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Se marier pour 70 ans, c’est long… Et d’autant plus long quand on parvient à la retraite qui, elle même,  « risque » de durer plus de 30 ans. Long, quand les enfants sont partis, le projet d’une maison à soi comblé (ou définitivement impossible à combler), de même pour l’ambition d’une carrière ou la réalisation de toutes sortes de projets..

Les chiffres sont là, publiés par le Ministère de la justice. Les divorces après 60 ans ont doublé en 10 ans : ils étaient 14000 (13 941 exactement) en 2014 contre 8200 en 2004 et l’accélération est la plus grande en milieu urbain.

Les femmes ou les hommes, quels sont les initiateurs de la demande ? Les chiffres sont différemment interprétés par les différents médias qui ont commenté la publication du Ministère, ce qui est compréhensible, puisque dans les couples hommes et femmes n’ont le plus souvent pas exactement le même âge. Nous avons connaissance du chiffre global (précédemment cité) et du nombre de femmes ayant divorcé à plus de 60 ans (8824 en 2014, contre 4755 en 2004, toutes ayant probablement vu la période étudiée, divorcé d’un compagnon masculin..)

Un certain flou demeure donc sur le ou la demandeur(e). Demeurons-y pour ne pas avancer des explications faciles mais probablement fausses. Une certitude est que l’accélération est facilitée par l’arrivée à l’âge de la génération des Boomers (ex baby-boomers). Les plus âgés d’entre eux ont aujourd’hui 72 ans et cette accélération risque fort de se poursuivre avec la succession de promotions de près d’un million de naissances par an après 1945.

Là, les raisons sont simples. Ces boomers ont grandi dans une culture d’émancipation et d’autonomie. Les femmes ont été à l’origine d’une plus grande liberté sexuelle et d’un progrès dans leurs droits. Mais surtout, elles ont rejoint massivement les bancs de l’Université et surtout eu une profession qui fait que les couples aujourd’hui concernés étaient « bi-actifs », sont et seront « bi-retraités » et bénéficient d’une relative indépendance financière.

Ces faits, qui semblent plaider pour la facilitation du divorce, ont une autre conséquence : les divorces n’en sont que plus complexes sur le plan patrimonial. En dehors même des conséquences financières, l’attachement de l’une comme de l’autre (ce dernier étant masculin) au domicile et aux acquisitions échelonnées dans le cours de la vie, ne simplifie pas les discussions, ni la douleur des ruptures.

Les conséquences de ces divorces ne sont pas toujours heureuses. Certes les hommes, majoritairement, ont le séduisant projet de « refaire leur vie » (c’est souvent le motif du divorce). Ils sont aidés en cela par la différence d’agenda biologique entre les hommes et les femmes (ce qui risque cependant de ne pas durer autant qu’ils le croient avec la possibilité d’utilisation pour soi même des ovocytes congelés qui peut amener des femmes ménopausées récemment à utiliser bientôt le même type d’argument). Plus concrètement encore, ils sont encouragés par l’accès aux médicaments contrant les troubles de l’érection. Mais les femmes, en dehors de tout espoir ou non espoir d’enfant, manifestent désormais aussi ce désir d’une deuxième et d’une autre vie.

Les conséquences fâcheuses peuvent être de la part de l’un ou de l’autre, un état de dépression, de culpabilité ou de mépris de soi, lié au sentiment d’abandon et à la difficulté de vivre en solitude.

Cette difficulté est plus marquée chez les hommes, surtout quand cette solitude survient au delà de 70 ans. Si les femmes « s’accrochent » (c’est une des raisons de leur longévité), les hommes lâchent souvent prise, qu’il s’agisse d’une séparation non voulue ou d’un veuvage.

Femme ou homme, les troubles de la santé sont fréquents et nombreux, assez pour faire l’objet de nombreuses rubriques « santé » dans les magazines.

La fréquence des divorces, y compris des divorces tardifs, a été prise en considération par l’actuel Pape. Se marier pour 70 ans n’est pas gagné d’avance. La transition démographique liée à la longévité connait bien des faces cachées. En connaissance de cela, le Pape a assoupli la relation des divorcés à l’Eglise et leur a permis (sous condition, en particulier de l’attitude vis-à-vis des enfants après divorce) de rentrer dans le sein de l’Eglise. Oserais-je dire qu’une question qui n’est pas radicalement différente se pose aussi : faire voeu de chasteté pour 70 ans n’est sans doute pas « raisonnable », mais je me garde bien évidemment de toute prise de position sur le célibat des prêtres, non plus que sur les remous qui agitent en ce moment l’Eglise.

Se marier pour 70 ans, c’est long… A moins de le faire en 3 fois. Cette blague n’en est qu’à moitié une et nous avons tous connaissance d’amis ou de proches ayant choisi cette solution. Dans tous les cas, les divorces ne feront qu’augmenter en nombre, surtout au cours de ce quart de siècle de « papy-boom ». Cela mérite que le législateur y regarde, lui aussi, à trois fois.

 

 

 

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