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La Démocratie, « le pire des systèmes, à l’exception de tous les autres », est un art difficile. Nous le savons, nous le comprenons, nous en connaissons à la fois les limites et la grandeur.

Mais la République ! Cette grande fille de plus de deux cents ans d’âge, si bien codifiée, si rigoureuse dans sa définition comme dans son application, nous serions en droit de penser qu’il est simple de l’observer, d’en appliquer les règles en sachant qu’elles protègent chacun de nous.

A Bordeaux, la situation n’est pas simple. On parle souvent de « zones de non-droit » et bien sûr on pense d’abord aux banlieues ou aux territoires où une communauté a un rôle prépondérant et empêche l’application de la loi commune. C’est comme pour la délinquance, on pense d’abord aux loubards des cités, jamais à ceux des « cols blancs » et des places boursières.

Visite ce matin de Patrick Devedjian, nouveau Ministre de la relance (non seulement le ministre est nouveau mais le ministère). Il vient examiner ce matin plusieurs projets, parvenus à des degrés divers d’avancement, dont un bâtiment de la Benauge que je connais assez bien, pour l’avoir visité à l’appel de ses habitants « de pied en cave ».

J’ai alerté plusieurs fois à son sujet la société Coligny qui le gère. Les caves sont salptéreuses, misérables, lieu de congrès de tous les rats de la Bastide, les appartements humides, malsains, impossibles à maintenir en bon état malgré les efforts des locataires. On se doute que je me suis réjouie qu’un Ministre visite ce bâtiment et prête pour ma part à soutenir le dossier de sa démolition/reconstruction, ce qui semblait être l’objet de la ministérielle visite.

Nous arrivons donc sur les lieux. J’ai la surprise de voir mon éminente collègue, Chantal Bourragué, députée de la circonscription Le Bouscat-Bruges-Bordeaux nord, très affairée d’occuper l’espace entre le Maire et le Ministre. Je lui manifeste ma surprise de la voir à la Benauge. Elle a alors ce mot décisif « Moi, je soutiens le gouvernement ! ». Chère Chantal, la légitimitié d’une ou d’un député, n’est pas de soutenir le gouvernement, mais de représenter les habitants de son territoire.

Je tente d’expliquer au Ministre dans les quelques minutes du trajet l’état de ces barres d’HLM. Il semble disposé à écouter les données très simples que je veux lui communiquer. Jusque-là, hors la présence en premier plan de Chantal Bourragué, tout semble normal. Et je reste persuadée que les objectifs de la municipalité et les miens sont assez proches : elle, faire payer à l’Etat ce qu’elle aurait dû prendre à sa charge, moi améliorer la situation des habitants de la Benauge, quel que soit le payeur.

Le Maire s’emporte quand il voit des caméras se fixer sur notre petit groupe. Je dois le dire, je n’ai jamais vu acte si discourtois et inélégant que le sien à ce moment. Il me bouscule, se plante devant moi, de sa frèle mais plus haute que la mienne silhouette, et me rend invisible aux caméras. A ce moment, il se retourne vers Muriel Parcelier, adjointe de quartier, avec un mot de victoire « Moi seul, peut le faire ! »

Lui seul.. En effet, si j’avais été un élu masculin, j’aurais sans doute eu une réaction assez virile et physique. Mais cela n’est pas autorisé aux femmes, qui ne peuvent que constater l’inélégance de l’attitue et surtout le mépris d’un principe républicain fondamental : le député accueille les représentants du Gouvernement, et en sa qualité de représentant lui-même des habitants, lui exprime leurs besoins et leurs souhaits. S’il est tout fait normal que le Maire apporte son appui, celui-ci n’a en aucune façon vocation à l’écarter et moins encore à l’éliminer

Je passe sur d’autres réflexions d’AJ, faites à proximité de ma collaboratrice parlementaire que ses services n’ont pas présenté encore à son examen et qu’il n’avait pas identifiée. Imbibée des principes républicains dès son jeune âge, comme tout enfant normalement éduqué, elle est restée sidérée de ce qu’elle a entendu.

Pourquoi ? Pourquoi le Maire de Bordeaux, qui vient de se déclarer candidat aux élections législatives de 2012, ne sent-il pas qu’il déroge à sa fonction, à son ambition nationale, en méprisant ainsi le simple principe républicain qui nous unit et nous protège ?

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