Le mystère de la disparition d'une loi votée
le samedi 29 octobre 2011 à 13h21
En février 2008, la députée Valérie Boyer, responsable des questions de santé à l'ump, a présenté une proposition de loi pour interdire les sites incitant à l'anorexie. J'ai été seule de mon groupe à voter cette proposition de loi, avec l'accord de notre Président de groupe qui a considéré que je pouvais parfaitement m'exprimer en ma qualité de médecin.
La loi a été votée à l'Assemblée et .. n'est jamais parvenue au Sénat. Ou bien y a été ensevelie.
Devant ce mystère, que la pression des lobbies expliquait difficilement (quel lobby ?), j'ai interrogé en avril 2011 le Ministre de la Santé en éxercice. Aucune réponse. Et je me propose de retourner à la charge.
Pendant ce temps, les sites continuent de prospérer. Ces sites sont dangereux. Ils incitent à des comportements qui précipitent ce qui n'était qu'un désir excessif de minceur dans une maladie obsessionnelle, continuellement auto-aggravée, mortelle dans bien des cas et détruisant durablement, voire définitivement, la vie de nombreux malades.
Pourquoi rien n'est-il fait ? L'hébergeur des sites est localisé en France et accessible à nos lois. Jusqu'alors, silence dans la presse, malgré la communication de mon interrogation au Ministre. Ce n'est qu'aujourd'hui que le média en ligne Rue 89 déterre le sujet. Merci à lui.
Le sujet le mérite en effet doublement : pourquoi l'autorité publique accepte-t-elle de renoncer à toute action pour empêcher cette incitation à la multiplication des cas et à l'aggravation des troubles ? Comment une loi peut-elle être enterrée dans le court chemin qui l'amène d'une Assemblée à l'autre ?
Un oubli ? Dans ce cas, Valérie Boyer répondrait aux questions des journalistes et aurait, comme moi, soulevé la question depuis bien longtemps pour rappeler notre vote aux oublieux.
Espérons que la question monte dans l'actualité médiatique et force le gouvernement à une réponse.
Commentaires
Cette interdiction est effectivement très nécessaire. Mais il faut peut-être aller plus loin en développant une véritable prévention au sein du système scolaire, avec si possible une veille constante pour dépister les jeunes (ce sont principalement des filles) qui entrent dans ce processus morbide. L'anorexie est en grande part une pathologie ignorée ou négligée, c'est très dommageable. En la matière, la vigilance d'un réseau, associant l'infirmière scolaire, les profs, les personnels éducatifs, les camarades de classe, et naturellement la famille, peut contribuer à prévenir les situations avant qu'elles ne se dégradent. Malheureusement, le fait de supprimer des postes dans l'Éducation Nationale constitue un vrai frein à cette démarche préventive.
Je me fais l'avocat du diable!
Mais je reconnais que l'existence oubliée de cette loi peut tuer.
Malgré tout même sans rentrer dans le dénombrage des morts ni dans cette logique quantitative, qu'est-il fait d'efficient, d'efficace pour lutter contre ce qui devrait être une priorité de santé publique y compris dans le coût pour la Sécu, de l'obésité voire de la surcharge pondérale?
Vous êtes-vous renseignés sur le prix des médicaments antidiabétiques et/ou hypocholestérolémiants dans le traitement antidiabétique oral du diabète dit de la mâturité, de type 2 pour les connaisseurs?
Certains voient en strict terme de gestion comptable: pendant qu'ils sortaient de l'ENA, d'autres passaient leurs années de médecine ou de pharmacie...
Ces maladies d'évolution lente, à bas bruit, deviennent chroniques et coûtent un maximum d'argent à la sécu étant donné leur chronicité "sans fin" sans compter tous les morts prématurément (même non fumeurs...)... Le mauvais cholestérol vous connaissez? Les effets pluripathogènes des hyperglycémies subchroniques, vous connaissez?
Pourtant, à grand coups de képis et de sifflets, les grands moyens (ceux de l'argent du contribuable) sont mis pour réduire les risques mortels sur la route et au passage se remplir les poches sur le dos d'une très grande majorité de titulaires de cartes grises qui sont bien loin d'être des chauffards!!!
Qu'est-il fait pour lutter contre surcharge pondérale et obésité? Ah, si, les études sérieuses montrent que qualitativement ou quantitativement, peu importe, près de 60%, oui, 60% des aliments joliments enpaquetés et disposés sur les rayons des grandes surfaces commerciales sont mauvais pour la santé à moyen ou long terme...
On en revient au tryptique: éducation, information ciblée, et évidement argent (pouvoir d'achat) des consommateurs...
En attendant procés entre docteurs (excusez du peu) minceurs qui font la une alors qu'il n'ont RIEN fait d'autre que remplacer plus ou moins l'argument commercial "régime hyperprotidique" par l'archi connu "jeûn glucidique" (plus ou presque pas de saccharose (vous connaissez les boissons contenant du glucose?), d'amidon (pomme de terre, pain, riz,...) qui fait l'objet des questions d'examen de 3ième année de pharmacie en biochimie"!
Voilà dans quel monde qui marche sur la tête nous vivons!
Et dire que les restos du coeur manquent de moyens...
Bonnes réflexions, vos calculatrices à l'appui s'il le fallait...
@ Pascal PILET
Oui, on supprime des infirmières scolaires, donc un facteur indispensable de la prévention. Résultat, des maladies dont le coût s'avère bien plus important pour la société(sans parler des dégâts pour la vie des personnes touchées) que celui des économies faites. Logique d'énarque.
Mine de rien, malheureusement, vous avez raison, santé publique et santé sociales, sont les grandes oubliées de ce gouvernement. Le Président de la République avait promis en 2008 que nous entrerions dans "une culture de la prévention". Nous n'en avons pas vu en 4 ans le moindre signe. Tout le contraire, comme le prouve le sabordage de cette loi.