m

Allocation journalière d’accompagnement d’une personne en fin de vie : étape avant congé filial ?

Intervention de Michèle Delaunay en discussion générale, le 16 février 2010

Nous ne pouvons que nous réjouir qu’après douze longs mois une proposition de loi, fruit de la collaboration de députés de gauche et de droite, parvienne à terme.

Pendant ces douze mois, combien de personnes ont atteint la fin de leur vie avec une moindre présence à côté d’eux du fait des contraintes matérielles de celui ou celle qui aurait pu les accompagner. Si nous pouvons avoir une idée du nombre de ceux qui sont susceptibles de bénéficier de cette allocation, nous ne pouvons aller plus loin, mais ne seraient-ils qu’une poignée à avoir été privés de ce secours, nous le regrettons.

Je ne suis pas un docteur, tant pis, de ne retenir que ce qui ne nous satisfait pas, mais quel dommage d’avoir entaché ce texte tissé d’humanité de la brutalité d’interrompre l’allocation au jour même du décès, ne serait-ce que parce que bien souvent c’est dans les jours juste suivants que bien des difficultés doivent être surmontées.

Aucun d’entre nous n’a voulu risquer de retarder encore ce texte mais nous espérons que ceci pourra être assoupli et que cette proposition de loi n’est en fait qu’un début.

Un regret aussi concernant la non validité du dispositif pour les personnes hospitalisées.

Les plus nombreuses et de très loin puisque l’on meurt à l’hôpital dans plus de trois quarts des cas, souvent à distance de son domicile et toujours dans ce cas loin de son cadre familier, dans le décor austère d’une chambre ayant pour meubles principalement des équipements médicaux peu réconfortants en eux mêmes.

N’est-ce pas dans ces conditions qu’une présence familière est la plus utile ? Elle est souhaitée par les soignants et les médecins et il faut tout faire pour que ne soient pas seuls à en bénéficier ceux qui ont un large entourage familial ou un compagnon sans contraintes professionnelles ou matérielles.

Tout cela n’est pas pour réduire la valeur de ce texte. Nous y avons souscrit lors de sa présentation, nous l’appuyons aujourd’hui sans autre réserve, mais surtout avec l’espoir qu’il ne constitue qu’un premier pas.

Je pense particulièrement aux âgés. Nous consolidons aujourd’hui les solidarités, et en particulier les solidarités familiales. A l’horizon de ce texte nous devons situer la mise en symétrie des solidarités à l’égard des enfants et à l’égard des parents.

Notre société a changé. Ses équilibres se déplacent vers la deuxième moitié de la vie, grâce à l’allongement de l’espérance de vie. Tous, nous devons être les artisans du défi qu’il constitue.

Pour ma part je pense que nous devons réfléchir à la mise en symétrie des possibilités offertes aux parents d’enfants malades et à celles permises aux enfants de vieux parents souvent plus malades encore.

Les absences parentales de 3 à 5 jours suivant l’age de l’enfant et le niveau du parent, le congé de présence parentale de 310 jours constituent des bases de réflexion.

Ce qu’un salarié peut et doit faire à l’égard de son enfant petit, ne le doit-il pas à l’égard de son parent âgé, malade et/ou en fin de vie ?

Ne devons-nous pas réfléchir dans cette perspective à un congé de présence filiale, définissant les possibilités d’absence, l’éventualité d’allocations, pour ceux qui se consacrent un temps à leurs obligations envers les parents. Notons qu’à 80% dans les deux cas ce sont, à ce jour, les femmes qui remplissent cette double obligation, quelquefois dans des conditions professionnellement périlleuses et émotionnellement douloureuses.

C’est un bouleversement radical : donner aux plus vieux les mêmes droits et la même valeur qu’aux plus jeunes. A cela, dans la perspective d’humanité que nous partageons avec le texte que nous allons voter tout à l’heure à l’unanimité, je vous engage et je vous invite à travailler tous ensemble.

Service civique : Intervention dans l’Hémicycle, le 4 février 2010

Je me réjouis aujourd’hui que le texte qui vient à notre examen soit issu d’une proposition de loi de la gauche et je crois que ce point mérite d’être souligné

Ce projet correspond à une véritable nécessité, après la suppression irréfléchie du service national en 2007, et la très insuffisante réussite du service civil, ne comptant que 3000 jeunes engagés alors que l’Allemagne en réunit 200 000.

Nous ferons de cette nécessité une authentique avancée à trois conditions :

Information et explication suffisante de la nature et des enjeux du service civique

Valorisation et en particulier valorisation universitaire

Statut européen

1- Le service civil a souffert d’un réel déficit d’information et de visibilité, de la lourdeur et de l’opacité des procédures, aussi bien pour les volontaires que pour les structures d’accueil.__

De nombreux jeunes – je pense notamment aux jeunes de quartiers fragilisés comme le Grand Parc à Bordeaux – passent à côté d’une opportunité et d’une aventure personnelle qui peut être, sinon déterminante, du moins un bon tremplin pour la suite de leur vie citoyenne, sociale et professionnelle.

Aujourd’hui il ne s’agit donc pas simplement de faire, Monsieur le Haut Commissaire, mais de faire savoir. Pas aux médias, aux jeunes concernés.

Pour cela il faut compter sur le vecteur précieux que constituent les associations agréées d’éducation populaire. Je pense à toutes les antennes de la Jeunesse Ouvrière, d’Unis-cité bien entendu, aux MJC et au CNAJEP qui les rassemble. Or les dernières lois de finances n’ont pas démontré un soutien suffisant de l’Etat aux politiques de jeunesse et d’éducation populaire, pratiquant au contraire l’amputation de 15 % en 2009 des crédits dédiés aux conventions avec les associations de jeunesse et d’éducation populaire. La mise en oeuvre du service civique va nécessiter un sérieux changement d’orientation.

Expliquer la nature et les enjeux du service civique, bien montrer qu’il ne s’agit en aucun cas d’un emploi au rabais mais bien d’un service et d’un service civique – et pas seulement civil – destiné à réaffirmer dans la pratique les valeurs républicaines de solidarité et de partage. C’est déjà le sens qu’ont su donner de nombreux volontaires à leurs projets au niveau local : Unis-cité à Bordeaux a ainsi mobilisé 24 volontaires sur un projet nommé « Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) et lien intergénérationnel » que j’ai choisi de parraîner au sein de 3 maisons de retraites.

2- Pour toucher un public aussi large que possible, il faudra aussi garantir à chaque jeune, indépendamment de son niveau de diplôme, la valorisation de cette expérience sur son parcours. Nous sommes dans un système compétitif, donnons aux jeunes des armes d’un nouveau genre : cela valorisera leur carrière, cela valorisera surtout le sens d’un engagement civique.

Depuis début janvier, les étudiants de l’Ecole de management de Bordeaux peuvent effectuer un service civique de 6 à 9 mois, pris en compte dans leur scolarité. Un accord a été signé avec l’association Unis-Cité. Suivis par un tuteur, les volontaires participent à un projet de lutte contre l’exclusion, les discriminations, à une mission de solidarité entre générations ou de protection de l’environnement. Voilà un bon exemple. La solidarité est désormais pour eux à tous les sens du terme une unité de valeur.

Certaines universités ou écoles sont néanmoins frileuses. Souvent l’université, au delà de blocages psychologiques, n’a pas les moyens nécessaires de vérifier si l’intervention du jeune volontaire est sérieuse et si elle peut faire l’objet d’une valorisation sur le cursus. La question des moyens alloués par l’Etat aux Universités pour qu’elles puissent le faire et intégrer en pleine confiance le dispositif se pose maintenant plus que jamais.

Valoriser le service civique en allant à la rencontre des écoles comme vous le faîtes, Monsieur le Haut-Commissaire, est une bonne chose, mais il ne faudrait pas, là encore, que les universités soient laissées sur le bas côté. Le futur « service learning », déjà expérimenté à l’Essec et consistant à faire du service civique un outil d’enseignement avec une partie cours et une partie pratique, ne doit pas rester le privilège des seules écoles privées ou semi-privées.

Quels moyens serez-vous prêts à consacrer à la mise en oeuvre sur l’ensemble des campus universitaires du service civique ?

3 – Donner du corps à la dimension européenne du service civique

Là subsiste une réelle faiblesse du système que vous nous proposez

L’exposé des motifs mentionne la dimension européenne que pourrait avoir le service civique mais cette intention ne se traduit par aucune proposition concrète dans le texte. Nous pourrions pourtant aisément nous inspirer de modèles mis en place dans d’autres pays européens et qui sont des modèles de réussite. Le service volontaire italien par exemple parvient à mélanger des jeunes de toutes classes sociales : il serait pertinent de travailler avec leurs équipes.

Il faudrait également penser à créer un statut européen pour le service civique, qui permettrait une plus grande mobilité pour chaque jeune, quel que soit sa formation : la réussite des programmes tels que les double-cursus, Erasmus, Leonardo, les VIE et les VIA doit nous y inciter. Cet aspect ne peut être oublié par le service civique au risque d’en faire un projet figé à l’heure où nous souhaitons favoriser la montée d’une citoyenneté européenne, la maîtrise des langues et la connaissance des cultures étrangères.

Alors que Bordeaux est une métropole connue de nos partenaires européens, il est impensable qu’en dehors d’un cursus Bac+5 à l’IEP ou en école de management, les jeunes Bordelais ne puissent avoir l’opportunité de partir et d’acquérir une expérience à l’étranger s’ils n’ont pas les moyens financiers individuels de le faire.

Il faut offrir aux structures d’accueil l’opportunité de développer des partenariats internationaux et de proposer des projets d’intérêt public européen mais aussi élargis à la coopération décentralisée.

Ce projet de service civique, c’est avant tout l’opportunité de renforcer la cohésion sociale via l’engagement, de donner plus de corps à nos échanges européens, et par là même plus de chair et d’âme à la citoyenneté de demain : saisissons comme il se doit cette occasion.

Port de Bordeaux : une réponse en tous points insatisfaisante

La réponse donnée ce midi par M. le Secrétaire d’Etat BUSSEREAU, exprimée par la voix de Mme JOUANNO, est en tous points insatisfaisante au regard des attentes des Bordelais.

La question orale de Michèle DELAUNAY relative à l’avenir du port exigeait des preuves concrètes de l’engagement gouvernemental pour sa relance et ses investissements fondamentaux.

Le Secrétaire d’Etat a fait état d’une enveloppe exceptionnelle de 100 000 euros et d’une première dotation de 5 millions d’euros, ceux-ci bien éloignés des 14 millions demandés par le port.

Ce montant très insuffisant est proposé au prétexte que le gouvernement attend la mise en place d’un projet stratégique pour engager un financement supplémentaire. Ce prétexte n’est pas recevable puisque les 14 millions demandés par le port l’ont été pour des investissements fondamentaux tels l’entretien des accès maritimes et les réaménagements des passes, qui sont conditionnels de tout choix stratégique et indépendants de sa nature.

D’autre part, M. BUSSERAU a fait état de la mise en place d’un comité stratégique concernant le seul site du Verdon alors que c’est bien d’un projet global impliquant les différents sites dont le port a besoin.

Michèle DELAUNAY s’est élevée contre ce « saucisonnage » qui affaiblit la force potentielle du projet et a demandé à l’issue de la séance que l’ensemble des élus ainsi que les représentants de l’Union maritime soient associés à ce comité stratégique. Elle confirme cette demande par courrier au Secrétaire d’Etat

M. BUSSEREAU a également évoqué dans sa réponse les 12 millions versés au titre du dragage alors que cette charge relève par la loi des obligations de l’Etat et que les sommes ainsi allouées ne doivent en aucun cas être portées au compte du Plan de relance.

Plus que jamais, Michèle Delaunay est mobilisée aux côtés des responsables et du personnel portuaire pour obtenir que Bordeaux reçoive sa part légitime de l’enveloppe de 174 millions consacrée au plan de relance portuaire.

Intervention sur le travail le dimanche, hier soir dans l’Hémicycle

Il y a une sorte de non sens, une incohérence parfaite à prétendre avoir compris les enjeux écologiques et le message des Français lors du scrutin européen et à s’arc-bouter, avec une impatience infantile de parvenir à ses fins, sur l’extension du commerce du dimanche.

Car, et je veux commencer par là, c’est bien d’ouvrir les commerces qu’il s’agit, et cette confusion implicite entre le travail et l’acte de vendre ou d’acheter est pour beaucoup d’entre nous une première raison de gêne, de malaise, voire même de révolte, car travailler et vendre, travailler et commercer, ne sont pas synonymes…pour l’instant, mais nous sommes sans doute en bonne voie pour y parvenir.

Je reviens à ce non sens dont je voudrais vous faire partager le refus. Nous entendons dans l’atmosphère de mercato de ces dernières semaines que le ministère de l’écologie va être renforcé, que l’on nous prépare quelque nouvel éclat. Monsieur Borloo lui même nous dit qu’il veut donner à son ministère un caractère social et sociétal, pour tout dire qu’il veut qu’il soit un ministère du développement durable, mais alors comment réagit-il en Cnseil des ministres ? S’il devait voter, voterait-il ce texte ?

Nous entendons de la bouche de tous ceux qui pensent un peu que nous devons revenir à une société moins matérialiste, moins consommatrice, qui promeut des valeurs d’équilibre, de culture, de liens entre les personnes.

Et ici une fois encore nous faisons le contraire.

Tout dans ce qui définit le développement durable est contradictoire à ce texte :

1- Le développent durable, permettez-moi de la citer en premier lieu, c’est d’abord la santé durable ; c’est une culture de prévention, une culture de la santé comme instrument d’autonomie.

Le Président de la République lui-même affirmait le 18 septembre dernier qu’il voulait passer d’une culture curative à une culture de la prévention.

Nous faisons avec ce texte exactement le contraire. Selon l’Agence européenne, la probabilité que surviennent des problèmes de maladie ou d’absentéisme est 1,3 fois plus grande dans les entreprises où l’on travaille le samedi ou le dimanche que dans les entreprises fermées le week-end.

Le travail du dimanche qu’il soit occasionnel ou permanent est tout simplement contre -productif. Les études chronobiologiques montrent qu’il va à l’encontre du cycle régulier qui fait alterner activité et repos.

2- C’est l’inéluctable augmentation du travail subi, du travail que l’on ne fait pas sien.

D’abord parce que le volontariat que vous évoquez est un leurre.

Qui dans la période que nous connaissons actuellement,

Qui sous la pression d’une grande enseigne,

Qui pourra dire qu’il refuse de travailler le dimanche ?

Ensuite parce que vendre à des gens qui sont eux-mêmes en congé n’aide pas à faire sien un travail. La gratification morale du travail soignant n’existe pas ici.

3 – C’est l’inéluctable mort à terme du commerce de proximité et du commerce indépendant.

Un emploi créé en grande surface, c’est trois emplois supprimés dans le petit commerce.

C’est la mise à mal de l’ensemble du secteur associatif, culturel, sportif.

4- C’est une dépense environnementale inutile

Ce sont des voitures sur les routes, des magasins que l’on éclaire, que l’on chauffe un jour de plus par semaine.

5- Enfin, c’est un manque absolu de bon sens qui est malgré son air un peu vieux jeu, la base de l’écologie.

Augmentera-t-on d’un euro le pouvoir d’achat ?

Consommera-t-on plus et surtout consommera-t-on mieux ?

6- Et puis c’est aussi une escroquerie quand tous les maires pourront déclarer leur commune touristique

Quand il y aura deux régimes de salaires?

M. le Ministre, je vous interroge sur le rôle du politique aujourd’hui :

Est-il donc de modifier la loi en réaction à des situations illégales pour qu’elles deviennent légales, et de mettre ainsi le doigt dans un

engrenage infernal,

n’est-il pas plutôt de proposer une organisation de la société en fonction du bien commun ?

Le bien commun n’est-il pas celui du plus grand nombre, celui des familles, celui des enfants ?

Le progrès n’est-il pas l’augmentation du nombre d’emplois et des salaires plutôt que du nombre de jours travaillés par salarié ?

Cette proposition de loi, c’est, contre les salariés, la technique toujours inefficace de l’appât empoisonné et de la sanction pour qui le refuse.

Aujourd’hui entendez les Français et retirez ce texte.

Il s’agit là de bon sens, simplement de bon sens.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel