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Je reviens sur notre acte de résistance, hier soir au Parlement : il faut que chacun sache que ce qui s’est passé au parlement n’est que le paroxysme de ce qui se passe en ce moment à tous les niveaux (éducation, justice, médias …) dans notre pays : passage en force et extinction des contre-pouvoirs.

Pardon de ce billet un peu pédagogique et détaillé.

L’ordre du jour amenait hier en séance l’article 13 de la loi organique : « article guillotine » permettant la modification du réglement intérieur de notre Assemblée dans le sens de la réduction du droit d’amendement et de la limitation du temps de parole des députés.

Le droit d’ « amender » la loi, c’est à dire d’intervenir dans sa conception est un droit imprescriptible de chaque député. Non, bien sûr, en son nom propre mais au nom de ceux qu’il représente. Défendre le droit d’amendement et notre liberté de temps de parole, ce n’est pas défendre la possibilité de bla-bla-ter et de faire le beau dans l’hémicycle, mais tout s’implement d’éxercer le « mandat » qui nous a été confié par 120 à 150 000 Français pour faire la loi. « Notre droit d’amendement c’est votre liberté d’expression », peut dire chacun de nous.

Hier donc nous abordions cet article 13 avec la volonté de mener un débat de fond et de faire preuve d’ouverture. Dans cette perspective, Jean Marc Ayrault a proposé que chaque groupe politique puisse, annuellement, choisir 4 textes qui lui paraissent fondamentaux sur lesquels la limitation de temps de débat ne s’éxerce pas. Quatre textes par an, alors que le Gouvernement s’est réservé 8 possibilités par an de mettre en oeuvre l’article « 49-3 » qui lui permet de passer en force, c’était une proposition méritant attention et échanges sereins.

Au lieu de cela, le Président de l’Assemblée, a interrompu le débat : quatre orateurs seulement s’étaient exprimés (deux d’un côté, deux de l’autre) quand 18 étaient inscrits. Dix-huit prises de paroles n’avaient rien d’excessif sur un texte de cette importance. Le Président a au contraire signifié que l’Assemblée était suffisamment informée et demandé que l’on vote sur cette suffisante information, vote qui lui permettait de se soustraire au débat.

Nous ne l’avons pas accepté. Je passe là sur les détails de procédure nous permettant d’interrompre la séance. Revenus dans l’hémicycle, nous avons décidé de demeurer devant le perchoir, sans regagner nos places, manifestant ainsi que nous ne poursuivrions pas en l’état la discussion. Le vote n’avait pas eu lieu, Bernard Accoyer a passé outre, et commencé d’égréner le numéro de nos amendements ainsi que le nom du premier signataire de chacun, en ajoutant seulement « non défendu » avant de passer au suivant.

Attitude méprisante pour l’opposition et tout à fait au-dessous de la fonction de Président. Ce qui a soulevé l’indignation jusque dans la majorité. En face de moi, le député Grand, de l’Hérault criait « Chirac ne l’aurait pas supporté ! Jamais Chaban n’aurait fait cela ! Arrête-cela ! ».

Accoyer poursuivait, le nez dans sa liste… Nous avons entonné la Marseillaise, ce qui n’avait pas été le cas dans l’hémicycle depuis 1947. Avouons, que cela n’est pas un moment indifférent.

Accoyer a poursuivi …

Nouvelle suspension de séance. Nous avons à l’unanimité décidé de n’être plus présents dans l’hémicycle sine die*.

Très belles interventions des deux anciens présidents de l’Assemblée, Fabius et Emmanuelli. Tous les deux très respectés pour la manière dont ils ont présidé, comme le sont aussi Chaban et Debré.

Fabius a démontré avec beaucoup de simplicité et de grandeur pourquoi l’article 13 était non seulement contraire à la Constitution mais contraire à la modification de la Constitution, que nous avons voté il y a quelques mois. (voir billet précédent).

Emmanuelli, a expliqué le sens politique de l’ « obstruction » et rappelé que lors de sa Présidence, il avait demandé un temps de débat illimité pour l’opposition de l’époque (la droite et le RPR) au moment du vote pour le traité de Maastricht).

Le déroulé de cette séance est disponible en cliquant sur ce lien https://www.dailymotion.com/GroupeSRC/video/x83isy_1-crise-politique-article-13_news

Un très beau cours d’éducation civique sur l’exercice parlementaire.

  • c’est pour cela, qu’en ce moment même, Fillon et les ministres s’expriment devant un quart-de-cycle à l’occasion des questions d’actualité

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