D’une rare finesse, d’une rare lucidité puisqu’elle fonde l’altruisme sur le soi et le respect des autres sur celui que l’on doit à soi-même. De la Bible à Aristote, du vieux Sénèque que cela n’empêcha pas de rater l’éducation de Néron jusqu’à Jésus, Mahomet et au Bouddha, tous ont retrouvé sans avoir besoin de rien savoir de ce qu’avaient écrit leurs prédécesseurs le précepte-clef de notre « vivre ensemble » comme on dit et redit maintenant jusqu’à nous en donner la satiété.

Un tournant est advenu quand la chaussette a été retournée : « Fais à autrui ce que tu aimerais que l’on te fasse ». Le job devient plus difficile, plus complexe et plus complet. Qui veut le mettre profondément en pratique doit d’abord se connaître soi-même, ce qui est déjà un vaste programme, s’accepter, puis avoir la patience, l’attention de faire profiter les autres de toutes ces petites choses qui nous guérissent des bleus que nous avons à l’âme (un sourire, une douce parole..) comme des grandes quand le besoin s’en fait sentir. Aider les enfants de Somalie, et leurs parents, en est une illustration spectaculaire qui montre que notre B.A.BA de la morale a encore besoin d’enseignants .

La règle d’or des financiers sur laquelle notre Président de la République -que l’on sait pétri de philosophie- est assez loin de ce primitif concept. Elle n’est pas loin d’en être l’exact inverse.

Une vision bénévolente de cette règle relookée à l’aune sarkozienne peut être : « Faites dans deux ans ce que je me suis bien gardé de faire pendant quatre ». Deux ans, car la « règle » ne s’appliquera qu’en 2013, quatre ans parce ce que notre Archimède de l’économie n’en a eu la révélation qu’en fin de mandat.

Une interprétation plus bucolique se trouve dans une fable de la Fontaine discrètement revue pour l’occasion « le Flambeur et la fourmi »

 » »Le plus petit morceau
De mouche ou de vermisseau,
Pas le moindre grain pour subsister,
Je n’ai laissé en vos greniers.
(…)
Vous avez tout gobé, j’en suis fort aise
Eh bien, votez maintenant ! »

J’en plaisante… Mais au vrai cette imposture supplémentaire d’un Président à bout de souffle et de superchéries est tout bonnement inacceptable. User d’une expression toute empreinte de sens moral, sans doute la plus épurée des doctrines philosophiques, pour faire gober au bon peuple ce qui n’est qu’un exercice tardif d’auto-blanchiment a quelque chose d’un peu misérable, de bas, de petit, qui dépasse un peu en ces qualificatifs l’ordinaire de la stratégie politique.

Encore le pécheur se repentirait-il ! Réparerait-il ses erreurs ! Nous dirait-il à l’occasion de la séance extraordinaire du Parlement qui nous attend le 6 septembre : « j’ai gaspillé l’argent public, creusé la dette de l’Etat plus qu’aucun de mes prédécesseurs mais j’ai compris et je vous propose de revenir sur les plus accablantes des lois que je vous ai faites avaler. Boulet fiscal, droits de succession, défiscalisation des heures sup’, allègement de l’ISF, loi Scellier, réduction des ¾ de la TVA sur la restauration… Nous allons les abolir et repartir d’un nouveau pas ».

Eh bien, nous ne sommes pas mauvais bougres : nous penserions que s’il est agité, il n’est pas rapide, mais nous voterions la règle d’or.

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