Dans une journée très chargée à l'Assemblée (commissions et auditions se précipitent à l'approche des lois sur les régimes spéciaux de retraites et sur le plan de financement de la sécurité sociale), j'ai tenu la première réunion de ma vice-présidence "politique de l'âge".
L'allongement de la vie est le progrès majeur du XX ième siècle, et il est essentiellement un progrès médical et social, ce dont on ne peut que se réjouir. Imagine-t-on qu'en un siècle, la durée de vie, presque stagnante jusqu'alors, a doublé ?
Cet immense progrès est aujourd'hui le défi majeur du XXI ème siècle et c'est d'abord un défi politique touchant tous les domaines : sociaux, sociétaux, financiers, médicaux..
Je n'en aborderai qu'un ici : la modification radicale des équilibres familiaux
o On se mariait autrefois pour 20 ou 30 ans; l’espérance de vie théorique d’un mariage a aujourd'hui, elle aussi, doublé. Ceci, ajouté à l’allègement des dogmes religieux et sociaux, fait que l’on se marie souvent deux fois, voire plus; ce point creuse l’inégalité entre hommes et femmes : les femmes vivent plus longtemps mais se remarient moins aisément après 40 ou 50 ans et ne fondent pas de nouvelle famille.
o Les générations se superposent et il n’est pas rare d’en voire coexister 4 et bien souvent 5 ; l’ordre des décès ne suit plus obligatoirement la chronologie prévisible et des parents âgés voient souvent mourir de maladie ou d’accident leurs enfants et petits enfants.
o Parallèlement, ces générations qui coexistent ne cohabitent plus, avec toutes les conséquences possibles en matière de logement et d'isolement.
o Des familles décomposées et recomposées contribuent à cet empilement de générations, posant des problèmes de responsabilité et de prise en charge. Les enfants ou petits enfants peuvent être amenés à devoir soutenir deux générations.
° l'allongement de la vie modifie grandement le calendrier entre les sexes ; les femmes sont mûres plus tôt, non fertiles plus tôt, leur vie est plus longue ; les rapports entre les sexes en sont, de manière pas toujours consciente, affectés.
Combien d'exemples avons-nous autour de nous de cette redistribution des cartes familiales, qui sont d'ailleurs quelquefois des cartes de solitude et d'isolement ! Nous y pallions pour l'instant, mais il faut sûrement beaucoup innover, imaginer, changer nos mentalités, pour que l'évolution puisse se faire de manière à peu près harmonieuse et que ce gain inespéré de vie donné aux humains ne soit pas un jour l'occasion d'une révolution générationnelle dressant les âges les uns contre les autres.
Et il y a le problème des retraites, de l'âge où elle souhaitable et possible, de la possibilité de la financer quand sa durée est égale au tiers de la vie..
Nous ne devons plus rien penser avec des schémas anciens. Ni les politiques, ni les citoyens, et je crains à entendre les uns et les autres, que ce ne soit pas encore gagné.