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Mon père, Vendéen, m’a inculqué très tôt ce précepte : « La géographie l’emporte toujours sur l’histoire ». Précepte austère au premier regard, dont j’ai eu quelque mal à m’imprégner quand, sur les bancs du lycée, je planchais sur le yersinien et sur l’apalachien.

Mon père était historien, très pénétré de ces grands moments où les hommes renversent la table et mettent un nouveau couvert ; sa constation marquait de sa part une grande humilité. Elle a fait son chemin par longues et lentes marches avant de parvenir à ce fond obscur du cerveau où l’on fait siens les enseignements des autres pour les utiliser à sa mode.

La géographie, ce n’est pas seulement une suite de contours, de tracés et de climats, c’est la nature. Mot presque totalement oublié au profit de l’ « environnement », celui-là partout présent jusqu’à servir de nom à un parti ou, au moins, à un mouvement de pensée qui serait bien marri si on le qualifiait de « naturiste ».

L’histoire, ce n’est pas une suite de dates et de grands noms : c’est la prise des hommes sur leur destin. Ces hommes peuvent faire la révolution, renverser les tables ou monter sur elles pour de grandes proclamations, si à ce moment une bourrasque survient, si une forte vague entre dans l’amphithéâtre où ils jouent leur destin, plus rien ne reste de leurs paroles, ni de leurs actes. Ils n’ont à ce moment que d’être solidaires et de reconstruire sur table rase.

J’écoutais tout à l’heure un morceau de discours de Sarkozy en 2007. Il promettait alors un assouplissement des règles de construction sur le littoral. Comme d’hab (et, pour une fois, il convient de s’en féliciter), promesses et grandes phrases n’ont été à ma connaissance suivis d’aucune concrétisation réglementaire.

Pour autant, les constructions se sont faites, où plutôt, ont continué à se faire sans susciter grande indignation. La Bastide se situe entre 1m et 3m en dessous de la cote des endiguements . Qui ose interpeller ceux qui ont décidé d’y construire, y compris des parkings souterrains ? A Hossegor, toute la partie sud de « ma » plage est construite en zone inondable rouge. L’expérience pourtant devrait instruire : semblable quartier, en même lieu, a été avalé par les vagues il y a à peine plus de cinquante ans.

La Vendée, la Charente maritime, et nous-mêmes qui en sommes si proches et qui savons que nous devons à la seule direction des vents et courants de n’avoir pas connu les mêmes abîmes, sommes en deuil. Les leçons que la géographie donne à l’histoire se comptent en milliers de morts et d’années perdues pour le développement local. A ne pas les entendre, l’histoire joue contre son camp.

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