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CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 TREIZIÈME LÉGISLATURE

PROPOSITION DE RESOLUTION visant à instituer un cadre légal et transparent pour les réserves ministérielles et parlementaires

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Alors que la France affronte une crise de la dette sans précédent et que le gouvernement présente plan de rigueur après plan de rigueur, il paraît plus que jamais urgent de rationaliser les dépenses de l’Etat et surtout de garantir à nos concitoyens une véritable transparence dans l’utilisation des finances publiques.

A cet égard, la pratique des réserves ministérielles et de la réserve parlementaire mérite que le législateur lui donne un cadre légal, afin de garantir des règles d’attribution et d’utilisation transparentes.

Issue d’une pratique apparue sous la présidence de Georges Pompidou, la réserve parlementaire est une enveloppe de subventions votée à l’occasion de la loi de finances, dont l’allocation et la répartition dépendent du Parlement : un volume de crédit est mis à disposition de chacune des assemblées pour contribuer au financement d’opérations d’intérêt local, ces crédits étant imputés sur les budgets des ministères concernés. Chaque parlementaire se voit ainsi attribuer une somme, qu’il répartit ensuite à destination de collectivités ou d’associations de sa circonscription pour la réalisation de projets qu’il souhaite soutenir. On estime que la réserve parlementaire s’élève chaque année à environ 90 millions d’euros pour l’Assemblée nationale et 55 millions d’euros pour le Sénat.

Relevant davantage de l’usage parlementaire que du droit, la réserve parlementaire ne repose sur aucun texte, qu’il soit législatif ou réglementaire. Ses modalités d’adoption comme sa mise en oeuvre restent donc particulièrement opaques.

Ainsi, l’adoption de ces crédits, par des amendements gouvernementaux, introduits sur demande des commissions des finances de chaque assemblée en deuxième délibération de la discussion du projet de loi de finances initiale, constitue un contournement de l’article 47 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. Cette procédure dérogatoire exclut ces crédits du droit commun budgétaire, mais implique également un statut ambigü pour les sommes ainsi adoptées. En effet, la « réserve parlementaire » semble bénéficier du statut inédit de « domaine financier réservé parlementaire »  : seule dépense décidée par le parlement, elle est indirectement gérée par lui. Problématique d’un point de vue juridique, cette procédure d’adoption, l’est également d’un point de vue démocratique, puisqu’il est impossible d’appréhender avec exactitude le montant global de ces subventions d’initiative parlementaire.

Une réforme de la pratique de la « réserve parlementaire » implique également une meilleure transparence des critères d’attribution de ces subventions et de répartition des crédits entre les parlementaires. Il semble que ces critères dépendent avant tout de facteurs politiques : appartenance ou non à la majorité, ancienneté dans l’hémicycle, proximité avec la présidence….De même, il n’est fait aucune publicité des montants attribués à chaque parlementaire ou de leur utilisation, ces informations étant considérées comme confidentielles par les Assemblées, non seulement à l’égard des citoyens, mais aussi des parlementaires eux-mêmes, qui ont les plus grandes difficultés à obtenir des renseignements hors de l’utilisation de leur propre « réserve ».

Les ministères disposent également de réserves, dénommées « crédits d’intérêt local », qui contournent le droit commun : si le montant de ces crédits est bien soumis au vote du Parlement, leur utilisation reste à la discrétion des ministères. Comme dans le cas de la réserve parlementaire, ces fonds servent à soutenir des initiatives locales.

Par ailleurs, le Président de la République a encore brouillé l’utilisation de ces « Réserves ministérielles » lorsqu’il a créé un budget annexe à la Présidence de la République en décidant d’utiliser la réserve ministérielle du ministère de l’intérieur. Aujourd’hui, c’est le Président de la République qui attribue aux élus locaux les diverses subventions d’intérêt local que le Ministre de l’intérieur gère habituellement, soit 20 millions d’euros dans le budget de 2012.

Cette évolution est problématique : le Président de la République étant irresponsable devant le Parlement, il ne peut, sans violer la Constitution, disposer de tout ou partie du budget des ministères.

Il ne saurait être ici question de remettre en cause l’existence de ces « Réserves » : ces fonds ont une utilité certaine au niveau local. L’opacité de leurs règles d’attribution et d’utilisation laisse cependant planer le doute quant à leur détournement possible dans un but clientéliste.

Face à ce bilan très partagé de la pratique dite des Réserves, la présente proposition de résolution souligne l’importance de donner un cadre légal et surtout transparent à l’utilisation de ces fonds publics.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION Article unique L’Assemblée nationale,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu l’article 136 du Règlement,

Vu l’article 14 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, qui dispose que « Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs Représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée. »

Considérant que le Président de la République ne saurait disposer des ressources de l’Etat, hors celles qui sont attribuées au budget de l’Elysée par le Parlement sur proposition du gouvernement,

Considérant que la Constitution garantit l’égalité entre les citoyens et favorise l’égalité entre les collectivités,

Affirme que la pratique des réserves ministérielles et parlementaires doit faire l’objet d’un encadrement légal :

− Instituant des critères d’attribution transparents et objectifs pour les subventions issues des réserves ministérielles et parlementaires ;

− Établissant une véritable transparence dans l’utilisation des fonds concernés, par le biais d’une publication officielle des montants, des bénéficiaires (ministères et parlementaires), des destinataires des subventions et de la nature des projets.

− Garantissant l’égalité d’attribution maximale entre les Parlementaires.

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