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Fin de vie : de nouveaux droits pour chaque personne

Nous aurons à nous prononcer dans quelques jours sur la proposition de loi Claeys-Leonetti. Pour nous socialistes, elle répond à la demande des Français.

Nos concitoyens souhaitent mourir dans l’apaisement et conformément à leur volonté. Mettons sur cette évidence les mots que nous voulons, c’est bien vers elle que nous progressons pas à pas collectivement au gré des lois de 1999, 2002, 2005.

Car les Français ne souhaitent plus mourir dans les conditions actuelles tant elles sont parfois inacceptables. Oui le mal mourir est encore trop présent dans notre Pays.

Les conditions de fin de vie sont aujourd’hui radicalement différentes selon qu’une personne meurt à domicile, en EHPAD ou en établissement hospitalier. Elles le sont également en fonction des régions et au sein même des établissements de soins qui, selon les services, n’ont pas les mêmes pratiques et n’offrent donc pas, in fine, les mêmes qualités d’accompagnement.

L’uniformisation des pratiques et leur amélioration, doivent constituer les premières avancées du texte que nous soutenons au Parlement.

Avant tout, nous devons donc offrir l’accès égal pour tous aux soins palliatifs. Le chemin à parcourir est grand. Il commence par faire évoluer, pour l’ensemble des équipes de soins, leur rapport à la mort et donc à la culture palliative. C’est dans ce but que le Président de la République a annoncé, le 12 décembre dernier, la mise en place, dès la prochaine rentrée universitaire, d’un enseignement spécifique consacré à l’accompagnement des malades. Il sera obligatoire, commun à tous les étudiants et intégré à toutes les formations sanitaires, études de médecine comme diplômes d’état.

Il faut que cessent de s’opposer soins curatifs et palliatifs. Cela n’a pas de sens. Ils sont les deux faces d’une même médaille. La culture palliative doit irriguer tout le corps médical, quelle que soit sa spécialité. Le progrès de la médecine ne peut être seulement technique. Il faut désormais que cohabitent très en amont soins curatifs et palliatifs, que l’un prenne insensiblement le relais de l’autre pour accompagner le patient au bout de son chemin.

C’est avec ce dispositif que vient s’articuler la proposition de loi Claeys-Leonetti. Elle ouvre un droit à la sédation profonde et continue jusqu’au décès pour les personnes atteintes d’une affection grave et incurable dont le pronostic vital est engagé à court terme et qui ont la volonté d’éviter toute souffrance et de ne pas prolonger, selon eux, inutilement leur vie.

Cette même sédation sera mise en œuvre pour une personne souhaitant arrêter les traitements qui la maintiennent en vie ou lorsqu’une équipe médicale l’aura décidé dans le cadre du refus de l’obstination déraisonnable.

Ce droit à la sédation s’accompagnera du respect, jusqu’à la dernière heure, de l’autonomie de décision du patient. C’est en ce sens que les directives anticipées s’imposeront aux médecins si le patient n’est plus en état de s’exprimer.

Sur une question aussi intime, aussi complexe, aussi sensible que la fin de vie, le Président de la République a fait le choix du rassemblement le plus large. Avec raison, il a considéré qu’il ne fallait pas diviser la nation en privilégiant les marges, mais au contraire la réunir en avançant par son cœur. Le résultat est, nous le pensons, à la hauteur de l’enjeu.

Culture palliative développée, nombre d’unité de soins palliatifs augmenté, droit à la sédation, directives anticipées contraignantes, ces différentes avancées sont le fruit d’un dépassement et non d’un compromis. Comme toujours, le tout est ici supérieur à la somme des parties. Le cheminement intellectuel pratiqué par deux députés venus d’horizons politiques différents, a produit un texte qui dépasse les clivages habituels et constitue le socle majoritaire de notre Pays. Le Premier Ministre a d’ailleurs observé que cette proposition de loi portait la marque de l’équilibre souhaité et du progrès nécessaire.

Bien sûr, ce texte n’a pas vocation à épuiser le débat sur la fin de vie. Par nature, il se poursuivra au gré des évolutions de notre société. Il n’y a pas dans ce domaine de vérité. Il n’y a que des perceptions qui pour être différentes, n’en sont pas moins légitimes et respectables. Chacun d’entre nous, au-delà de ses convictions, souhaite d’abord et avant tout réduire les fractures qui aujourd’hui rendent inégales les conditions de fin de vie de nos concitoyens.

Avec la proposition de loi Claeys-Leonetti, nous avons collectivement la possibilité de faire progresser les conditions de fin de vie de milliers de nos concitoyens. Saisissons là. Les occasions manquées ne se retrouvent pas.

 

L’ensemble des signataires :  DELAUNAY Michèle ;  AYRAULT Jean-Marc ; LE ROUX Bruno ; CAMBADELIS Jean-Christophe ;  GUIGOU Elisabeth ; FILIPPETTI Aurélie ; FOURNEYRON Valérie ; GAROT Guillaume ; HAMON Benoît ; CUVILLIER Frédéric ; ADAM Patricia ; ALAUX Sylviane ; ALLOSSERY Jean-Pierre ; AYLAGAS Pierre ; BACHELAY Guillaume ; BAPT Gérard ; BARBIER Frédéric ; BARDY Serge ; BAYS Nicolas ; BEFFARA Jean-Marie ; BLAZY Jean-Pierre ; BLEIN Yves ; BLEUNVEN Jean-Luc ; BOISSERIE Daniel ; BORGEL Christophe ; BOUDIE Florent ; BRICOUT Jean-Louis ; BULTEAU Sylviane ; CALMETTE Alain ; CAPDEVIELLE Colette ; CARESCHE Christophe ; CARRILLON-COUVREUR Martine ; CATHALA Laurent ; CHAUVEAU Guy-Michel ; CLERGEAU Marie-Françoise ; COLAS Romain ; CRESTA Jacques ; DANIEL Yves ; DELAUNAY Florence ; DEMARTHE Pascal ; DESSUS Sophie ; DESTANS Jean Louis ; DOSIERE René ; DOUCET Sandrine ; DUBOIS Françoise ; DUMAS Françoise ; DUMAS William ; DURON Philippe ; ERHEL Corinne ; FAURE Alain ; FAURE Martine ; FOURAGE Hugues ; FRANCAIX Michel ; FRANQUEVILLE Christian ; FRUTEAU Jean-Claude ; GAGNAIRE Jean-Louis ; GLAVANY Jean ; GOASDOUE Yves ; GOUA Marc ; GRANDGUILLAUME Laurent ; GRELLIER Jean ; GRELIER Estelle ; GUITTET Chantal ; HABIB David ; HUREL Sandrine ; IMBERT Françoise ; ISSINDOU Michel ; JANQUIN Serge ; JUNG Armand ; KEMEL Philippe ; LACLAIS Bernadette ; LACUEY Conchita ; LANG Anne-Christine ; LANGLADE Colette ; LAUNAY Jean ; LE BORGN’ Pierre-Yves ; LE BOUILLONNEC Jean-Yves ; LE DAIN Anne-Yvonne ; LE DEAUT Jean-Yves ; LE HOUEROU Annie ; LE ROCH Jean-Pierre ; LEFEBVRE Dominique ; LEMASLE Patrick ; LEROY Arnaud ; LESAGE Michel ; LIGNIERES-CASSOU Martine ; LONCLE François ; LOUSTEAU Lucette ; MARCEL Marie-Lou ; MARSAC Jean-René ; MENARD Michel ; MESQUIDA Kléber ; MUET Pierre-Alain ; NAUCHE Philippe ; NIESON Nathalie ; ORPHE Monique ; PANE Luce ; PEIRO Germinal ; PELLOIS Hervé ; PINVILLE Martine ; PIRES-BEAUNE Christine ; POCHON Elisabeth ; POUZOL Michel ; PRAT Patrice ; PUEYO Joaquim ; QUERE Catherine ; RABIN Monique ; RAIMBOURG Dominique ; RECALDE Marie ; ROGEMONT Marcel ; ROUILLARD Gwendal ; ROUQUET René ; ROUSSET Alain ; SAID Boinali ; SANTAIS Béatrice ; SAVARY Gilles ; TERRASSE Pascal ; TOLMONT Sylvie ; VAILLANT Daniel ; VALTER Clotilde ; VAUZELLE Michel ; VERAN Olivier ; VERDIER Fabrice ; VLODY Jean-Jacques

Comments 6 commentaires

  1. 10/03/2015 at 06:42 Michel

    Cette position est très en deçà des attentes de nombreux français qui ne se cachent pas derrière leur petit doigt et sont clairement favorable à une fin de vie à l’image de ce qui est permis en Suisse, en Belgique, etc.(cf sondage IPSOS octobre 2014)
    On n’a pas fini de parler de la sédation profonde et continue , de sa durée et de son vécu par les personnes concernées.

  2. 10/03/2015 at 10:15 citoyen

    Michel, vous écrivez correctement: « en deçà des attentes de nombreux Français ». Mais « nombreux » ne veut pas dire « tous » et d’aussi « nombreux » Français sont sur une position opposée, ce qui signifie qu’on est en présence d’un dossier difficile comme c’est le cas pour beaucoup de questions sociétales où la conscience intime est concernée. Aller « plus loin » que le texte Claeys-Léonetti serait pour beaucoup de citoyens inacceptable et risquerait de provoquer des protestations massives. Il est plus prudent de rester prudent, d’avancer par petits pas que la société française peut assumer en attendant que les consciences permettent d’aller « plus loin ».

  3. 10/03/2015 at 23:39 le meut

    Avec des pas comme ça on serait encore en train de demander de totalement explorer la naissance sous X avant d’envisager une loi sur L’IVG. Finalement les parlementaire de gauche sont moins frileux dans l’opposition.
    Après-midi on peut mettre des règles majorité à 90% pour tous les textes.
    Vive les belges.

  4. 11/03/2015 at 08:40 Marcel

    Michèle Delaunay, JC Cambadélis et tous les signataires de cette tribune ne veulent pas de la liberté de certains de leurs compatriotes, celui de se suicider, et s’il le faut quand ils sont incapables de le faire eux-mêmes, qu’ils puissent demander qu’on les y aide.
    La sédation profonde et continue est le droit d’endormir un supplicié pour le faire mourrir de soif et de faim pendant de long jours.

    Fini le temps de donner les mêmes droits humains à tous sans retirer à chacun sa libre détermination. (mariage pour tous) Ainsi va le hollandaise et ses renonciations.

    La PEUR inspire cette loi, dont mêmes des signataires concèdent « Bien sûr, ce texte n’a pas vocation à épuiser le débat sur la fin de vie ».Ils auraient pu aussi bien dire « bien sûr » la liberté individuelle du citoyen malade et souffrant n’est pas garantie, et nous comptons sur de futures députés plus courageux que nous pour établir cette liberté. »

    Les avortements clandestins continueraient leurs ravages en France si une majorité des députés avaient autrefois manqué de courage et n’avaient pas suivi Simone Weil.

    Honte à ces députés socialistes sans courage, et aux députés d’autres bords qui vont voter avec eux une disposition inconstitutionnelle.

  5. 12/03/2015 at 18:36 Joël JOVET

    Bravo et merci aux 48 députés socialistes qui avaient voté le 24 11 2009 une loi demandant « une assistance médicalisée pour mourir dans la dignité » et qui ont signé votre appel, reniant ainsi leur vote et montrant le peu de conviction dont ils font preuve.
    Il faut y rajouter d’autres personnes qui avaient également voté cette loi et qui auront oeuvré pour qu’une loi identique ne soit pas votée : F. Hollande, M. Valls, M. Touraine et bien sûr A. Claeys.
    Je n’aurai pas pu imaginer, en 2011 et 2012 lorsque je faisais campagne pour F. Hollande et pour le PS que tant de personnes seraient capables d’un tel reniement qui, au final, privera les français qui sont bien plus en avance que ces ringards d’une liberté de plus.
    C’est minable.

  6. 13/03/2015 at 12:29 François Decaillet

    J’accuse déception de cette tribune. ….Ce texte de loi soumis à l’assemblee fait sans doute avancer les choses quelque part mais il reste très en deçà de ce que personnellement, tant en tant qu’individu qu’en tant que médecin, j’attendais de nos législateurs et il ne règlera qu’une partie des problèmes ….en en créant malheureusement bien d’autres, douloureux. Comme le montre l’histoire de mon épouse récemment décédée en Belgique, il peut venir un temps où partir sans tarder est le seul moyen de rester digne au bout du bout de sa route. Profondément déçu de votre frilosité et des reniements de certains, si je dois un jour mettre dans l’urne un bulletin en faveur d’un candidat socialiste qui n’aurait pas voté l’amendement 560 de Mr Touraine, je le ferais faute de mieux et en me pinçant un peu le nez.

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