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L’affaire Saint Eloi-Saint Projet est un long écheveau dont nous déroulons chaque jour un nouveau fil. Sa moindre gravité n’est pas l’enseignement donné dans les écoles privées hors contrat, leur contrôle mais aussi leur financement.

De manière subreptice, la Fondation pour l’Ecole qui finance le cours Saint Projet a été élevée à la « reconnaissance d’utilité publique ». Il s’agit d’une machine à défiscalisation, dont l’unique objet est le financement de l’Ecole privée hors contrat, dont la loi stipule que l’Etat ne doit pas la financer. La défiscalisation correspond de facto à un financement public.

Petite parenthèse : que les dons à la ligue contre le cancer soient défiscalisés, je l’approuve ; que l’argent des donateurs aillent à des écoles dont beaucoup sont intégristes et sectaires, dispensent un enseignement contraire aux principes républicains, nous devons le condamner de manière radicale.

Qu’est-ce que la « reconnaissance d’utilité publique » ? et de quoi s’agit-il ici ? Non d’intéret mais de danger public. Non d’intérêts publics mais d’intérêts strictement privés

lire en suite le texte de ma question au Ministre de l’intérieur

Question écrite au Ministre de l’intérieur

« Mme Michèle Delaunay interroge avec gravité M. le Ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer et des Collectivités territoriales sur les justifications de la reconnaissance d’utilité publique de la « Fondation pour l’Ecole » ; celle-ci a été obtenue par décret issu de son Ministère en date du 18 mars 2008, jour même où est paru le décret relatif à la composition du gouvernement de François Fillon.

Par ce décret, l’Etat autorise la défiscalisation, à hauteur de 75 %, pour les assujettis à l’ISF des dons à cette fondation, jusqu’à un plafond de 50 000 € par an. Une vaste campagne de publicité a d’ailleurs suivi la déclaration d’utilité publique, ainsi que dans la rubrique « Créer son école » du site de la fondation, la publication d’un vade mecum de défiscalisation, dont les meilleures pages ne sont cependant accessibles qu’après approbation de l’identité des personnes intéressées. Cette défiscalisation au titre de l’ISF vient s’ajouter à la défiscalisation, à hauteur de 60 % pour les particuliers et 66% pour les entreprises, accordée à tous les donateurs à un établissement bénéficiant de la même reconnaissance.

La Fondation pour l’Ecole se définit elle-même comme « l’outil le plus performant pour lever des fonds dans des conditions fiscalement avantageuses ».

En cette période où notre pays affronte une dette galopante et où le Premier ministre déclare le gel des dépenses de l’Etat, il apparaît fort peu opportun d’en réduire les recettes en consentant cette sorte de cadeaux fiscaux. Rappelons aussi que mars 2008, date du décret, se situait au cœur de la période que le gouvernement qualifiait de « la plus grave de tous les temps ».

Le Ministre de l’Intérieur qui en a approuvé les statuts, n’ignore pas les buts de l’association : favoriser la création des écoles privées hors contrat et soutenir l’éducation à domicile qui échappe à toute forme de contrôle.

« L’établissement dit Fondation pour l’Ecole, fondé en 2007, a pour objet de susciter un renouveau éducatif en France en concourant à l’essor d’établissements scolaires libres, ne bénéficiant pas, en l’état actuel du droit, du soutien financier direct de l’Etat. L’action de la Fondation concerne les établissements d’enseignement (écoles, collèges, lycées généraux,spécialisés, techniques ou professionnels) situés en France, qui ne sont pas liés à l’Etat par un contrat. »

« Ces nouvelles écoles sont des indépendantes qui ne sont pas liées par contrat avec l’Etat. Ce sont des établissements entièrement libres qui décident de l’instruction et de l’éducation qu’ils transmettent au regard des seuls besoins de leurs élèves. Ils choisissent en toute responsabilité leurs méthodes, leurs buts, leurs manuels… »

Dans une période où les moyens de l’école publique, républicaine et gratuite sont drastiquement restreints, réduisant de ce fait sa capacité à assurer à tous, sans distinction d’origines, un enseignement de qualité selon le principe de l’égalité des chances, il paraît extrêmement choquant de voir l’Etat financer de facto l’école privée hors contrat.

La Fondation pour l’Ecole ne fait à aucun moment, dans ses statuts, référence à l’enseignement catholique. Cependant, force est de constater que la grande majorité des établissements qu’elle a « sélectionnés », qu’elle soutient financièrement et qu’elle recommande sont des établissements catholiques, dont certains ouvertement liés à la mouvance intégriste, comme c’est le cas en Gironde pour les trois établissements gérés par l’Institut du Bon Pasteur. Un examen attentif n’a permis d’identifier aucun établissement se réclamant des cultes non chrétiens. Ce financement de facto de l’enseignement privé hors contrat vient en contradiction de la laïcité, telle que définie par la loi de 1905, qui respecte tous les cultes mais n’en favorise aucun, et également de la loi Debré du 31 décembre 1959 ayant amené à la définition même de l’enseignement privé hors contrat.

Concernant l’enseignement privé du second degré sous contrats et hors contrat, le Code de l’Education précise par ailleurs dans son article L 151-4 que : « Les établissements d’enseignement général du second degré privés peuvent obtenir des communes, des départements, des réglons ou de l’État des locaux et une subvention, sans que cette subvention puisse excéder le dixième des dépenses annuelles de l’établissement. » Les montants correspondant à la défiscalisation par l’Etat vont bien au-delà du seuil de 10%.

Il est à noter de manière incidente, ce qui fera l’objet d’une nouvelle question, que le 16 février dernier, le gouvernement, en la personne du Ministre de l’Intérieur, a accordé cette même reconnaissance d’utilité publique et la défiscalisation afférente à la Fondation Saint-Matthieu qui collecte des dons pour l’immobilier de l’Enseignement catholique.

Alors que, suite à un contrôle pédagogique, le recteur de l’académie de Bordeaux vient de conclure qu’un des établissements recommandés par la Fondation pour l’Ecole fournit aux élèves un enseignement ne satisfaisant pas aux exigences du Code de l’éducation pour ce type d’établissement du fait d’une « carence d’enseignement des sciences de la vie et d’un enseignement de l’histoire vu au travers d’un prisme religieux , ne permettant pas de former l’esprit critique des élèves», il apparaît comme extrêmement urgent de prendre la mesure du danger – et non de l’intérêt – public de la Fondation qui le soutient et d’autres fondations bénéficiant des mêmes avantages fiscaux.

Mme Michèle Delaunay demande à M. le Ministre de mettre rapidement fin à cette reconnaissance d’utilité publique.

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