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En 2010, le tabac a causé la mort de 28 700 personnes en France. Première cause de cancer évitable, le tabac tue 7 fois plus que la route et son coût social représente 10 milliards d’euros par an. Alors que le gouvernement multiplie les annonces et les mesures pour diminuer la vitesse sur la route, sa politique en matière de lutte contre le tabac est loin d’être à la hauteur de cet enjeu majeur de santé publique.

Michèle Delaunay propose que la France s’engage dans un projet ambitieux : « sortir du tabac en 2030 » (lire son billet sur la page blog). Elle propose en effet que nous nous engagions dans une véritable politique d’éradication du tabac, non par la mise en place d’une politique de prohibition dont on sait qu’elle ne serait pas viable, mais par la voie de la prévention et de l’information et en contrecarrant le lobby de l’industrie du tabac, qui cherche à influencer les politiques de lutte contre le tabac à tous les niveaux.

A cet effet, elle adresse 4 questions écrites au gouvernement :

Question n°1 : « Sortir du tabac en 2030 »

« Mme Michèle Delaunay attire l’attention de M. le Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé sur la nécessité de proposer aux Français une ambition pour la réduction du tabagisme et de ses méfaits.

Une ambition collective, clairement proposée et répétée à l’occasion de campagnes d’information, a l’intérêt multiple de susciter l’attention, de mobiliser les divers partenaires, d’organiser leurs actions respectives et de les mettre en convergence ainsi que d’avoir un impact sur les comportements individuels

C’est dans cette perspective que Mme Michèle Delaunay propose à M. le Ministre d’engager une nouvelle action action : « sortir du tabac en 2030 ». Ce laps de temps permettra d’envisager tous les aspect de la production et de la consommation du tabac, et de leur réduction : mise en place de cultures de substitution, limitation des importations, mise en place de synergies et d’accords avec les autres pays européens, politique d’éducation, en particulier en direction de la jeunesse, …

Ce projet demande de réunir les différents acteurs de la filière de production, de transformation et de vente, ainsi que les associations impliquées dans la prévention et la réduction des risques tabagiques, les médecins et les chercheurs. Il doit définir les étapes permettant d’aboutir à l’objectif non pas d’interdiction et de prohibition, mais de diminution de la consommation du tabac en France, jusqu’à son extinction.

Ce projet, pour être ambitieux, n’en est pas moins réaliste : en s’engageant pleinement dans la lutte contre le tabac, des pays tels que le Canada et l’Australie ont pu faire baisser leurs taux de prévalence tabagique au dessous des objectifs fixés par l’Organisation Mondiale de la Santé. La Finlande est allée plus loin, en votant un plan quinquennal de lutte contre le tabac dont l’objectif est d’éradiquer la consommation de tabac d’ici 2015, en combattant toute forme de publicité et en durcissant progressivement les conditions d’achat et de vente. »

Question n°2 : Vers une prise en charge à 100% du sevrage tabagique

« Mme Michèle Delaunay attire l’attention de M. le Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé sur l’insuffisance de la prise en charge du sevrage tabagique.

D’après l’Institut National d’Education et de Prévention pour la Santé (INPES), la durée moyenne d’un traitement substitutif nicotinique est d’environ trois mois, ce qui représente un coût moyen de 150 euros, sachant que ce traitement peut durer jusqu’à six mois selon les personnes et leur degré de dépendance.

Dans le cadre du premier Plan Cancer 2003 – 2008, l’assurance Maladie a mis en place en 2007 un système de prise en charge partielle des substituts nicotiniques, pour un montant maximum de 50 euros par an et par bénéficiaire et pour un certain nombre de produits uniquement délivrés en pharmacie de ville. Cette prise en charge est donc insuffisante pour un sevrage tabagique de durée moyenne.

Le 2ème Plan cancer 2009 – 2013 avait prévu de renforcer la politique l’aide au sevrage tabagique notamment en faveur des femmes enceintes et des bénéficiaires de la Couverture Maladie Universelle (CMU). Ce n’est qu’en mai 2011 que le gouvernement a finalement annoncé que les femmes enceintes bénéficieraient bien d’une prise en charge à hauteur de 150 euros, dispositif qui ne sera finalement pas étendu aux bénéficiaires de la CMU, un public pourtant particulièrement concerné d’après les études sur le tabagisme en France.

Le tabac a provoqué 28 700 décès en France en 2010 et il constitue le premier facteur évitable de cancer. On estime son coût social (dépenses de santé, campagnes de prévention, perte de revenus et de production, etc.) à 10 milliards d’euro par an. Parallèlement, l’arrêt du tabac provoque des bénéficies immédiats dans le cas des maladies cardio-vasculaires et réduit les risques de maladies non transmissibles (cancers, maladies respiratoires chroniques et cardio-vasculaires).

Dans ces conditions, il paraît évident que la prise en charge à 100% du sevrage tabagique, recommandée par la Haute Autorité de Santé et l’Organisation Mondiale de la Santé et qui aurait de forts effets incitatifs, permettrait une baisse de la prévalence tabagique et donc, à terme, une diminution du coût social du tabac.

Mme Michèle Delaunay invite donc le Gouvernement à tenir ses engagements à destination des bénéficiaires de la CMU dans un premier temps, puis à étendre la prise en charge renforcée du sevrage à tous les fumeurs. »

Question n°3 : L’insuffisance des mesures d’augmentation des prix du tabac

« Mme Michèle Delaunay attire l’attention de M. le Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé sur l’insuffisance des mesures d’augmentation du prix du tabac prises par le gouvernement dans le cadre du second Plan cancer 2009-2013.

L’augmentation du prix du tabac est unanimement reconnue comme un moyen efficace de réduction de la consommation. Cette pratique est d’ailleurs inscrite dans l’article 6 de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte anti-tabac, signée et ratifiée par la France aux côtés de 171 autres Etats. Selon la Banque Mondiale, une augmentation de 10% du prix du tabac entraîne en moyenne une baisse de 4% de la consommation.

Le premier Plan cancer 2003-2008 avait pleinement intégré cette mesure : le prix du tabac a subi des augmentations successives de 8% en janvier 2003, de 18% en octobre 2003 et de 9% en janvier 2004. La dernière augmentation est intervenue en novembre 2009, faisant passer le prix du paquet le plus vendu de 5,30 euros à 5,60 euros. Suite aux augmentations de prix de 2003 à 2004, les ventes de cigarettes manufacturées en 2004 ont été inférieures d’un tiers à celles de 2002 et la prévalence du tabagisme, qui était de 35% en 2000, est tombée à 30% en 2005.

Or le second Plan cancer 2009-2013 marque un ralentissement flagrant dans la lutte contre le tabac : depuis 2009, le gouvernement a décrété trois augmentations de prix, dont aucune n’a dépassé les 6%, soit, d’après l’Alliance contre le tabac, le taux maximum au dessous duquel l’augmentation du prix du tabac n’a pas d’impact sur la consommation. Ces mesures fiscales n’ont donc eu d’autre résultat que de peser sur le pouvoir d’achat des fumeurs, dont on sait qu’ils constituent notamment près de la moitié des chômeurs. Les chiffres parlent d’eux même : entre 2005 et 2010, la prévalence du tabac dans la population française a augmenté de 2 points.

Mme Michèle Delaunay invite donc le Gouvernement à agir en cohérence avec ses déclarations publiques successives condamnant le tabac et à intensifier la lutte contre ce poison, véritable fléau pour la santé publique. »

Question n°4 : Une campagne de photos « choc » mal conçue et mal exécutée

« Mme Michèle Delaunay attire l’attention de M. le Ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé sur l’insuffisance de la campagne « choc » lancée sur les paquets de cigarettes par le gouvernement en avril dernier pour lutter contre le tabac.

Plusieurs voix parmi les addictologues et les psychiatres rappellent qu’une campagne basée sur la peur et le dégoût atteint rapidement ses limites lorsqu’elle ne s’accompagne pas d’une information constructive permettant au fumeur de changer son comportement. La diffusion d’images chocs et de messages uniquement négatifs peut susciter des mécanismes de défense, tels que le déni, l’évitement, voire même une tentation de rébellion, particulièrement chez les jeunes, chez qui cette campagne pourrait avoir les effets inverses de ceux attendus.

Les Canadiens l’ont bien compris, et ont assorti leur campagne d’images de messages positifs et de conseils constructifs. Rappelons qu’au Canada la prévalence du tabac est de 20% parmi les 12-75 ans, quand elle est de 33% en France.

Or sur les 14 messages de la campagne française, un seul à pour but d’aider concrètement le fumeur à arrêter. Alors que le projet initial prévoyait d’inclure dans les paquets une note explicative contenant des conseils et des contacts utiles, la campagne qui vient de démarrer se contente du minimum en matière d’information.

De la même manière, la taille des avertissements et des photos a été maintenue à son minimum, quand en Australie le paquet est entièrement recouvert d’avertissements et de messages de prévention. La législation autralienne a ainsi privé l’industrie du tabac de la possibilité d’utiliser le paquet comme support publicitaire, puisque celui-ci est totalement banalisé et ne porte même plus le logo de la marque. Rappelons également qu’en France, les photos ne figurent que sur un côté paquet, l’envers, et sont donc invisibles sur les présentoirs des buralistes.

Mme Michèle Delaunay rappelle à M. le Ministre que la prévalence du tabac au sein de la population française a augmenté de 2 points entre 2000 et 2010, et que dans ces conditions les pouvoirs publics ne sauraient se contenter de demi-mesures. Elle lui demande donc de revoir les modalités de cette campagne d’images et d’intensifier la lutte contre le tabac de manière générale. »

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